LE FESTIVAL INTERNATIONAL SONINKE (FISO 2020) « ACCOUCHE » DE GRANDS PROJETS

Dans le cadre de la première organisation du FISO sur le sol gambien, la sixième édition de ce festival s’est tenue du 20 au 24 février dans sa capitale, Banjul. Cette édition succède à ses premières éditions ayant eu lieu dans plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest : les 1ère(2011),2ème(2012) et 4ème (2016)éditions se sont déroulées au Mali, la 3ème en Mauritanie (2014)et la 5ème au Sénégal(2018).

Etaient présents à ce grand rendez-vous culturel du soninkara et du soninkaxu, les Soninkos du Sénégal, du Mali, de la Gambie, de la Mauritanie, des Guinées (Bissau et Conakry),de la Côte d’Ivoire, entre autres, et ceux de la diaspora (plus particulièrement de la France et des Etats-Unis).

A cet événement, divers profils étaient présents : intellectuel-le-s (financiers, juristes, linguistes, sociologues…), hommes et femmes d’affaires, hommes et femmes politiques, journalistes, teinturier(e)s, commerçant(e)s…

A cette rencontre communautaire, hommes et femmes étaient habillé(e)s en traditionnel. Rien n’était le fruit du hasard. Couleurs, motifs, coutures, bonnets (portés par certains hommes), coiffures traditionnelles (faites par certaines femmes), bijoux (colliers et boucles traditionnels), etc. s’inscrivaient dans le cadre de la culture soninké véhiculant ainsi les valeurs du Soninkara.

Ce festival organisé en Gambie a connu plusieurs moments clés aussi importants les uns les autres.

JOUR 1 – OUVERTURE : DEFILE ET DISCOURS OFFICIELS

Le premier jour correspondait à l’ouverture. Il a été marqué par un défilé et des discours officiels.

Pour ce qui est du défilé, les différents pays ont défilé en habits traditionnels et chants exhibant ainsi la culture de chaque pays/région.

En ce qui concerne les discours officiels, il y en a eu plusieurs dont ceux du président de la Gambie (Adama Barrow) et du président du FISO (Ousmane Bocar Diagana).

JOURS 2ET 3 – CONFERENCE ECONOMIQUE : NAISSANCE ET/OU CONCRETISATION DE GRANDS PROJETS

Le deuxième jour a été marqué par une conférence dite économique intitulée « Soninkara Business, economic and politicalintegrationand networking.»Le slogan était : «Our Culture is Our Identity. Baanaxu.», ce qui se traduit par« Notre Culture est notre Identité. Unité.»

Cette conférence a mis l’accent, entre autres, sur l’importance voire la nécessité de l’implication des Soninkos dans la politique, le monde des affaires et le développement économique.

Des diverses interventions faites, nous pouvons mettre en lumière quelques idées véhiculées :

  • La nécessité de la mise en place d’associations et d’institutions fortes (et non d’hommes indispensables) afin que le travail s’inscrive dans la continuité et la durabilité ;

– L’importance de la mise en place d’une base de données faisant ressortir les compétences et domaines d’expertise des Soninkés à travers le monde afin que ces derniers puissent se rassembler, travailler ensemble et se recommander mutuellement ;

– L’importance de la création des banques, des moyens de transfert d’argent, d’autant plus que les Soninké, de la diaspora particulièrement, envoient d’énormes sommes d’argent vers l’Afrique ;

– Faire de la communauté soninké une entité émergente, réunie et soudée à l’image de la communauté juive : « Les Soninkos devraient être la deuxième communauté juive » (d’après l’Autre) ;

– L’importance des pouvoirs économique, social et politique, nécessaires et indissociables au développement de la communauté Soninké.

Cette conférence a mis en exergue plusieurs projets aussi intéressants les uns les autres.

1. Création d’une institution financière par et pour les Soninkos : « Wagadu Bank »

Dans la perspective de cette conférence, l’auditoire a été amené à réfléchir sur la création d’une banque soninké.C’est dans ce cadre que certains financiers – tels que Djimé Diagana et d’autres experts soninkos travaillant dans des banques nationales, régionales voire internationales – se sont centrés sur l’importance et la nécessité de créer une institution financière appartenant aux Soninkos. De l’intervention de Diagana, nous pouvons retenir quelques citations :

  • « Tout ne peut se dire ici, en plénière. C’est la petite réunion qui engendre la grande réunion ou c’est la petite réunion qui prépare la grande réunion» ;

– « Il faut la création d’une institution financière à domination Soninké» ;

– « Nous avons besoin de structures solides, fortes et bien réfléchies » ;

– « Dans Soninkara, on doit travailler dans la perspective : onakhoubanéhaye» ;

– « Mettre en place des structures faites par nous et pour nous » ;

– « Faisons quelque chose pour le soninkaxu » ;

– « La bataille économique se prépare en temps de paix » ;

– « Il faut des stratégies, du lobbing » ;

– « Il faut diversifier nos systèmes de travail et d’investissements».

Ses confrères financiers – tels qu’Ismail Camara et Samba Camara – se sont inscrits dans la même optique en proposant, entres autres,la mise en place d’une « base de données » ou la « création d’un réseau de communication, d’un réseau d’intellectuels.» Ils ont aussi invité les participants à réfléchir ensemble au nom de la banque et au pays (où vivent des Soninké) pouvant accueillir son siège central. Selon eux, cette réflexion devait prendre en compte, à la fois, les aspects techniques et juridiques pouvant permettre la création de ladite banque.

Au soir du deuxième jour, le rêve relatif à la création de cette institution financière par et pour les soninkés a commencé à prendre forme à travers les promesses faites par le président gambien, Adama Barrow. Il promet ainsi d’octroyer l’agrément nécessaire pour la création de cette structure financière ainsi qu’un terrain pour l’emplacement de l’Académie soninké qui est un projet phare du FISO également.

Je me permets de faire un commentaire à ce niveau. Personnellement, je pense que la banque et l’Académie soninkés – qui sont deux grandes institutions aussi significatives voire représentatives du soninkara et du soninkaxu- ne devraient être logées dans un même pays et ce, pour plusieurs dont je ne citerai que deux:

  • Eviter que les autres pays concernés par le FISO ne se sentent léser (mais plutôt impliquer de façon, plus ou moins, équitable en possédant aussi,sur leurs territoires respectifs,des institutions symboliques véhiculant des valeurs soninké) ;

– permettre une meilleure vulgarisation des richesses matérielles et culturelles des Soninkos à travers l’espace.

De ce fait, je pense que le terrain octroyé pour l’Académie pourrait être utilisé pour la construction du bâtiment de la Banque-mère (siège central) de « Wagadu Bank », d’autant plus que son agrément y est déjà acquis.

« Wagadu Bank »est le nom attribué à cetteinstitution financière. Il fait ainsi allusionau mythe deWagadu, le grand empire des Soninkos.

Il est prévu que cette banque soit effective d’ici le prochain festival (2022).En revanche, ceux qui travaillent pour sa mise en place (experts : financiers, juristes, etc.) se sont fixés,comme échéance, d’ici la fin de l’année (décembre 2020).

2. Financementde projets

Le FISO réfléchit également sur la manière d’appuyer aussi bien financièrement que techniquement les personnesporteuses de projetsafin de leur permettre de créer leurs entreprises.Cela dit que le FISO s’engage pour l’auto-emploi (l’entrepreneuriat).

3. Création d’un espace culturel soninké : le rêve de feu DiadiéSoumaré

Le projet de création d’un espace culturel en France par et pour les Soninkos fait partie des projets clés que le FISO souhaite voir réaliser.

Cet espace devrait promouvoir la culture et la langue soninkés et comporter plusieurs espaces (des salles de conférence, un lieu d’exposition, un lieu d’hébergement, une salle de cérémonie, etc.)

Pour sa création, le devis s’élève à deux millions (2 000 000) d’euros.La paternité de ce projet revient à feu Diadié Soumaré (ancien président du FISO) qui a été le premier a apporté sa contribution financière.

Entre autres, il s’agit-là de trois grands projets mis en exergue durantcette 6ème édition.

JOUR 3 – LA « CONFERENCE DES FEMMES »

C’est dans une salle remplie d’hommes mais largement de femmes qu’a eu lieu la conférence dite des femmes. A cet effet, plusieurs thématiques ont été exposées par les femmes des divers pays concernés :

-Migration : responsabilités des femmes soninkos(Mauritanie) ;

– Rôle des femmes dans l’éducation (Sénégal) ;

– Femmes et agriculture (Mali) ;

– Etc.

De façon résumée, cette conférence a été l’occasion pour les femmes soninké de parler d’elles et de leur émancipation dans différents domaines de développement. Les hommes aussi ont pris la parole afin d’intervenir sur les diverses thématiques.

Il faut noter que les femmes s’affirment de plus en plus au sein du FISO. Durant ce festival, elles tiennent à obtenir une journée qui leur est exclusive pour parler entre elles d’elles – de leurs difficultés dans divers domaines et des solutions qu’elles peuvent apporter.

ATELIER LINGUISTIQUE : HARMONISATION DE LA LANGUE SONINKE

Tout au long du festival, le comité linguistique s’est réuni, comme d’habitude, pour travailler sur l’unification de la langue soninké. Composé d’intellectuels résidant ou appartenant à diverses zones géographiques(Mali, Mauritanie, Sénégal, Gambie, France…) et disciplines/professions(linguistes, professeurs, mathématiciens, etc.), ce comité se réunissait tous les jours de 9heures à 17heures.

Pour rappel, ce dernier travaille depuis de longues années sur l’homogénéisation de la langue soninké.De ce fait, au-delà des rencontres faites durant le festival, ce groupe a l’habitude de se réunir pour atteindre son objectif qu’est d’amener les académiciens locuteurs de cette langue à apprendre- à travers l’écriture, la lecture et le parler -un soninkéunifié.

Soulignons que cette harmonisation linguistique est au cœur du FISO, elle constitue l’un de ses projets phares étant même à l’origine de ce festival.

LA FOIRE

Comme chaque édition du FISO,il y a eu une foire qui a duré tout le long du festival. Ça a été l’occasion pour les commerçant-e-s d’exposer et de vendre leurs articles. Ces derniers étaient de diverses natures : habits traditionnels, bijoux, calebasses, louches en bois, beurre de karité, produits alimentaires (thé, tomate, pain de singe, gingembre et mangue séchés…), entre autres.

SOIREES CULTURELLES

Durant le festival, il ya eu des soirées culturelles pratiquement tous les soirs (à partir de 20h) au stade de bakaw.Tous les pays étaient représentés par leurs troupes venues montrer leurs cultures à travers le chant et la danse.

Pour ce qui est de la Mauritanie, trois troupes étaient présentes : celle du Guidimakha, du Gorgol et de Nouakchott.

DIFFICULTES ORGANISATIONNELLES

Durant cette édition, des difficultés liées à l’organisation du festival et à la prise en charge des festivaliers ont été rencontrées. La Gambie n’a pas été à la hauteur en ce qui concerne ces aspects.Mais les résultats obtenus – notamment les facilités faites parle président Adama Barrow – ont permis d’atténuer, de masquer ces insuffisances organisationnelles.C’est d’ailleurs, l’occasion de souligner que Barrow est désormais l’invité d’honneur du FISO.

7EME EDITION DU FISO : LA MAURITANIE A L’HONNEUR

A la clôture de cette 6ème édition, l’annonce de la prochaine édition en Mauritanie a été faite. Ainsi, les couleurs du soninkaxu et du soninkaray seront portées en 2022, inch’Allah.

Baye Tidiane DIAGANA

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