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La Mauritanie, un pays multiculturel

Dépositaire d’un patrimoine historique fort glorieux, le « bilad Chinguit » a été pendant des siècles un champ propice, un véritable laboratoire au brassage de populations d’origines diverses. En effet, la Mauritanie était un passage obligé pour les caravanes du commerce transsaharien qui se faisait entre le Maghreb et l’Afrique Noire. C’est sur ce territoire également que naquît et prospéra le fameux empire du Ghana, un des plus prospères et des plus puissants du Moyen âge africain, avec tous les métissages et les brassages que cela avait occasionné.

Avec l’épopée almoravide, on assistera de nouveau à un expansionnisme musulman qui fut le prétexte à une vaste intégration de populations d’origines diverses. Donc, aujourd’hui, en Mauritanie, si l’élément arabe demeure encore prédominant, il n’en demeure pas moins vrai qu’il existe, néanmoins, d’importantes minorités ethniques.

S’agissant de l’élément arabe, c’est-à-dire la société maure, sa constitution remonte à l’arrivée des tribus Hassanes à partir du XIII-XIVème siècle. Elle fut à l’origine de conflits incessants qui se poursuivront jusqu’à la fin du XIXème siècle ; mais elle eut aussi des conséquences d’une toute autre portée. En effet, les éléments constitutifs de la société traditionnelle maure apparurent.

Abolis avec l’indépendance, les castes comportaient autrefois les Hassani (guerriers d’origine arabe), les Tiyab (Hassani devenus marabouts), les Mrabtins (anciens Zwayas berbères), les Zanaga (anciens Lahma berbères), les Ma’almine (forgerons), les Igawen (griots) ainsi que les Abid (noirs captifs) et les Haratines (Affranchis), les Imraguen (Pêcheurs) et les Némadis (chasseurs tributaires).

Ainsi, dans la plus grande partie du pays, la langue arabe parlée par les Hassanes, le « Hassaniya » est adoptée.

Le renforcement de la culture arabe dans le pays avec l’arrivée des Hassanes, sa greffe sur le vieux fond berbère est un élément fondamental, générateur de l’actuelle culture maure, fortement influencée par l’Arabie, mais originale.

Notons sur le plan de l’organisation politique que, peu à peu, à partir du XVème siècle, mais surtout au XVII ème et XVIII ème siècle, vont se fonder les Emirats du Trarza, du Brakna, du Tagant, du Hodh et de l’Adrar. En réalité, ce sont des groupements assez fragilisés, instables, de tribus, dirigés par un chef de guerre, partageant son autorité avec les notables de la « Jemaa ». Les rivalités entre Emirats et aussi entre tribus étaient constantes ; comme il en existe encore de nos jours.

L’autre composante de la population mauritanienne est constituée par les négro-africains, en l’occurrence les Soninkés, les Wolofs et les Halpulars. Il s’agit de trois ethnies, toutes musulmanes à 100% et qui partagent bien des similitudes dans leur mode de pensée et d’organisation sociale. Néanmoins, les trois langues parlées par les minorités négro-africaines, ne semblent pas directement apparentées entre elles. Le poular et le Wolof sont rattachés par certains historiens au groupe sénégalo-guinéen, le Soninké quant à lui appartient incontestablement au groupe Mandé. Toutes ces communautés existent au Sénégal et au Mali, ce qui n’est pas sans créer des tensions liées à l’appartenance nationale. C’est ainsi que lors du conflit entre la Mauritanie et le Sénégal, en 1989, on a assisté, en Mauritanie à des exactions contre les négro-africains considérés, à tort, par des milieux extrémistes panarabes, comme des sénégalais.

Bien qu’islamisés, les négro-africains de Mauritanie ne peuvent être considérés comme arabisés en arabe littéraire, à l’exception de certaines familles maraboutiques chez les Halpoular, l’ethnie noire la plus nombreuse. Par exemple les grandes familles « Toorobé » avaient un niveau très respectable de culture arabo-islamique. Mais la fréquentation de l’école coranique pour ces couches de la population se limitait le plus souvent à l’acquisition de quelques versets pour la prière. Notons pour conclure sur ce point que la politique coloniale fut une politique délibérée d’oppression linguistique et culturelle. L’assimilation culturelle par le biais du français a visé tout d’abord à éliminer l’arabe littéraire de toutes les nationalités de Mauritanie. L’évolution de la situation linguistique après l’indépendance est demeurée tributaire de la question politique des mouvements nationalistes.

Bakari Guèye

« Correspondances International »,

Fevrier 2007, Montpellier (France)

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