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  FAIRE ECHEC A L’ETHNICISME POLITIQUE

Mbacké Ndiaye est juriste et politologue sénégalais. Il vit à Bruxelles en Belgique.

Nous extirper du « rêve » ou, pire,  faire sombrer « le rêve sénégalais ». Tel est le défi à nous lancé par les tenants nouveaux de l’ « ethnicisme » et du radicalisme ethnique distillés en catimini au sein de notre société par des irrédentistes sectaires tel que le nébuleux « Amadou Kufa »  au Mali mais surtout par le truchement d’un pouvoir médiatique englué dans des causes et des combats de caractères partisans ou sectaires.

Par Mbacké Ndiaye*

Le risque, à termes, c’est l’anéantissement de Prés de 50 ans de sacrifices et d’efforts conjugués, de la part de VALEUREUX hommes et de femmes Déterminés à faire triompher dans nos Sociétés anciennes le concept moderne d’Etat nation.

« Sénégaal, benn bopp’la ; kenn meunu ko xarr nyaar. »  (Le Sénégal est indivisible).  Ce rêve est aujourd’hui de plus en plus sérieusement menacé.

Cette réflexion est celle d’un esprit QUI SE VEUT libre et patriotique. Elle vise à attirer l’attention sur le NOUVEAU péril  rampant qui assaille les fondements de notre société Sénégalaise ainsi que le socle de valeur qui constitue le soubassement de notre commune volonté de vivre en commun. LES VERTUS CARDINALES QUI ONT contribué à fabriquer LONGUEMENT ET PATIEMMENT notre spécificité culturelle, plus exactement, notre identité culturelle nationale sont à présent MENACEES  par  L’ETHNICISATION LANCINANTE DE L’ESPACE POLITIQUE NATIONAL. Ce sera l’objet de NOTRE réflexion.

   « ETHNICISME » POLITIQUE, échec et mat 

GENN A SIIW NIEUP (eup bayré) TAX’UL NGE GENN KENN dixit Wolof njaay (« devenir célèbre ne signifie pas être meilleur que les autres. », proverbe wolof)

Si l’aspiration à l’existence culturelle est une chose défendable par ce qu’elle nous parait très légitime, autre chose est la volonté de puissance et d’hégémonie d’un groupe donné qui aspirerait à faire triompher égoïstement ses intérêts claniques par un détournement du Pouvoir Politique à eux temporairement confié par le peuple dans le but précis de servir les intérêts de la communauté nationale dans son ensemble.

Certes, il existe dans l’histoire et dans la marche des peuples et des nations, des opérations ou actions d’éclats ;  parfois des camouflets dont le but ultime est de faire évader nos rêves (valeurs individuelles, ethniques, communautaires ou nationales) des repoussantes geôles de la barbarie, du musèlement et de l’oppression. De belles pages d’histoires écrites et paraphées du sang et de la sueur des hommes et des femmes se sont donnés comme belle conduite à suivre,  celle d’être les protagonistes centraux et essentiels de leur propre histoire dans le tumulte de la Destinée humaine.

La sueur et le sang sont les symboles du sacrifice et de l’effort nécessaires pour se dresser contre l’immobilisme et le statu quo : un dépassement de soi qui se traduit par cette prédisposition au martyr à l’accomplissement d’un acte d’offrande, un don de soi consenti pour empêcher le ravalement de l’homme ou de ses intérêts à la condition de sous homme ou de sous intérêts voire même d’homme ou de chose sans intérêt tout simplement. C’est une attitude d’une grande dignité que nous louons à sa juste valeur et apprécions comme telle.

Il existe cependant une différence radicale entre la volonté d’une affirmation de soi qui est une question culturelle et la quête de podestat faisant intervenir la question politique dans un objectif qui ne satisferait que quelques intérêts sectaires ou groupusculaires. Et l’Autorité, considérée comme une « res publica » c’est-à-dire « le bien » de tous, ne pourrait souffrir d’aucun accaparement ou népotisme ethnique. La référence au pouvoir nous fait dériver infailliblement sur la question politique et sur la problématique de l’occupation de l’espace publique.

L’équation qui nous soumise à réflexion pourrait être posée comme suit : volonté d’affirmation de soi (culturel, ethnique, religieux) + détournement de moyens étatiques = clash des intérêts ou lutte politique. La conséquence logique est l’ »ethnicisation » de la compétition politique.

 

User de la question ethnique au sein du débat politique pour conserver des avantages (…) constitue (…) une dérive et une forme de contestation vindicative

Le champ politique se définirait ainsi non plus par son objet et par son essence mais s’appréhenderait plutôt suivant l’appartenance ethnique des principaux acteurs en concurrence. Par suite imposerait que les citoyens privilégient dans les critères de choix de leurs représentants non plus les intérêts de la cité, comme l’indique logiquement le terme citoyen (qui est un dérivé du mot cité) et tels que formulés dans les différents projets de sociétés proposés par les partis politiques engagés dans la conquête ou la conservation du pouvoir mais ce choix des électeurs, si telle était la situation, serait désormais déterminé en fonction exclusivement de l’appartenance de tel ou tel candidat à telle ou telle ethnie ou groupe social.

Toute question culturelle qui se règlerait ou se débattrait au moyen de l’outil étatique grâce à l’occupation d’une « station élective ou de faveur républicaine » se muerait ipso-facto en une question politique et par conséquent deviendrait passible d’une contestation, d’un rejet ou d’une condamnation de la part des tenants du « statu quo » ou bien des tenants d’autres intérêts politiques débattus de la même façon dans l’espace publique.

Cette manière de procéder constitue, à nos yeux, le plus rapide et le plus sûr moyen de réactiver les démons du tribalisme, de l’ »ethnicisme », de la ségrégation, bref en un concept plus vaste, de la discrimination. (Nous ne citerons pas le racisme pour des raisons évidentes de contexte et de société).

User de la question ethnique au sein du débat politique pour conserver des avantages, conforter des positions ou renverser une hiérarchie dans l’objectif de concrétiser un projet sectaire inscrit ou non dans un possible et très probable agenda secret avec des visées transnationales constitue à notre sens et pour notre Sénégal une dérive et une forme de contestation vindicative par rapport à l’establishment social (la théorie de l’existant) .

Faire prévaloir le critère de l’appartenance ethnique sur le lien d’appartenance nationale c’est un énorme coup de massue porté à notre pacte national, à notre devoir de fraternité nationale, en résumé: à notre contrat social. Mais c’est aussi un manquement grave à la volonté commune librement exprimée au fil du temps d’opter, de privilégier ou d’enraciner dans l’existant commun (national), telle ou telle pratique ou expression culturelle provenant de tel ou tel groupe.

C’est ainsi qu’il faut « considérer » tout raidissement ethnique de quelque bord qu’il provienne comme une attaque au socle commun de valeurs que nous partageons et qui se sont lentement et profondément enracinées dans le substrat de vertus utilitaires et légales superposées dans le subconscient du peuple sans aucune intervention de nature insidieuse ou dictatoriale et se sont installées en conformité avec les règles du jeu politique, de l’interaction et du dialogue social régissant les sociétés démocratiques modernes.

« Le Wolof » a cessé depuis belle lurette d’être seulement une langue ethnique (…)il est le fondement et ciment de l’identité culturelle du pays.

La prépondérance de la langue WOLOF ses apports dans la consolidation de la nation sénégalaise ainsi que le pétrissage puis moulage de l’homo-sénégalensis,  par exemple,  est « un cas typique » de ce que peut être une vertu de nature utilitaire profondément et confortablement installée dans ce qu’il conviendrait d’appeler le réceptacle ou la sédimentation des valeurs et de matériaux qui soutiennent et entretiennent la si précieuse unité et stabilité nationale sénégalaise.

Cette langue a permis et permet toujours, partant de l’homme politique le plus en vue jusqu’au plus fruste paysan ou éleveur sénégalais habitant le village situé aux confins les plus reculés du pays, de partager ses doléances et ses espoirs, ses joies et ses peines, ses réussites et ses échecs avec l’ensemble de la communauté nationale sans avoir, de sa part, dépensé le moindre franc et sans avoir coûté à l’Etat l’investissement le plus dérisoire.

C’est tout le contraire du « Français » ou autres langues importées. (Voir tout le système éducatif, infrastructurel et humain mis en place par l’Etat pour assurer l’éducation et l’instruction des citoyens dans cette langue étrangère).

N’oublions, en aucun cas, que nous ne parlons de « langues nationales » que par abus de langage en ce qui concerne les autres langues du pays. Elles sont, certes, toutes sénégalaises et aussi méritantes que la langue « Wolof  » mais cette dernière seule possède réellement la dimension nationale requise pour bénéficier légitimement de cette qualité.

« Le Wolof » a cessé depuis belle lurette d’être seulement une langue ethnique ou celle du groupe majoritaire du Sénégal. Elle est le « véhicule » le plus usité dans toutes les expressions culturelles, politiques, médiatique, religieuse ainsi que dans les transactions quotidiennes de tous genres : il est le fondement et ciment de l’identité culturelle du pays. On ne dit plus « le Wolof »mais « le sénégalais » comme « le Français » pour la langue originellement parlée par « l’ethnie ou la tribu des Francs » dans le moyen-âge européen. Tout comme les français parlent « le Français », les anglais, « l’Anglais », les chinois : « le Chinois »les sénégalais parlent « le Sénégalais ».

Voilà pourquoi nous les Sénégalais de tous bords et de toutes appartenances sans exception aucune, avions tous, d’une seule voix, protesté contre les propos excessifs et provocateurs du très burlesque  président directeur général de la 2STV Mr El hadj Ndiaye lorsqu’il s’emportât devant des journalistes décidés à l’interroger en langue « Wolof », lors de sa « brouille » avec le PDG de la RTS à propos de l’exclusivité des droits de retransmission des matches de la CAN 2008 au Ghana. Heureusement qu’il comprit très vite l’étourderie, la maladresse et la bêtise de sa réaction. Sous « la pression », il cédât et se résolût finalement à parler « Wolof  » sans pour autant s’exprimer en Toucouleur.

Dire : « su ma waxxé Wolof, damay lakk Toucouleur » (si je parle wolof, je vais parler toucouleur) n’est pas une revendication culturelle, elle est d’ordre politique. C’est pourquoi elle constitue, aux yeux de tous les Sénégalais, un acte de sécession, de révolte et de sédition contre « l’existant sénégalais »; par ce que justement « le toucouleur » n’a pas la vertu pratique et praxéologique avérée dont « le Wolof » à fait preuve depuis le « get go » de la nation sénégalaise jusqu’aux temps présents.

Cette comparaison faite par ce patron de presse est dérisoire, ridicule et sans raison d’être. Elle renferme de surcroît et c’est là le danger véritable, les germes d’une revendication « ethniciste » excessive et injustifiée. (Evitons de transposer dans notre pays ce qu’il est désormais convenu d’appeler en Mauritanie « le syndrome Pulaar ». Ceux qui maitrisent l’histoire (politique et sociologique) tourmentée et ensanglantée de ce grand voisin du nord savent en mesurer la nocivité et les ravages de tous ordres (politiques, économiques et humains) dont ledit « syndrome » est quasi généralement porteur chez nos voisins

Et pour nous, « les  sénégalais »  de toutes parts, c’est tout simplement une affirmation et une attitude que nous qualifierons de « politiquement incorrectes », ou si vous préférez de « sénégalaisement incorrectes ».

*Mbacké Ndiaye, juriste et politologue  (Bruxelles)

 

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