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Editorial : La réforme de la presse sera-t-elle possible ?

La commission nationale de réforme du secteur des médias a remis il y a quelques jours son rapport final au président de la République. Ce rapport à priori bien ficelé comporte en son sein les suggestions et solutions appropriées. Reste à savoir si cette énième tentative sera la bonne. La balle est dans le camp du pouvoir qui gagnerait beaucoup à réorganiser ce secteur clé, pilier de la démocratie. Il y va de l’image même du pays.

Et pour ce faire il convient de confier l’exécution de cette réforme aux professionnels du secteur, à ceux qui ont été au charbon et qui ont connu la galère et les plaisirs des salles de Rédaction.

Il est vrai que le secteur de la presse est à la croisée des chemins, partout dans le monde. La technologie est passée par là, les nouveaux supports et les journalistes citoyens ont désormais eux aussi leur mot à dire. Ainsi, la démocratisation de l’information et de la pratique du journalisme ont ouvert la boîte à pandore et brouillé toutes les pistes. Et on en est arrivé à la revendication de la constitution d’un cinquième pouvoir, portant les préoccupations de la société civile et utilisant les canaux de diffusion du journalisme citoyen, une idée très chère au grand journaliste espagnol Ignacio Ramonet.

De ce fait, la liberté d’expression est fondamentale dans une démocratie car l’information relève de la catégorie des biens collectifs qu’il convient de diffuser largement afin de permettre le débat démocratique.

Jefferson affirmait préférer sans hésitation une presse sans gouvernement à un gouvernement sans presse, Tocqueville relevait que l’un ne va pas sans l’autre : « la souveraineté du peuple et la liberté de la presse sont deux choses entièrement corrélatives ».

En Mauritanie la presse a joué un rôle central dans la conscientisation de l’opinion et dans l’ancrage de la jeune démocratie naissante.

Son rôle est monté crescendo dès les premières années de l’apprentissage de la démocratie, un élan qui avait été stoppé net par un pouvoir encore dominé par ses reflexes autoritaristes malgré son nouveau vernis démocratique.

Et la descente aux enfers commença très tôt au beau milieu des années 1990 avec une inflation voulue et provoquée de titres. Il y en avait pour tous les goûts, pour toutes les tribus, pour toutes les ethnies, pour toutes les régions et pour toutes les tendances politiques. Chacun avait son journal.

Cette tendance va s’accélérer et s’aggraver au début des années 2000. Et avec l’accès au net et l’explosion des sites électroniques ce fut le coup de grâce, la Mauritanie devenant le pays du million de journalistes. Et la valse continue. Voilà le défi auquel sera confronté le gouvernement pour assainir le secteur de la presse.

Il va falloir mettre de côté les sentiments et l’interventionnisme de bon aloi pour frapper un grand coup dans cette fourmilière. Il s’agira d’appliquer sans calcul et sans états d’âmes les recommandations de la commission. Serait-ce possible ?  Oui si la volonté politique est réelle.

Le pouvoir devrait alors cesser d’instrumentaliser la presse et mettre fin à la propagande des médias publics. Ces derniers doivent cesser de jeter l’argent du contribuable par la fenêtre,  respecter scrupuleusement les cahiers de charge, changer fondamentalement leur ligne éditotoriale qui est toujours  digne de la Pravda, informer convenablement le citoyen comme il se doit. Ces médias sont censés être des medias de service public mais il n’en est rien malgré les gros moyens dont ils disposent et qu’ils dilapident pour un résultat quasi nul. Certes on note une volonté affichée de changement au niveau de ces médias mais dans le fond on ne voit pas grand-chose. Cela est aussi valable pour la HAPA.

Du côté de la presse privée, il convient de mettre sur pied une presse libre professionnelle et indépendante, une presse qui à l’image de la presse sénégalaise fait bouger les lignes et suscite le respect du pouvoir qui la traite comme un partenaire et suivant son rang de 4ème pilier de la démocratie

Etonnant et préoccupant que 60 ans après l’indépendance le pays ne dispose pas d’un magazine d’information digne de ce nom et encore moins d’une télévision privée qui se respecte à l’image de 2STV, de SEN TV ou de TFM, des télévisions qui cartonnent au Sénégal et au-delà des frontières.

En Mauritanie on aime beaucoup la facilité et nous sommes champions des records battus dans tous les domaines. Autant on peut voir un jeune sortant frais émoulu être catapulté dans un poste de décision au mépris de ses prédécesseurs et des lois régissant la carrière des fonctionnaires de l’Etat.

Cela est aussi valable dans la presse où tous les aventuriers sont venus s’échouer, certains s’érigeant du jour au lendemain en patrons de presse. Cela doit changer pour le bien commun et pour l’image de notre démocratie.

Bakari Guèye

 

 

 

 

 

 

 

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