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Paix et sécurité à l’heure des réseaux sociaux

L’intrusion des réseaux sociaux sur la scène médiatique, le rôle de plus en plus grandissant qu’ils occupent et leur impact sur la sécurité et la paix sociale, ont fait l’objet du second atelier des 50èmes assises de l’Union Internationale de la Presse Francophone (UPF) tenues à récemment à Dakar.

En effet, les Réseaux Sociaux sont aujourd’hui incontournables. Ils ont démultiplié la quantité des informations au détriment de la qualité.

Comment faire le tri? Quel rôle pour les médias dans toute cette masse d’informations? Quelle distance critique des médias par rapport à ce qu’ils diffusent et qui est susceptible de favoriser leur instrumentalisation?

Où en est-on avec la législation, la régulation, la co-régulation, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, la liberté de presse, la cybercriminalité, la répression, le buzz et clashes, l’éducation aux médias, le journalisme en temps de guerre ou de conflit asymétrique,  les médias traditionnels et médias sociaux, etc.

Les réseaux sociaux, une menace pour la paix

Toutes ces questions ont été abordées par  les panélistes.

Dans ce contexte brumeux, les professionnels des médias devraient  impérativement interroger des pratiques parfois sclérosées, analyser le contexte actuel de la circulation des contenus informatifs et continuer à puiser leurs forces dans leur formation, leurs codes d’éthique et de déontologie et adopter un refus systématique de privilégier la rapidité de la diffusion à la vérification de l’information.

La modératrice de l’atelier, Hanène Zbiss de la Tunisie a lancé les débats en prenant comme exemple le traitement journalistique des informations relatives à la confrontation entre Israël et le Hamas concernant le sort des habitants de la Bande de Gaza, en évoquant des faits censurés ou tus par les médias dits « traditionnels ».

Amadou Seck  de la Mauritanie a réaffirmé quelques fondamentaux du journalisme : vérification obligatoire des faits versus propagande ou course à la diffusion la plus rapide, tentatives de manipulation toujours présentes de la part de groupes organisés depuis toujours ne résistant pas au fonctionnement classique de collecte et de traitement de l’information de manière professionnelle et comme nouveauté notable l’existence de nouveaux canaux de diffusion, les réseaux sociaux, qui privilégient souvent les Buzz et les Clashs.

Lui succédant, Marcel Zoumenou du Benin a rappelé qu’aujourd’hui il n’y a plus de souveraineté du journaliste sur l’information et que nous sommes souvent à l’ère de la primauté de l’émotion sur la vérité et de l’information « dominante ». Il a interrogé l’assistance sur le fait qu’aujourd’hui l’audience des bloggeurs, web activistes et autres créateurs de contenus était le plus souvent largement supérieure à celle des « vrais » journalistes, avec une multiplication des sources d’information et de désinformation, d’où la nécessité de recourir de plus en plus aux méthodes de fact checking.

Pour Mamadou N’Diaye Président du réseau Théophraste du Sénégal, la paix et la sécurité sont rendues désormais vulnérables par les réseaux sociaux, comme en témoigne la récente décision au Sénégal de restreindre l’accès à Tik Tok, devenu un instrument de mobilisation pour des troubles à l’ordre public et pour une déstabilisation des autorités légales de la part de certains acteurs politiques. Il s’est appesanti sur les implications futures éventuelles des notions d’intelligence artificielle et de deepfake, ainsi que sur les mesures pouvant mettre la liberté d’expression en danger en riposte aux risques. Car les outils de communication horizontale actuels constituent aussi de véritables autoroutes de la désinformation.

La régulation des réseaux sociaux, une gageure

La liberté d’expression, la liberté de presse et les nouvelles pratiques de communication et d’information ont été au cœur des débats au cours de l’atelier, durant lequel le magistrat Papa Assane Touré, Secrétaire général adjoint du gouvernement sénégalais,a fait le point sur la réglementation  et la régulation des réseaux sociaux, revenant sur les qualifications juridiques de contenus illicites, manifestement illicites, informations, diffusion des informations, vie privée, publication, délit de presse, etc.

après avoir défini les contours de la notion d’informations illicites, le magistrat est revenu sur la question des qualifications des informations relevant deux qualifications majeures. D’abord, peuvent être des contenus illicites des informations placées secret-défense, des informations ayant trait au secret médical et au secret de l’instruction.

Il a expliqué le comportement que le journaliste doit adopté face à de telles informations.

En effet, ce dernier peut s’exposer à l’accusation du recel qui consiste à tirer profit d’une information défendue car, rien que le fait de détenir une telle information, cela  constitue une infraction pénale.

2ème qualification exposée par le magistrat, la notion de « contenus manifestement illicites ». Il s’agit de contenus portant atteinte à la sécurité publique, tels que l’appel à l’insurrection et l’incitation à la haine. La diffusion de ce type d’informations peut entraîner l’inculpation du journaliste.

Et le magistrat de préciser qu’en matière de presse, c’est la publication de l’information qui fait le délit (le fameux délit de presse).

A la question de savoir comment éduquer le public et  réguler les médias sociaux, le magistrat a souligné le déficit important en matière d’éducation aux medias et beaucoup de journalistes ne comprennent pas les enjeux et se croient intouchables, a-t-il noté.

Il y a dit-t-il une mauvaise utilisation des réseaux sociaux par les journalistes et tous les autres d’où la nécessité de former et de sensibiliser les blogueurs.

Faut-il alors réguler les réseaux sociaux? Le juridisme est-il la solution? Faudrait-il la dépénalisation ou la « déprisonnalisation » des délits de presse?

Au Sénégal, suite au débat organisé en 2017 on n’a pas retenu la dépénalisation.

Quant à la régulation des réseaux sociaux, le magistrat sénégalais affirme qu’il faut d’abord avoir prise sur eux, ce qui est loin d’être le cas.

Il y a d’abord le problème des hébergeurs qui sont situés à l’étranger. Il y a donc des obstacles techniques mais aussi des obstacles juridiques, car les réseaux sociaux sont régis par d’autres lois. De ce fait la régulation est extrêmement difficile pour ne pas dire impossible.

Quant à la solution de la coupure d’internet, il d’agit selon le magistrat d’une ingérence très grave dans la liberté d’expression et par cet acte, l’Etat se met en marge de la loi.

Les organes officiels de régulation, un instrument de censure déguisée

Donc pour Mr Touré on doit opter pour ce qu’il a appelé la co-régulation qui associe tous les acteurs.

Et pour lui, la plupart des organes de régulation dans nos pays sont des organes politiques et la condamnation prononcée dépend de la tête du client.

Ainsi quant on parle de régulation dans nos pays, cela rime généralement avec la censure. De ce fait, la législation peut-être un outil au blocage de la liberté d’expression.

Et pour le magistrat, la loi doit être claire. Il donne pour exemple certaines notions floues qu’on trouve dans les lois comme « fausse information », « offense au chef de l’état », des expressions vagues souvent utilisés par les magistrats pour sévir contre les journalistes.

Et c’est justement ce qui a inspiré cette boutade au professeur Mademba NDiaye, membre fondateur du groupe Sud Communication du Sénégal, expert en communication senior et analyste politique à la banque mondiale qui a affirmé qu’un journaliste intègre vaut 1000 blogueurs. Il doit donner l’information et n’a pas à respecter la loi.       

Bakari Gueye

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