Peut être qu’il n’est plus qu’une question d’heures ou de jours mais ce qui devait arriver va arriver inéluctablement. Toutes les personnes citées dans cette affaire dite « décennie de la gabegie » avec à leur tête celui qui a toujours fait tout au long de son pouvoir présidentiel, un pouvoir personnel, la pluie et le beau temps, seront traduites devant la justice. Le chêne, (Ould Abdel Aziz) va se retrouver face à un roseau (un procureur de la République). Peut être que ce jour-là, et pour la première fois dans l’histoire de la justice mauritanienne, le roseau (le procureur de la République) va jouer le rôle du « chêne » et le chêne, (Aziz) va jouer celui du roseau. Et ce jour là peut être aussi que, l’ancien « homme fort » du pays n’aura aucun intérêt à jouer au « plus malin » ou à « l’arrogant » en évoquant le fameux article 93 ajouté à la constitution pour « protéger » Maaouiya Ould Sid’Ahmed mais qui risque de se dérober sous les pieds de Ould Abdel Aziz un homme qui n’est plus aux yeux de la justice qu’un prévenu entre autres et comme tous les autres, un simple justiciable.
C’est vraiment dommage. C’est vraiment dommage que cette belle histoire de la décennie « dorée » pour beaucoup, contée aux mauritaniens depuis 2008 par le président « des pauvres », se termine par la mise à mort psychologique et morale d’un homme qui s’est inventé de toutes pièces et qui s’est autodétruit.
Je disais donc, dans quelques heures seulement, et peut être, dans quelques jours, parce que, la police des crimes économiques et financiers, qui n’avait l’habitude que de déférer une, deux, ou trois personnes à la fois, fait face actuellement à un casse-tête logistique sans précédent pour regrouper, transporter et déférer un nombre si élevé de prévenus, qui comptent parmi eux un chef d’état qui n’est plus que l’ombre de lui même, des petits délinquants économiques convertis en hommes d’affaires dans la hâte, et des personnalités respectables des milieux politiques et industriels comme Ould Ghade, Ould Bichraye et Zeine El Abidine le puissant chef du Patronat mauritanien et peut être le banquier en pole position dans l’hébergement de capitaux qui convergeaient ces dernières années de différents horizons.
Ce retard dans la logique de la procédure de déferrement, (procédure clôturée dans sa partie audition par la signature des procès-verbaux par les prévenus), est accusé sans doute par une volonté du parquet qui n’était pas préparé à accueillir par déferrement un nombré de personnes qui correspond comme par hasard, au nombre de passagers d’un vol pour la Mecque, sauf que cette fois le vol va atterrir en escale judicaire à trois pôles de parquets avant de reprendre son vol à destination d’une maison d’arrêt et de correction après avoir débarqué les passagers acquittés ou placés sous contrôle judicaire..
Ce qui signifie peut être que l’administration judicaire et pénitentiaire a du pain sur la planche. Ce qui retarde peut être la procédure de déferrement se sont les réponses aux questions de savoir : où recevoir ces 311 personnes à entendre ? Combien de temps prendront les premières auditons devant le Parquet ? Qui seront libérés sous conditions, qui seront acquittés faute de preuves, et qui seront déférés et où ? Cette dernière question restant fondamentale.
Au moment où j‘achève d’écrire cet article, la recherche des réponses à toutes ces questions laisse encore un répit à l’ancien président pour continuer de penser que son article 93, hérité de Maaouiya qu’il a trahi en 2005, est entrain de jouer en sa faveur.
Mais dans la réalité et dans les faits, Les Zeine Abidine, Ould Ghade, Ould iyahi, Ould Bouchraya et Ould Diaye le PDG de la SNIM en sursis qui vient de faire cadeau d’adieu à ses employés après un nouvel exploit dans le mensonge, vont se rendre à l’évidence : la Mauritanie et sa justice se recherchent et sont sur le point de se retrouver.
Les prévenus vont se déplacer vers un nouveau palais de justice réquisitionné pour la circonstance ou ad hoc ? Les trois pôles du parquet et les prévenus seront-ils territorialement déplacés pour raison logistique et de haute sécurité ? Dans quelques jours tout sera clair, aussi bien pour les prévenus, pour les collectifs de défenses, que pour les mauritaniens qui attendent tout de cette justice à laquelle 90 % d’entre eux ne croient plus à cause de ses antécédents sous tous les régimes qui se sont succédés depuis l’indépendance du pays.
Aziz se retrouvera t’il derrière les grilles ? Il n’a malheureusement aucune chance d’échapper à cette fin de parcours qui a commencé par la gloire et qui se termine par une humiliation qui lui collera à la peau jusqu’à la fin de vie.
Règlement de compte, comme le pense lui même ? Tazaabouts de Maaouiya, de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, d’Ely Ould Mohamed Vall, d’Ould Ghadde et d’Ould Bouamatou additionnées ? Vengeance mangée en « plat froid » par son ancien ami et compagnon d’armes ? Ou pour toutes ces raisons réunies ? La question ne se pose plus.
Dans, quelques heures ou dans quelques jours, l’ancien président Ould Abel Aziz va avoir du mal à avaler les conséquences de son refus de coopérer avec la justice à travers la police, et il sera surpris de constater que le collectif des avocats de l’état mauritanien ont pris un raccourci et n’ont pas emprunté le chemin où Me Ichidou et les autres avocats de la défense les attendaient au virage.
Dans quelques heures, dans quelques jours, inéluctablement et malheureusement, le déferrement au parquet de Ould Abdel Aziz va peut être déclencher le « coup de gong » qui brisera à jamais le mythe d’un homme qui pensait qu’il était « présidentiellement immortel » qui se cachait derrière deux chiffres, le 9 et le 3. Mais comme le dit le proverbe de chez nous : « ili mi dérègue ib’ leyame ar’yane », ceci est valable aussi pour celui qui se cache derrière deux chiffres qui additionnés donnent 13 un chiffre considéré par certaines croyances comme un chiffre porte malheur.
Mohammed Chighali