Yacoub Maiga un fonctionnaire exemplaire, jusque-là préposé de la douane en poste à la direction générale de la douane est menacé de radiation par le DG de la douane suite à une ténébreuse affaire de saisie de produits de consommation périmés.
L’affaire remonte au 20 juin 2020 lorsque l’intrépide douanier a découvert suite à un contrôle de routine au marché du 5ème à Nouakchott un container en cours de déchargement dont la marchandise, des biscuits, est périmée depuis 3 ans.
Sur les étiquettes collées il est marqué 2017. Yacoub informa immédiatement ses supérieurs mais personne n’était venu à la rescousse alors qu’il était seul face au propriétaire de la marchandise et ses employés et au transitaire qui a essayé de le corrompre en lui proposant un deal.
L’agent refusa l’offre et entre temps le transitaire appela ses supérieurs et tenta de les convaincre. Ces derniers appelèrent Yacoub qui campa sur sa position. Ce dernier ne reçut pas l’ordre de libérer le container et ne reçut pas non plus de renforts alors qu’il essuya toutes les formes de menaces et frôla l’agression malgré le fait qu’il était en uniforme. De 17h à 23 h Yacoub a pu tenir tête aux faussaires et réussit finalement à ramener la marchandise au Port.
Ses supérieurs ont alors contacté l’association de défense des consommateurs qui a confirmé la péremption de la marchandise.
Alors qu’il s’attendait à des félicitations, ses déboires ont commencé ce jour là car affirme-t-il « mon supérieur, le directeur du personnel qui n’est autre que l’actuel DG de la douane n’avait pas digéré l’affaire. »
Et d’ajouter qu’à l’époque le porte-parole de la direction générale des douanes l’avait sermonné l’accusant d’avoir révélé l’affaire devant la presse alors que dit-il il n’y était pour rien.
A l’époque des faits Yacoub qui avait déjà 16 ans de services était pressenti pour être décoré à l’occasion du 28 Novembre mais il avait été écarté.
En Décembre de la même année alors que son nom figurait sur le tableau d’avancement il a disparu comme par enchantement. Et pourtant affirme Yacoub sur les 120 agents promus au grade de brigadier j’en ai commandé 90 qui étaient passés comme stagiaires.
En essayant d’avoir des explications avec le directeur du personnel (le DG actuel) ce dernier m’a chassé de son bureau raconte Yacoub.
En janvier 2021 avec l’appui des cadres de M’bout, Yacoub a adressé une lettre au président de la République qui est restée sans suite. « Je voulais dit-il rencontrer le président de la République car je voulais lui rendre compte d’informations sensibles dont je disposais concernant le travail de la douane. »
S’agissant de son exclusion du tableau d’avancement, Yacoub a pris un avocat et fait appel de la décision. La justice a tranché en sa faveur mais s’insurge-t-il, le DG refuse d’exécuter la décision de la Cour Suprême.
Au même moment des décisions de justice similaires ont été appliquées par le DG note Yacoub qui donne l’exemple des 4 agents trempés dans l’affaire dite du riz de Ehel Ghadda. Ils furent radiés mais ont été réintégrés après avoir fait appel.
Idem pour un autre agent ayant démissionné de son propre gré. Lui aussi il fit appel et reçut gain de cause.
Mais pour Yacoub qui dénonce une discrimination flagrante à son égard le DG qui promet à chaque fois de régler son problème ne tient pas ses promesses.
Et tout dernièrement les choses ont empiré pour Yacoub suite à la fuite d’une audio dans laquelle Yacoub critique le DG pour son injustice à son égard. L’audio datant de 4 mois était passé dans un groupe fermé de promotionnaires de Yacoub. Mais l’un d’eux a vendu la mèche en partageant l’audio avec le DG.
A la suite de cette affaire Yacoub a été arrêté pendant 12 jours puis il est passé devant le Conseil de discipline qui l’a mis à la retraite anticipée. Mais son dossier fut rejeté par la Fonction Publique pour manque d’arguments.
C’est en effet bizarre voire même inouï de vouloir condamner à la retraite anticipé un agent exemplaire qui a fait 20 ans de service, qui n’a jamais reçu de mise en demeure et qui en plus doit bénéficier d’un avancement cautionné par une décision de justice non exécutée.
Vouloir le débarquer pour une histoire de vocal critiquant le DG ce n’est vraiment pas sérieux et la Fonction Publique a refusé d’avaler le morceau.
Suite à cette tentative de liquidation et de privation de ses droits légitimes, Yacoub porta plainte contre le DG de la douane. La plainte a été déposée chez le Procureur et ce dernier selon l’avocat de Yacoub au lieu d’envoyer le dossier à la police ou la gendarmerie pour enquête l’a confié au DG de la douane.
Quoiqu’il en soit Yacoub est décidé à recouvrer tous ses droits. Son affaire commence à prendre de l’ampleur au sein de l’opinion et notamment chez les cadres et les populations de M’Bout qui sont très remontés contre cette injustice flagrante. Et pour se faire entendre un sit-in de protestation est prévu mercredi prochain à Nouakchott.
A la veille des élections présidentielles cette affaire risque de peser si jamais elle n’est pas réglée sachant que l’électorat de cette zone de Mbout compte beaucoup pour le président de la République Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani .
L’affaire Yacoub Maiga en dit long sur la gravité de certaines pratiques mafieuses et l’injustice qui sévit au sein de l’administration où il y a souvent plus de place pour les éléments véreux et corrompus que pour les honnêtes citoyens mus par l’amour de la patrie et par l’intérêt général.
Bakari Gueye