L’ONG Maurisanté a consacré son briefing mensuel à l’importance de l’hygiène menstruelle. La rencontre qui a eu lieu ce matin au siège de l’ONG à Nouakchott en présence de représentants de la presse coïncide avec la commémoration du 8ème anniversaire de la Journée mondiale de l’hygiène menstruelle (Menstrual Hygiene Day) placée cette année sous le thème: « Action et investissement en faveur de l’hygiène menstruelle et de la santé ».
Le briefing a été animé par Lalla Fall, cheffe du projet.
Dans sa présentation la coordinatrice du projet a fait le tour de la question.
Menstruation ou cycle menstruel
La menstruation est un processus au cours duquel l’utérus évacue du sang et des tissus par le vagin. C’est un processus naturel et sain chez les filles et les femmes en âge de procréer.
Dans les pays occidentaux, le terme « menstruation » n’est plus très utilisé et l’on parle plutôt de « règles ».
Cela dure généralement de 2 à 5 jours, mais cela peut varier d’une personne à l’autre.
Des conséquences néfastes
Pour certains, les règles ne sont qu’un désagrément mineur auquel on pense peu.
En revanche, pour des millions d’autres personnes pourtant, ce cycle tout à fait naturel peut être synonyme de violences, car le début de la menstruation peut mener au mariage d’enfants, à la violence sexuelle et à des violations de l’autonomie corporelle ; de stigmatisation, sous la forme d’un bannissement dans des huttes de menstruation ; d’opportunités manquées, car la douleur, l’inconfort ou l’absence de produits d’hygiène peut conduire à la déscolarisation ; et de perte de dignité, par exemple dans les situations de crise humanitaire et les camps de réfugiées où même l’eau et le savon sont rationnés ou absents.
Le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) estime qu’en Afrique 66% des filles ne disposent pas d’une bonne information sur la menstruation avant d’être confrontées à leurs premières règles, ce qui rend l’expérience négative, et parfois traumatisante.
La même source indique que sur le continent africain, une fille en âge de scolarisation sur dix s’absente régulièrement de l’école pendant ses règles.
Objectif de la journée
L’instauration de la Journée mondiale de l’hygiène menstruelle a pour but de rompre le silence et à diffuser l’information pour permettre à la communauté en générale et à la communauté scolaire en particulier de communiquer et d’échanger sur l’amélioration de la gestion de l’hygiène menstruelle.
Et aussi d’interpeller les décideurs afin d’améliorer les infrastructures sanitaires en milieu scolaire dans le but d’augmenter la fréquentation scolaire des filles, leur participation et leur maintien à l’école, même pendant leurs règles.
Récemment, plusieurs pays ont pris des mesures pour la gratuité ou la détaxe des produits d’hygiène menstruelle, pour lutter contre la précarité menstruelle.
La Nouvelle-Zélande, la France et la Namibie sont les plus récents pays à avoir annoncé de telles initiatives, après que l’Écosse est devenue à l’automne dernier la première à proposer la gratuité des produits d’hygiène menstruelle pour toutes.
Vivre ses règles sans exclusion, sans opportunités manquées, sans peur ni honte, sans humiliation et sans vulnérabilité supplémentaire ne doit pas être sujet à débat.
Vivre dans la dignité est un droit humain fondamental que nous devons préserver.
De nombreux droits universellement reconnus sont mis en péril par la façon dont les femmes et les filles sont traitées durant leurs règles. C’est notamment le cas :
Du droit à la dignité humaine : Lorsque femmes et filles n’ont pas accès à des installations sanitaires sécurisées ni à des moyens sûrs et efficaces de gérer leur hygiène menstruelle, elles ne peuvent pas vivre leurs règles dans la dignité. Les moqueries, l’exclusion et la honte associées aux règles mettent également en péril ce droit à la dignité.
Du droit à un standard correct de santé et de bien-être : Femmes et filles peuvent souffrir de conséquences négatives sur leur santé à cause de l’absence de produits et de structures sanitaires pour gérer leur santé menstruelle.
La stigmatisation des règles peut également les empêcher de demander un traitement contre les douleurs et troubles associés aux règles, ce qui affecte leur santé et leur bien-être.
Du droit à l’éducation : L’absence d’un lieu sécurisé ou de la possibilité de gérer son hygiène menstruelle ainsi que le manque de médicaments pour traiter les douleurs menstruelles peuvent contribuer à un plus grand absentéisme scolaire et donc à de mauvais résultats scolaires.
Plusieurs études ont confirmé que si les filles ne peuvent pas correctement gérer leurs règles à l’école, leurs résultats scolaires en souffrent.
Du droit au travail : L’accès limité à des moyens sécurisés de gérer son hygiène menstruelle et à des médicaments contre les douleurs et les troubles menstruels limitent également les opportunités professionnelles des femmes et des filles.
Elles peuvent renoncer à certains emplois ou bien être contraintes à sacrifier des heures de travail et de salaire. Les besoins liés aux règles, comme les pauses pour aller aux toilettes, sont parfois pénalisés, ce qui entraîne une inégalité dans les conditions de travail. Femmes et filles peuvent également souffrir de discrimination au travail à cause des tabous qui existent autour des règles.
Du droit à la non-discrimination et à l’égalité des genres :La stigmatisation et les normes associées aux règles peuvent renforcer les pratiques discriminatoires.
Les barrières liées aux règles qui s’appliquent à l’école, au travail, dans les services de santé et les activités publiques perpétuent également les inégalités de genre.
De quoi ont besoin les femmes et les filles pendant leurs règles ?
Les questions de santé spécifiques aux corps des filles et des femmes (pas seulement les règles mais aussi la grossesse, l’accouchement, les changements pendant la période post-partum ainsi que la ménopause) ont souvent été ignorés par les décideurs, les responsables politiques, le domaine de l’éducation et même le monde médical.
Les femmes et les filles en savent ainsi souvent très peu sur les changements qu’elles vivront au cours de leur vie. Beaucoup de filles n’apprennent ce que sont les règles que lorsqu’elles atteignent la puberté, ce qui peut être pour elles une expérience à la fois effrayante et perturbante.
Ces dernières années cependant, la gestion de la santé menstruelle (parfois appelée gestion de l’hygiène menstruelle) est devenue un sujet central dans les milieux qui militent en faveur des filles, chez les experts de l’éducation ainsi que chez les spécialistes du développement mondial.
Un consensus large a été atteint sur les besoins des femmes et des adolescentes au cours de leurs règles :
– Elles doivent avoir accès à des produits sains pour absorber ou recueillir le sang menstruel.
– Elles doivent pouvoir changer leurs protections en toute sécurité et en préservant leur intimité, et disposer d’un endroit où jeter les protections usagées ou nettoyer les protections réutilisables.
– Pendant leurs règles, les femmes et les filles doivent aussi pouvoir se laver à l’eau et au savon, en toute sécurité et en préservant leur intimité.
– Elles doivent avoir des connaissances de base sur les cycles menstruels et la façon de vivre leurs règles sans inconfort et sans avoir peur.
– Les femmes et les filles doivent également avoir accès à l’information sanitaire et aux soins de santé si elles souffrent de troubles associés aux règles.
Les protections hygiéniques ne doivent présenter aucun danger, être efficaces et convenir aux femmes et aux filles qui les utilisent.
Ces protections peuvent être : des serviettes hygiéniques jetables ou réutilisables, des tampons jetables, des coupes menstruelles, ou bien des tissus propres et absorbants tels que des chiffons ou des sous-vêtements.
L’UNFPA distribue des protections hygiéniques aux femmes et aux filles vivant en situation de crise humanitaire. Le choix de la protection est généralement déterminé par des besoins culturels et logistiques. Par exemple, dans certaines communautés, les femmes ne sont pas à l’aise avec les protections à insérer, comme les tampons ou les coupes menstruelles.
En cas de climat humide ou pluvieux, les serviettes réutilisables peuvent être difficiles à sécher complètement, ce qui peut créer un risque d’infection. Dans d’autres cas, le manque de systèmes de gestion des déchets peut rendre les protections réutilisables plus pertinentes que les jetables
La journée mondiale de l’hygiène menstruelle, instaurée en 2014, rappelle l’importance de la menstruation chez les adolescentes, encore trop souvent confrontées à l’isolement et à la stigmatisation face à ce phénomène naturel.
Des actions menées au plan local
En Mauritanie, le Collectif des Associations pour le Développement Économique et le Social (CADES) participe aux mesures préventives, en distribuant des serviettes hygiéniques au profit des jeunes filles dans la commune d’Elmina (lycée Elmina 2).
La journée de distribution s’est effectuée le 05/05/2021.
Pour apporter une solution économique et durable, le centre d’activités pour jeunes filles (SAFIA) de Dar Naïm a mis en place un cours de fabrication de serviettes hygiéniques réutilisables en tissu pour rendre l’hygiène menstruelle plus accessible à toutes.
Aujourd’hui, un slogan est à l’ordre du jour : « Ensemble brisons ces tabous qui entravent les droits à la santé, à l’éducation et à l’épanouissement de chaque fille et femme. »
Ainsi, depuis 2014, le 28 mai est décrété Journée mondiale de l’hygiène menstruelle (Menstrual Hygiene Day).
La communauté internationale la commémore chaque année à la date du 28/5. Le choix du jour n’est pas fortuit.
En effet, le 28ème du mois, a été arrêté en pensant à la durée moyenne d’un cycle menstruel. Le mois de mai est le 5ème de l’année, soit le nombre de jours moyen de la durée des règles.
Notons enfin que cette année, l’UNFPA et l’UNICEF, en collaboration avec l’UNESCO dans le cadre d’un partenariat avec le Fonds Français Muskoka, ont organisé le premier colloque régional sur la santé et l’hygiène menstruelle en Afrique centrale et de l’ouest, qui a eu lieu en ligne du 24 au 27 mai.
Compte rendu Bakari Gueye