Malgré la promulgation de nombreuses lois et la mise en œuvre de multiples stratégies réglementant le secteur de l’éducation ; lesquelles ont toujours souligné la nécessité d’accroître le nombre d’infrastructures d’enseignement en construisant des écoles et des établissements de formation et en mettant en place des mécanismes de supervision éducative, au niveau des différents ordres d’enseignement, la réforme du système éducatif en Mauritanie est restée, depuis l’indépendance du pays par rapport au colonialisme français, un défi structurel majeur.
En dépit des efforts déployés par l’État dans le cadre des différentes réformes de l’éducation – de la réforme de 1968 à celle de 1999 – le système éducatif, au niveau de l’enseignement supérieur, a continué de souffrir de déséquilibres profonds et handicapants, qui se résument comme suit :
– La faible capacité d’absorption des
établissements d’enseignement supérieur,
-L’inadéquation entre
le nombre d’étudiants et les ressources disponibles,
– Le faible niveau d’intrants éducatifs,
– La faiblesse des conditions d’études et de vie universitaire,
– L’absence de normes de qualité de la formation et de l’encadrement,
– l’aggravation du chômage des diplômés,
– L’absence de bonne gouvernance et de l’indépendance des institutions universitaires,
– Le manque de transparence dans la gestion,
– L’implantation de l’université hors de son environnement économique et social,
– La faible rentabilité du système de recherche scientifique, notamment en matière d’innovation et d’évaluation.
Pour ces raisons et pour d’autres encore, la réforme du système d’enseignement supérieur et de la recherche scientifique en 2015 a constitué une priorité pour les pouvoirs publics, car c’est une condition nécessaire à la réalisation des réformes économiques et sociales indispensables pour le développement du pays. Cette réforme visait l’atteinte d’objectifs fondamentaux, dont nous mentionnons, sans exhaustivité :
– Assurer une formation universitaire à tous les étudiants mauritaniens et développer leurs compétences,
– Contribuer à l’édification d’une société de la connaissance et au développement des technologies au service de la communauté nationale,
– Améliorer l’emploi des diplômés dans le cadre du partenariat avec l’environnement économique, social et culturel du pays,
– Atteindre le développement de la créativité et de l’initiative dans ses dimensions fondamentales et s’ouvrir aux cultures du monde,
– Assurer une formation à distance, une formation continue et une valorisation des acquis en matière d’expérience,
– Développer la recherche scientifique, sa structuration, son utilisation optimale, et valoriser ses résultats,
– Adapter les offres de formation pour répondre aux besoins de l’environnement économique, social et culturel,
– Parvenir au stade d’appropriation de la technologie, en particulier la technologie numérique, afin de développer les connaissances.
Afin de relever tous ces défis et face à la forte demande de ce domaine, au cours des dernières années, les autorités de tutelle de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique ont rapidement mis en œuvre un ensemble de réformes importantes et prioritaires pour améliorer l’efficacité interne et externe du secteur. Il s’agit notamment de :
– La révision du cadre juridique et institutionnel pour l’adapter à l’esprit de la réforme.
– Le renforcement des structures de suivi et d’évaluation.
– L’action pour relever les défis quantitatifs et la garantie d’une place à l’université et dans les instituts de formation pour chaque bachelier, malgré le nombre important d’étudiants.
– L’atteinte d’un taux de scolarité proche des standards internationaux dans la tranche d’âge (20-24 ans),
– L’instauration de normes de qualité conformes aux normes internationales et le développement d’un partenariat entre les secteurs public et privé,
– La révision des offres de formation et l’élaboration d’une base de données complète sur les offres de formation et dans le domaine du leadership,
– La compensation de la pénurie aiguë dans de nombreuses disciplines en instaurant des recrutements fréquents d’enseignants et d’enseignants-chercheurs,
– La favorisation de l’émergence de formations basées sur l’excellence (par exemple, des classes préparatoires à l’entrée dans les écoles d’ingénieurs),
– La mise en place de mécanismes de promotion de la recherche scientifique et de l’assurance qualité à travers la création de structures spécialisées,
– Le développement des écoles doctorales et l’appui nécessaire à l’amélioration de leurs outputs.
– L’instauration de règles de bonne gouvernance dans la gestion des ressources, dans le contrôle des performances éducatives et dans le domaine du contrôle et de la supervision.
Étant donné que les ressources humaines restent un moyen indispensable à toute réforme, l’amélioration des conditions matérielles des enseignants de l’enseignement supérieur constitue une exigence légitime, à travers une révision complète de la nomenclature juridique des salaires octroyés et du système de retraite actuellement en vigueur. Cette exigence est réalisable à la lumière de l’engagement du Président de la République, M. Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, de soutenir l’enseignement supérieur comme étant l’une de ses priorités, et de la volonté des autorités tutrices de l’enseignement supérieur d’activer le partenariat avec le Syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESUP) et d’entreprendre les consultations nécessaires pour faire avancer tous les dossiers en suspens.
L’essentiel, c’est que pour consolider ces acquis, nous devons tous,
professeurs, étudiants, superviseurs et personnel éducatif, faire preuve de
plus de solidarité et d’interaction positive, en particulier au cours de la
période critique que traverse notre pays, suite à la pandémie du Covid-19 et ce
partant de la consolidation des résultats obtenus, dont on ne peut se passer
dans aucun processus de construction d’un système d’enseignement supérieur qui
réponde aux aspirations de la Mauritanie, de ses habitants et des générations
futures.
Dr. Mohamed Al-Radhi Ould Sadvena
* Professeur à l’université Al Asriyya de Noaukchott