La SNIM, deuxième employeur du pays (6 000 employés) après l’Etat et qui contribue pour 30% du Budget de l’Etat et représente 50% des exportations, a bénéficié d’un boom minier sans équivalent dans l’histoire, depuis sa nationalisation et même avant celle-ci.
*Dr Mohamed Ould Mohamed El Hacen
D’une année à l’autre, le prix de la tonne de minerai à été multiplié par 3, le chiffre d’affaires de la société, toutes choses égales par ailleurs, a triplé. Ce triplement du chiffre d’affaires n’était pas accompagné d’une progression des charges, la production n’ayant pas augmenté et les coûts de production n’ont pas, non plus, eu de raisons de se modifier.
Des bénéfices‘’ fleuves’’ et inattendus ne pouvaient qu’en résulter. Ils proviennent d’une générosité divine via les prix du marché international. Aucune entreprise dans un autre secteur n’a eu à bénéficier, un jour, d’un tel ‘’lancement satellitaire’’.
Malgré cet océan d’argent, l’endettement de la SNIM est passé de 5% du PIB à 11, 5% du PIB.
La SNIM a suivi apparemment les pas de l’Etat. Comment ce paradoxe (un de plus) peut- il être justifié ou expliqué? A priori, pas dans les lois d’une gestion économique et financière rationnelle et orthodoxe des entreprises. L’entreprise, fut-elle publique ou à capitaux majoritairement étatiques, n’est pas l’Etat. Elle doit se confiner aux activités lucratives et relevant de son objet social. Contrairement à l’Etat, elle n’a pas pouvoir de collecter des impôts pour combler ses déficits, pour assurer sa pérennité et préserver ses emplois. Elle peut faire faillite. Que Dieu préserve la SNIM. C’est ce que, manifestement, les pilotes de l’ère azizienne ont consciemment ou inconsciemment ignoré. Le Premier parmi eux, en premier !!!
Bref, Il faudrait auditer et ausculter en profondeur les comptes de cette entreprise pour avoir l’explication de la situation paradoxale, évoquée plus haut.
On sait cependant que la SNIM s’est lancée dans des projets qui ne relèvent pas de son objet social et de son activité normale et classique. Mais je n’ai pas les détails de ces incursions, pour ne pas dire de ces aventures. De plus, elle s’est lancée, depuis 2009, dans un investissement de 350 milliards d’ouguiyas (l’équivalent d’un budget de l’Etat mauritanien, garant, en dernier ressort, de ses dettes).
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Un investissement supplémentaire de 5 milliards de dollars, 5 fois plus important que le précédent avait comme objectif affiché de permettre une production de 40 millions de tonnes pour figurer dans le club des 5 premiers mondiaux. Malheureusement, sa production record n’a pas, à ce jour, dépassé 13,5 millions de tonnes (chiffre de l’année, en 2014).
Le bon sens et les expériences entrepreneuriales et de croissance des entreprises similaires interdisent de croire que de tels bonds puissent être accomplis par une entreprise qui opère sur des marchés internationaux aussi capricieux et dans un environnement bourré de contraintes et de goulots d’étranglement.
Sans être un spécialiste des mines et en espérant me tromper, je sens, ici, plutôt de la communication, de la publicité et un besoin de justification que de ‘’l’objectivement réalisable’’ !
Je ne peux pas croire à une multiplication par 4 de la production d’une entreprise âgée d’un demi-siècle et dont la production a peu évolué au cours des dernières décennies. En revanche, si les recettes prévisionnelles des ventes d’une telle production sont peu probables et aléatoires, les dépenses sont, en général, certaines et les fournisseurs ne refusent jamais les commandes. La SNIM poussée ou obligée par l’Etat et son Chef a manqué de prudence. C’est le moins que l’on puisse dire!
Son avenir ???
La SNIM victime d’un retournement brutal de la conjoncture
Un retournement de conjoncture sur les marchés des matières premières, auquel le minerai de fer n’a pas échappé, a provoqué une division des prix par 4, à partir de 2015, plongeant l’Entreprise dans une crise de liquidité, voire de solvabilité, sans précédent qui menace d’affecter durablement sa structure financière.
Il semblerait que, pour la première fois et pour le présent exercice, elle ne pourra pas verser de contribution au budget de l’Etat.
Les résultats des ‘’investissements – projets’’ dont les coûts officiels s’élèvent à plus de 2000 milliards de nos anciennes ouguiya, décideront de la vie la vie de l’Entreprise et détermineront de quoi son avenir sera fait ou ne sera pas.
Deux leçons à tirer de cette fâcheuse expérience, vécue sous l’ère azizienne
La première leçon : la SNIM n’est pas l’Etat et ne doit pas se substituer à lui, la deuxième leçon: la séparation de l’Etat et de l’Enterprise, qu’elle soit publique ou privée est vitale pour notre pays. En 2009, alors qu’on parlait beaucoup de mauvaise t de bonne gouvernance, sans savoir, d’ailleurs, de quoi on parle, j’ai publié une étude sous forme de lettre ouverte au Chef de l’Etat de cette ère sur la gouvernance des entreprises publiques dans laquelle je préconisai un suivi des projets et entreprises publics. Quelque temps après, ‘’quelque chose’’ a été créée pour le suivi des projets mais pas, à ma connaissance, pour les entreprises et établissements publics.
En un mot, la croissance économique durant la première moitié de la décennie, objet de notre analyse, n’est pas une résultante d’une politique économique délibérée, elle vient du ‘’Ciel ‘’ des produits miniers, mais elle est ‘’tombée sur les têtes’’ des gestionnaires qui ont opté pour des investissements surdimensionnés et coûteux aux effets dévastateurs sur l’économie, tel un tsunami.
Au lieu d’être un moteur de croissance, ces investissements , d’un genre particulier, ont été un facteur de crise et d’instabilité, générateurs d’importations payées en devises, de surendettements excessifs, creuseurs de déficits en cascade et sources des déséquilibres structurels en série.
Ils ont eu, en revanche, des effets bénéfique certains pour les économies de certains pays étrangers fournisseurs de gros matériel et pour leurs représentants et /ou commissionnaires.
Le retournement brutal et inattendu de la conjoncture, intervenu à partir de 2015, a ralenti le taux de la croissance et le rythme des investissements qui n’ont pas crée des revenus supplémentaires pouvant dispenser l’Etat, pour combler le manque à gagner financier, de se retourner contre des populations à pouvoirs d’achats laminés ou stagnants, rendant la pression fiscale intenable.