Agriculture : le CNARADA sort difficilement de l’abîme

Le développement de l’agriculture en Mauritanie est un impératif pour le pays. Avec comme objectif   l’autosuffisance alimentaire, il est  utile et nécessaire que celui-ci se dote d’outils  de recherche pour l’amélioration et la diversification des cultures pour mieux  valoriser et rentabiliser son potentiel agricole .  Dans cette dynamique, le  CNRADA (centre national de recherche agronomique et de développement agricole de Kaédi) apporte un soutien technique pour accompagner les politiques publiques agricoles  à travers ses différentes stations disséminées  en fonction des zones agro écologiques ( Gorgol, Assaba ,Trarza et Nouakchott).

 

Hémorragie et abandon

 

Cette institution de recherche(EPA) créée en 1974 dans un contexte de grande sécheresse, a pour mandat d’assurer, d’organiser, d’exécuter et de diffuser tous les travaux de recherche intéressant l’agriculture et la promotion des productions agricoles en général. Dans son évolution, elle  a contribué à l’émergence de la riziculture en zones irriguée, soutenue à l’époque par l’Organisation de la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS).

Aussi, elle était  à l’origine de l’introduction du matériel végétal de diversification de haut rendement (riz, blé…).Creuset d’espoir pour la relance agricole par la production semencière et d’expérimentation de nouvelles variétés ,la structure a néanmoins connu une période de relâchement, conséquence de plusieurs facteurs. En effet au plan des ressources humaines  avec  le départ  de la quasi-totalité des chercheurs pour certains à la retraite, pour d’autres par l’absence de motivations et d’incitations accentuées par un vide statutaire  qui ne leur offre ni formation ni plan de carrière. A cette situation hémorragique et  d’abandon, la dégradation avancée de l’outil de travail (station, infrastructures), doublée de l’insuffisance des équipements de laboratoire et du matériel agricole, le fonctionnement de la structure a presque subi un cout d’arrêt.

 

Descente vers l’abîme 

 

Ainsi donc, Faute de pouvoir mettre en scelle  des programmes de recherche innovants et porteurs la boite, dans sa descente vers l’abîme  croulait également sous le poids d’un endettement au point de la  désorienter de ses prérogatives régaliennes inscrites dans sa mission. La structure, comme sil elle vivait à la périphérie de son histoire, de son existence évoluait presque  aux antipodes   des performances  attendues dans un contexte ou, plus que jamais son apport est précieux. A ce décor moins reluisant le parc automobile était sur cale  ce qui limitait les mouvements des chercheurs sur les sites d’expérimentation, toutes choses qui fragilisaient l’institution qui s’acheminait inéluctablement vers une fin programmée.

Nouvelle stratégie de redressement

Depuis2011, une nouvelle stratégie de redressement est mise en place. Les efforts sont alors consentis sur les niveaux administratifs, financiers et techniques qui ont permis de réaliser  la réhabilitation (du siège de la structure et celle  des stations de Sylla (Gorgol) de Rosso (Trarza), de Kankossa (Assaba), le laboratoire des plantes/Sol (AIEA) et l’acquisition de matériels d’irrigation. Pour avoir compris l’importance de cet outil développement dans le schéma agricole du pays les tenants de cette nouvelle orientation sont parvenus à régler les  arriérés du personnel qui accusait 11 mois de salaires non payés, après qu’ils aient régularisé les engagements vis-à-vis des institutions sociales (CNSS, CNAM) et fiscales(ITS)).

Avec en ligne de mire  le souci  de restauration de la  crédibilité de l’institution, des  partenariats multiples sont  noués avec des organisations de référence(AfricaRice, AIEA,ICBA,CORAF,ACSAD,ICARD ,FAO ,Mon-3…),dans les domaines de renforcement de capacité  ou  d’expérimentation de nouvelles variétés. Le niveau technique qui constitue un indicateur non négligeable a connu ,dans la production des semences de pré base  une augmentation notoire qui ,au départ était au niveau le plus bas en 2010 pour atteindre 4,9TTonnes en 2016.En même temps ,au niveau  des établissements semenciers, la vente a connu une augmentation significative passant  de 470Kg en 2014 à 4040T en 2017.

Ces ventes portent sur 16 variétés de riz à haut rendement ,homologuées en 2012,  tandis que 17 autres, prometteuses sont en cours d’expérimentation en partenariat avec AfricaRice. Pour avoir inscrit son action dans la diffusion des résultats au niveau de la chaine semencière articulée autour de la sélection, de l’amélioration et de l’homologation des variétés produites par CNARADA,les producteurs ont pu améliorer leurs rendements par la mise à disposition de variétés performantes de céréales, de légumineuses, de cultures fruitières et maraîchères en  adoptant de nouvelles techniques d’irrigation  (goutte à goutte, tuyaux à vannette, système californien).

Approche «recherche et développement»

. Faisant de l’approche « recherche & développement » un axe pédagogique  répondant aux différentes sollicitations, le CNRADA, avec ses nouveaux indicateurs se positionne aujourd’hui mieux qu’avant en faisant prévaloir l’étendue de son, expérience et de son expertise dans l’expérimentation. de nouveaux produits .c’est ainsi que, l’accompagnement du département de l’agriculture a permis l’insertion des diplômés chômeurs dans la plaine de Mpourrié, le suivi du programme blé en plus du programme des semences traditionnelles et celui du programme de développement des cultures fourragères dans la zone de NbeikitLahwach inauguré par le Président de la République en Mai 2016.Aujourd’hui, cette activité fourragère s’érige en un projet ambitieux de production fourragère  dans la zone de Dhar (Hodhechargui)pour accompagner l’usine de lait mis en place à Néma.Toutes choses qui montrent bien que les efforts déployés ont quand même servi à la visibilité de l’institution en l’espace de 5 ans.

Contraintes et perspectives

 Même si la satisfaction des producteurs est en cohérence avec la cadence des résultats obtenus par les chercheurs, il n’en demeure pas moins que l’institution reste confrontée en ce début du nouvel an, à plusieurs contraintes qui le tiennent comme boulets aux pieds.Car, au niveau des  ressources humaines -chercheurs et assimilés, en plus du déficit remarquable, ils ne bénéficient, du moins pour ceux qui en restent , d’aucun statut. Aussi, la dispersion géographique des zones d’intervention  et la pluralité des programmes d’activités de recherche et développement ne sont pas de nature à maximiser les rendements attendus. Le manque d’équipements et de matériels agricoles constitue également des facteurs limitants non négligeables  sur lesquels   vient se greffer   la faible articulation entre le CNRADA et les autres institutions du Ministère de l’Agriculture.

Dans la continuité des efforts déjà entrepris pour un fonctionnement optimal des différents services ,aussi bien  pour le conseil d’administration que la Direction du CNRADA en charge de l’orientation et de la mise en œuvre des directives , il est important d’approfondir l’approche participative déjà initiée pour aboutir à la mise en place des pôles de développement impliquant tous les acteurs de la chaine de valeur sans toutefois occulter le renforcement des ressources humaines qui souffrent ,de nos jours de l’absence de plan de carrière et de motivations supplémentaires.

B. Diagana

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