A l’occasion de la 4ème Assemblée Générale du Réseau Syndical Migration ouverte jeudi 15 février 2018 à Nouakchott Méditerranéennes/Subsahariennes (RSMMS), M.Isselmou M. Salihi, Journaliste et expert-consultant a présenté une communication sur la migration interrégionale en Afrique de l’Ouest. Dans sa communication dont nous proposons ici une synthèse, il aborde notamment les enjeux et la stratégie de la migration pour la Mauritanie.
Pays d’accueil, de transit, et de départ, la Mauritanie a élaboré en 2010 une stratégie nationale de gestion de la migration.
Cette stratégie résulte d’un processus participatif impliquant les principaux ministères concernés, les partenaires au développement et les organisations de la société civile.
Conduite par le Gouvernement, elle est structurée autour de quatre axes principaux que sont le cadre de gestion et mesure de la migration, la thématique migration et développement, la promotion des droits fondamentaux des rapatriés, migrants, réfugiés et demandeurs d’asile et la maîtrise des flux migratoires.
Grâce à cette stratégie sur la migration, les autorités se sont dotées d’une vision globale des phénomènes migratoires par un dialogue constant entre tous les acteurs via la commission nationale de gestion de la migration, d’une part et se sont procuré d’outils d’aide à la décision pour conduire leur politique migratoire, d’autre part.
La stratégie a permis également de contribuer à une prise en compte positive de la migration pour le développement du pays, de protéger les migrants et réfugiés conformément aux engagements du pays et de contrôler les entrées et sorties du territoire dans le respect des accords bilatéraux et multilatéraux signés.
Tendances de la migration des Mauritaniens vers l’extérieur
La migration des mauritaniens s’est d’abord faite vers les pays africains proches (Sénégal, Côte d’Ivoire, Congo), puis vers l’Europe. Si cette migration peut être considérée comme relativement ancienne comportant des circuits classiques vers des destinations en Afrique, en Europe et dans certains pays arabes, elle a connu de nouvelles tendances sous l’effet des changements économiques et sociaux.
Outre un élargissement du spectre des destinations des émigrés mauritaniens observé ces dernières années, il faut ajouter une tendance plus forte à migrer chez les jeunes à la recherche d’emplois et privilégiant d’autres destinations (Émirats Arabes Unis, Espagne, Angola, États-Unis, etc.) avec une moindre attirance des destinations habituelles.
Les diasporas mauritaniennes les plus significatives demeurent implantées en Afrique subsaharienne, dans les pays du Golfe arabique, en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. Les pays abritant une diaspora mauritanienne importante en termes d’effectif sont : le Mali, l’Arabie Saoudite, la France, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et la Gambie. En termes de grandes zones, ce sont les pays africains de l’Ouest et du Centre qui accueillent un peu moins de 60 % des migrants mauritaniens.
Selon les résultats d’une étude menée en 2009 par le Groupe de Recherches et de Réalisations pour le Développement Rural (GRDR) portant sur la migration d’origine du Guidimagha, région réputée pour être un foyer d’une migration internationale relativement organisée, le taux de migrants est évalué à environ 20 % de la population totale de la région, soit 56 900 migrants en 2009. Les pays européens constituent la destination principale avec 72 % alors que les 28 % restants se dirigent vers des pays africains (20 %), des pays arabes (4 %), les pays asiatiques (2 %) et l’Amérique (2 %). Les migrants mauritaniens sont constitués en association dans chaque pays.
Selon l’étude réalisée pour le compte de l’organisation internationale pour la migration en 2008, le nombre d’émigrés mauritaniens est estimé à 105 315 personnes, installées en Afrique de l’Ouest (65,6 %), en Afrique Centrale (2,4 %), en Europe (20,6 %), dans les pays arabes (0,3 %), en Amérique du Nord (2,5 %) et dans d’autres pays (8,6 %). Selon la même source 17 623 migrants nés en Mauritanie et enregistrés dans les principaux pays européens de destination dont la France (8 237 personnes en 1999) et l’Espagne (8 410 personnes en 2006).
L’émigration des mauritaniens, est due à plusieurs facteurs liés, d’une part, à des liens culturels et religieux avec les pays voisins ainsi que les pays arabes et, d’autre part, des facteurs liés aux marchés du travail en Mauritanie et dans les pays destinataires.
Données sur les migrants en Mauritanie
Le nombre de travailleurs migrants enrôlés en 2015 en Mauritanie est de 114. 425 provenant essentiellement des pays de l’Afrique de l’Ouest.
La source principale de données est le recensement général de la population et de l’habitat. D’après ce recensement de 2013, la population résidente étrangère représente 88 661 personnes, soit 2,5 % de la population totale. Cet effectif était dominé par les hommes qui représentent à peu près 54,6 % contre 45,4 % de femmes. Le volume global des migrants était 34 481 personnes en 2000, selon le recensement de la population et de l’habitat de 2000.
L’ampleur de la migration est aujourd’hui mesurable grâce à l’existence de points de passage le long des frontières avec les pays limitrophes, mais aussi grâce au système d’identification des résidents étrangers soumis désormais à des contrôles, mais aussi grâce à l’enquête sur la main d’oeuvre étrangère (EMOE) de 2007. Ces données révèlent ainsi que les étrangers dans les villes de Nouakchott, Nouadhibou et Rosso, sont essentiellement africains (89 %), les arabes représentant environ 6 % et les européens 5 %. Les sénégalais constituent, à ce titre, la plus forte colonie étrangère avec 10 276 ressortissants (42 %), suivis des maliens au nombre de 5 000, soit 20 %, puis les deux guinées, avec 4 900 ressortissants, la Gambie avec 1 128 ressortissants, la France, environ 800 ressortissants. Les sénégalais sont majoritaires à Nouakchott (43 % des étrangers) et à Rosso (59 %), tandis que les maliens sont majoritaires à Nouadhibou (42 %), suivis par les guinéens (29 %). Ces statistiques, tirées de l’EMOE de 2007, démontrent que par rapport à 2010, le nombre de guinéens et de gambiens a augmenté de 150 % entre 2000 et 2007, le nombre de maliens a augmenté de 96 %, le nombre de sénégalais de 57 % et le nombre d’arabes de 31 %. Ainsi, la ville de Nouakchott absorberait 90 % des étrangers résidant en Mauritanie, selon le dossier de presse remis lors de la conférence de presse organisée au lancement des activités de sensibilisation sur la migration illégale. Elle est suivie par Nouadhibou avec 7 % et Rosso avec 2 %. En termes de flux, le ministère de l’intérieur a déclaré 5 295 migrants irréguliers en 2008, soit une baisse par rapport à 2007 et 2006, selon les sources.
Isselmou Ould M. Salihi
Communication sur les enjeux de la migration en Mauritanie
(4e Assemblée Générale du Réseau Syndical Migrations Méditerranéennes Subsahariennes)