La célébration de la Journée internationale de la langue Soninké, décrétée par l’UNESCO et fixée au 25 septembre, est un moment de fierté pour une communauté dont l’histoire et la culture millénaires sont reconnues au-delà des frontières. Mais cette reconnaissance doit être un déclencheur de transformation et non un simple instant de folklore.
Les festivités tenues dans les pays Soninké (Mali, Mauritanie, Sénégal, Guinée, Gambie, etc.) comme dans la diaspora (France, États-Unis, Canada) témoignent d’une volonté de faire vivre et rayonner la langue et les valeurs Soninké. Toutefois, la mondialisation impose de repenser notre rapport à la culture et à l’avenir.
Depuis bientôt deux décennies, les Soninké se réunissent autour du Festival International Soninké (FISO). Cet espace de rencontres et de réjouissances culturelles est louable. Mais il est temps d’opérer un virage stratégique : réorienter une partie des ressources mobilisées (billets d’avion, hébergements, festivités) vers la création de structures durables.
Nous devons aujourd’hui :
- Doter chaque capitale d’un siège fonctionnel d’associations culturelles Soninké ;
- Créer des centres de documentation et de recherche linguistique ;
- Mettre en place des fonds communautaires pour soutenir les chercheurs, les projets éducatifs, et les initiatives locales.
Les états, l’Unesco et diverses institutions culturelles de par le monde peuvent accompagner à atteindre ces objectifs.
La diaspora et les élites Soninké doivent jouer un rôle moteur. Les moyens existent. Ce qui manque, c’est une volonté collective d’agir autrement. Trop souvent, nous investissons dans l’instantané et le visible, au détriment de l’essentiel et du durable.
Le prochain FISO devrait marquer un tournant historique : faire de cette rencontre un lieu de décision, de planification et de lancement de projets concrets. Car célébrer une langue n’a de sens que si elle est transmise, documentée, enseignée et utilisée dans la vie quotidienne, les médias, les institutions.
La culture Soninké est une richesse. Mais pour qu’elle survive aux mutations du monde moderne, elle doit s’organiser, s’institutionnaliser et se projeter. Autrement, nous continuerons à danser pendant que notre patrimoine s’efface.
Le temps n’est plus à la simple célébration, mais à la construction. C’est à cette condition que le Soninké restera vivant, influent et porteur de valeurs dans le concert des langues du monde.
Bakary Seta