Le débat sur Lagouira est un faux problème et ne mérite pas tout un tapage. À l’origine un comptoir espagnol, puis une bourgade commerciale qui n’existe plus aujourd’hui, il s’agit d’une minuscule bande de terre qui sert de façade atlantique à Nouadhibou. La Mauritanie a gardé son contrôle depuis 1975, essentiellement pour sécuriser le port minéralier de Nouadhibou, en attendant une solution au problème du Sahara. Cette langue de terre ne présente aucun enjeu géostratégique pour les protagonistes du conflit.
Chaque fois que la Mauritanie cherche à renforcer ses relations, notamment militaires, avec l’Algérie, les Marocains sortent la revendication de Lagouira, même si au fond, ils ne veulent pas aller plus loin, en prenant le risque d’ouvrir un conflit avec notre pays, simplement à cause d’un petit lopin de terre, sans grand intérêt économique ou territorial. Les 25% du territoire du Sahara encore sous contrôle du Polisario sont bien plus importants pour les Marocains que Lagouira.
En définitive, nous ne devons pas réagir à ces provocations, sauf si elles émanent d’officiels marocains. Tant que ce ne sont que des journalistes ou des activistes qui s’agitent, nous devons faire la sourde oreille, même s’il est établi que la main du Makhzen n’est jamais très loin. En effet, le Makhzen a inventé un hypernationalisme pour légitimer ses ambitions sur le Sahara occidental, mais ce nationalisme porté par de nombreux militants et journalistes semble devenir autonome, échappant désormais à l’Etat marocain.
Soyons clair, la Mauritanie n’a jamais reconnu la souveraineté marocaine sur l’entièreté du Sahara, mais seulement sur sa partie nord (saqiya elhamra). Par la suite, à partir de 1978, elle a renoncé à sa propre souveraineté sur la partie sud (Ouad dhahab) qu’elle a cédé au front Polisario, avant que celle-ci ne soit occupée par le Maroc, à l’exception de l’enclave de Lagouira, restée sous contrôle mauritanien.
Par ailleurs, il convient d’ajouter que le Maroc avait formellement reconnu la souveraineté mauritanienne sur Rio de Oro, y compris Lagouira, au terme des accords de Madrid, signés en 1975. Dans ces conditions, cette enclave doit être regardée comme un territoire disputé, placé temporairement sous contrôle mauritanien, en attendant la fin du conflit.
Mohamed El Mounir