Connu pour la richesse et la diversité de son cheptel, le Hodh Charghi passe également pour être la première région agricole de Mauritanie selon Aboubekrine Med BEIDIYE, Délégué Régional du Ministère de l’Agriculture dans la Wilaya.
Ainsi en plus de ses 300 barrages, la culture sous pluie couvre une superficie de 70.000 ha soit 40% du potentiel national des superficies du diéri au niveau national. Pour la culture oasienne ce potentiel représente 10 à 15% du potentiel national.
En 2023, la culture sous pluie a concerné 2 types à savoir le mil et le petit mil. Pour le Sorgho la superficie cultivée cette année est de 52.300 ha. Pour le mil, 28.000 ha, ce qui fait un total de 80.000 ha, un record qui dépasse le chiffre habituel, ce qui dénote d’un nouvel engouement pour l’agriculture au niveau de la Wilaya.
Pour 2023, la production est estimée à 22.280 T de Sorgho. Pour le mil, on table sur une production de 8904 T.
Pour la production concernant les cultures de décrue on estime à 7.030 T la production de Sorgho et 5.190 pour le niébé (Haricot).
Pour les cultures maraîchères, la production pour 2023 est estimée à 2080 T, toutes spéculations confondues.
Notons que les prix des produits agricoles ont enregistré cette année une baisse notable au niveau de la Wilaya. Ainsi, le prix du kg de Sorgho est passé de 900 ouguiyas à 120 après les premières récoltes.
Au niveau de la Wilaya, 60 à 70% des besoins locaux en céréales sont satisfaits en cas de bonne année pluviométrique.
Comme on le voit donc, dans cette région frontalière, les perspectives agricoles sont prometteuses et seule l’agriculture peut fixer les populations en leur permettant de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur bétail. C’est dans ce sens que la Table Ronde organisée en 2022 avec les investisseurs fut axée sur le Développement Local et les 40 milliards d’ouguiyas mobilisées ont été orientées vers l’agriculture et l’élevage, les deux piliers de l’économie de la région.
Présentation de la Wilaya et de son agriculture
La wilaya du Hodh Charghi couvre une superficie de 182700 km² et compte une population de 430.668 habitants selon les dernières projections, vivant essentiellement de l’agriculture, de l’élevage, de l’exploitation forestière et de plusieurs autres activités commerciales.
La wilaya dispose de vastes terres arables qui permettent à plusieurs ménages agriculteurs de mettre en exploitation 70 000 ha en moyenne de diéri ce qui représentent un peu plus de 40% des superficies mises en culture sur le plan national en cette typologie de culture.
La wilaya dispose d’environ 300 barrages et digues, exploités en bas-fonds et constituant un potentiel agricole important estimé à 14000 ha faisant vivre des milliers de personnes. Les productions agricoles ravitaillent les marchés de la wilaya en produits agricoles durant plusieurs mois de l’année.
Les diguettes sont nombreuses (des centaines) et leur nombre n’est pas connu avec exactitude, puisqu’elles n’ont jamais été recensées.
La Wilaya dispose aussi d’un nombre important de zones de retenue d’eau naturelles dont la superficie est estimée 22000 ha et qui contribuent dans les exploitations agricoles, l’abreuvement des animaux, le renforcement des nappes phréatiques, la régénération d’une biomasse importante et permettent aux populations rurales de subvenir à d’autres besoins domestiques et socio-économiques.
La wilaya dispose d’un important potentiel oasien estimé à environ 9 à 10% du potentiel national.
Enfin l’existence du périmètre fourrager de Nbeiket lahwach, avec une superficie de 120 ha dont 40 ha sont actuellement emblavés, en plus de la mise en place de sept autres sites fourragers d’une superficie de 12 ha, fait de la wilaya la première zone d’expérimentation et de production de ce type cultural.
Enfin la wilaya dispose d’un important potentiel irrigué maraicher dont entre autres le grand périmètre maraicher d’environ de 32 ha de Nbeiket lahwach. Ce potentiel peut être extensible avec l’exploitation des superficies mobilisables au niveau des zones humides et d’autres zones de disponibilité des eaux souterraines.
L’introduction des légumes est relativement récente au Hodh Charghi et le maraîchage est en train de se développer dans la perspective de combler la demande croissante en légumes des marchés urbains. Cette année une superficie de 139 ha a été emblavée contre 125 ha l’année dernière et les produits maraichers sont disponibles sans rupture dans tous les marchés de la wilaya et avec des prix abordables, malgré quelques difficultés qui entravent encore le développement de cette typologie à savoir :
- Le manque ou l’insuffisance de protection des périmètres contre les ennemis des cultures et la divagation des animaux,
- L’insuffisance des intrants et matériel horticole et le matériel pour le travail du sol
- L’insuffisance d’aménagement, d’équipement de superficie agricole ainsi que la mobilisation de la ressource en eau
- L’insuffisance de l’encadrement de proximité.
Services relevant de l’Agriculture
Les différents services relevant du Ministère de l’Agriculture, travaillant dans la Wilaya du Hodh Charghi sont, outre les services de la Délégation (Délégation et Inspections départementales) :
- Le projet d’Appui Régional à l’Initiative pour l’Irrigation au Sahel (PARIIS MR),
- Projet de Développement de la Résilience à l’Insécurité Alimentaire au Sahel en Mauritanie(PDRIANSM), en fin de phase
- Projet PDDO
- PRODEFI
- PDCF : Projet de Développement des Cultures Fourragères
- PROGRES
Pour le délégué régional de l’agriculture, il y’a lieu de mettre en place une bonne coordination et surtout une synergie entre tous ces projets et la Délégation en vue d’assurer une meilleure programmation et un bon suivi et exécution des activités au niveau régional.
Contraintes générales
Selon le responsable régional du département de l’agriculture, les principales contraintes pour le développement de l’agriculture au Hodh Charghi sont en général liées :
Pour l’Agriculture :
- Insuffisance des appuis du Ministère à la wilaya ;
- Mauvaise coordination et préparation des campagnes agricoles ;
- A l’insuffisance de maîtrise et de valorisation des eaux de surface ;
- Insuffisance de protection des zones de culture ;
- A l’inexistence du matériel agricole et de mécanisation ; Les travaux agricoles sont le plus souvent manuels ;
- Les aspects fonciers et litigieux ;
- A l’insuffisance de l’organisation et de l’encadrement rapproché des producteurs ;
- Difficulté d’approvisionnement en intrants de bonne qualité ;
- A la résistance à la diversification ;
- A la prolifération des ennemis des cultures (sauteriaux, oiseaux granivores, autres ennemis de cultures ;
- La faiblesse des capacités de stockage, en l’absence de technique de conservation ;
- Problèmes et difficultés de coordination des activités des différents intervenants au niveau régional et notamment et essentiellement de certains projets du Ministère de l’Agriculture ;
- Réorientation de certains appuis agricoles (barrages…) aux activités pastorales et d’abreuvement du bétail ;
- Gratuité des appuis et manque de participation des bénéficiaires aux réalisations, à leur entretien et pérennisation ;
- Insuffisance de connaissances et de communication avec les producteurs.
Pour la délégation:
- Insuffisance des moyens de mobilité (face à une wilaya très vaste et difficile d’accès) ;
- Déficit en personnel technique et d’appui de la Délégation (AVB, planton, gardien, chauffeur, secrétaire, etc.) ;
- Déficit en personnel cadre (chefs service, inspecteurs départementaux) ;
- Manque de base de données et un inventaire exhaustif des superficies aménagées surtout au niveau des barrages et zones humides (lacs et mares) ;
- Manque et/ou insuffisance d’équipements informatiques et de bureau au niveau des inspections et de la Délégation ;
- Manque de formation et de perfectionnement du personnel de la Délégation ;
- Manque ou inexistence de magasins de stockage de matériel, d’intrants et de produits phytosanitaires construits selon les normes ;
- Insuffisance et/ou manque de bureaux au niveau de la Délégation en mesure de loger tous le personnel central et leur inexistence au niveau départemental ;
- Etc.
Recommandations
D’après ce qui précède les recommandations d’ordre général suivantes s’imposent selon le délégué régional :
- En vue d’assurer une bonne préparation des campagnes agricoles et une meilleure planification et coordination des activités, il sera utile et nécessaire d’organiser à la veille de chaque campagne, une réunion de concertation, d’échange et de programmation à laquelle seront présentes toutes les parties prenantes (Directions centrales, Délégations Régionales et projets).
L’objet de cette rencontre est d’assurer une bonne synergie et harmonie entre les différentes structures concernées à travers des discussions franches, directes et concertées qui permettront la réalisation d’actions concrètes et l’obtention de résultats escomptés.
- Mise en place d’une bonne coordination des activités au niveau régional entre la Délégation et tous les intervenants et surtout les structures du Ministère,
- S’orienter vers la réalisation d’activités significatives (périmètres maraichers villageois ou collectifs de plusieurs ha) et ce dans les zones qui s’y apprêtent
- Mécanisation des outils et opérations culturales en vue d’améliorer la productivité et la production des différents champs et types culturaux,
- Concentrer de grands efforts aux activités d’aménagement rural à travers une bonne identification et bon choix des sites et une maîtrise, gestion et valorisation des eaux de surface, ainsi que la protection des zones de culture,
- Disponibiliser les outils de travail (équipements informatiques et de bureau ainsi que les moyens de mobilité suffisants) pour la réalisation des activités dans les conditions adéquates.
- Appuyer, équiper, perfectionner et renforcer le dispositif et le personnel technique en charge du suivi de l’exécution des activités.
- Equiper et doter la Délégation de moyens humains et matériels (mobilité et Equipment informatiques et de bureau) nécessaires pour lui permettre de jouer son rôle
- Réaliser un vrai service de proximité au niveau des zones de production à travers des missions de sensibilisation, d’explication et de suivi des activités.
- Assurer une diversification culturale à travers l’introduction de la culture de blé, de l’orge, de l’arachide et le développement des cultures fourragères et autres typologies.
- Disponibiliser les appuis nécessaires et suffisants en quantité et qualité pour le développement de l’agriculture et l’atteinte des objectifs,
- Participation des bénéficiaires aux réalisations et élaboration d’un cahier des charges pour l’exploitation des ouvrages,
- Disponibiliser des semences de bonne qualité à travers la possibilité d’achat auprès des producteurs locaux du surplus de leur production. Cette opération aura plusieurs avantages :
- Gain monétaire pour les agriculteurs et leur encouragement ;
- Faible coût de revient des semences et leur disponibilité à temps et à proximité des paysans ;
- Acquisition de semences locales de bonne qualité et bien adaptées au contexte régional au lieu de semences importées qui pourraient comporter des impuretés nuisibles pour les cultures.
Notons enfin que les résultats de la campagne agricole en cours s’annoncent plutôt bons comme le montrent les tableaux suivants :
Données statistiques sur les résultats obtenus et attendus de la Campagne agricole 2022-2023 au niveau de la Wilaya du Hodh Charghi | |||||||
Typologie culture | Moughataa | Superficie sorgho Ha | Superficie mil Ha | Rendement Sorgho T/ha | Rendement mil T/ha | Production sorgho T | Production mil T |
Dieri | Néma | 13600 | 2100 | 0,5 | 0,3 | 6800 | 630 |
Bassiknou | 3500 | 8800 | 0,4 | 0,33 | 1400 | 2904 | |
Amourj | 8500 | 5000 | 0,4 | 0,3 | 4200 | 1500 | |
Adel Bagrou | 11200 | 3700 | 0,4 | 0,3 | 4480 | 1110 | |
Timbedra | 7200 | 4100 | 0,4 | 0,3 | 2880 | 1230 | |
Djigueni | 8300 | 5100 | 0,4 | 0,3 | 2520 | 1530 | |
Total | 52300 | 28800 | 22280 | 8904 | |||
Typologie culture | Moughataa | Superficie sorgho Ha | Superficie Niébé Ha | Rendement Sorgho T/ha | Rendement Niébé T/ha | Production sorgho T | Production Niébé T |
Bas-Fonds | Néma | 5100 | 1200 | 0,6 | 0,4 | 3600 | 480 |
Bassiknou | 1100 | 400 | 0,6 | 0,4 | 660 | 160 | |
Amourj | 2200 | 900 | 0,6 | 0,4 | 720 | 3600 | |
Adel Bagrou | 6200 | 1500 | 0,6 | 0,4 | 370 | 600 | |
Timbedra | 800 | 300 | 0,6 | 0,4 | 480 | 90 | |
Djigueni | 700 | 250 | 0,6 | 0,4 | 420 | 100 | |
Oualata | 1300 | 400 | 0,6 | 0,4 | 780 | 160 | |
Total | 17400 | 4950 | 7030 | 5190 | |||
Typologie culture | Moughataa | Superficie potentiel en Ha | Superficie ttes spéculations Ha | Rendement moyen T/ha | Estimation production T | Quantité à vendre | Prix moyen T en MRU |
Maraichage | Néma | 72 | 65 | 16 | 1040 | 750 | 20000 |
Bassiknou | 15,2 | 12,8 | 13 | 166,4 | 120 | 25000 | |
Amourj | 27,5 | 18,5 | 14 | 259 | 200 | 25000 | |
Adel Bagrou | 17 | 7 | 14 | 98 | 90 | 30000 | |
Timbedra | 20 | 14,1 | 15 | 211,5 | 200 | 20000 | |
Djigueni | 16,4 | 11,4 | 15 | 171 | 150 | 25000 | |
Oualata | 6 | 2,5 | 12 | 30 | 25 | 25000 | |
Nbeika | 17 | 7,5 | 14 | 105 | 90 | 20000 | |
Total | 191,1 | 138,8 | 2080,9 | 1625 | |||
Typologie culture | Moughataa | Nombre d’oasis | Superficie des oasis Ha | Nombre de palmiers | Palmiers productifs | Rendement moyen /palmier | Estimation de la produc T |
Phoeniciculture | Néma | 13 | 347 | 37410 | 26499 | 25 | 669 |
Timbedra | 4 | 49,2 | 6382 | 2015 | 20 | 40 | |
Djigueni | 2 | 27 | 5217 | 2942 | 20 | 58 | |
Amourj | 2 | 12,5 | 2024 | 1417 | 20 | 28 | |
Total | 21 | 435,7 | 51033 | 32873 | 795 |
Par Bakari Gueye
Source : Mensuel HORIZONS N°033/Avril 2023