Lancement officiel de la semaine de la langue française et de la francophonie

Les activités de la semaine de la langue française et de la francophonie ont été lancées ce matin à l’occasion d’une cérémonie officielle organisée dans les locaux du lycée Monafrique de Nouakchott.

La cérémonie a eu lieu en présence des dirigeants de l’Association Mauritanienne de la francophonie (AMF), de l’ambassadeur de France en Mauritanie, de représentants d’associations francophones, de personnalités du monde francophone et d’un nombreux public.

La semaine de la langue française et de la francophonie qui se déroulera du 18 au 26 mars 2023 est placée cette année sous le thème : « Une semaine à tous les temps». Conférences, expositions, théâtre, jeux, concours, ateliers d’écritures et plein d’autres activités récréatives seront au menu de cette semaine.
Cette cérémonie qui a été émaillé par les prestations des élèves de l’école Monafrique a été marquée par les hommages appuyés des différents intervenants à feu Ahmed Ould Hamza, président de l’AMF qui s’est investit sa vie durant au service de la promotion du français et de francophonie en Mauritanie.

Idoumou Ould Mohamed Lemine, vice-président de l’Association mauritanienne pour la francophonie a prononcé aujourd’hui le discours qui suit dans lequel il met en exergue l’œuvre du président feu Ahmed Hamza.

 Mesdames, Messieurs,

En prenant la parole à la place de feu Ahmed Ould Hamzaà cette cérémonie qui lui était si chère qu’il en suivait lui-même l’organisation dans ses moindres détails, j’ai une pensée très émue pour le Président fondateur de l’Association Mauritanienne pour la Francophonie, dont la silhouette magistrale, la courtoisie sans égale et la jovialité cordiale manquent douloureusement à l’Association Mauritanienne pour la Francophonie et à la présente manifestation.

Ahmed Hamza était un homme juste et véridique ; un homme de bien, d’où le consensus qui se faisait autour de sa personne et dont ses funérailles ont donné la preuve ; un homme très attaché à la souveraineté de la Mauritanie, à l’unité de son peuple et à sa diversité culturelle qu’il défendait avec la conviction du patriote habité par la nation pétri de ses valeurs.

Passionné de culture et amoureux des langues, il était polyglotte lui-même et investissait généreusement dans le soutien des acteurs culturels etle sponsoring des manifestations que ceux-ci organisent.

Pour mes camarades de l’AMF et moi, il était un grand frère attentionné et prévenant, un ami fidèle et un dirigeant clairvoyant, décisif et responsable.

Comprenez donc qu’il nous soit difficile d’être aujourd’hui dans l’ambiance festive qui marque d’habitude cette cérémonie et que le présent mot, qui aurait été celui d’Ahmed Ould Hamza, s’il était encore parmi nous, commence par ce bref éloge.

Comprenez également que je vous prie de bien vouloir vous lever pour observer une minute de silence et lire la Fatiha pour le repos de l’âme du disparu, qu’Allah l’accueille en son Saint  paradis.

Excellence Monsieur l’Ambassadeur,

Monsieur le Représentant de la CNECS,

Madame la Présidente fondatrice de l’École Mon Afrique,

Monsieur le Proviseur,

Honorables invités

Mesdames et messieurs,

Bien que profondément secouée par la disparition soudaine de son Président, qui l’a créée en 2011, grâce à son entregent et à son vaste réseau de relations, l’Association Mauritanienne pour la Francophonie a décidé de poursuivre les démarches commencées par le défunt en vue d’organiser la fête des francophones dans notre pays.

Ainsi, dès la fin des journées de deuil, nous avons mobilisé l’ensemble des acteurs et entamé la coordination des préparatifs de l’événement que nous ouvrons aujourd’hui, afin qu’au Paradis, où je prie Allah qu’il soit actuellement, notre cher Ahmed soit satisfait de la réalisation du projet qu’il avait entrepris.En prenant la parole à cette cérémonie d’ouverture de la SLFF, dans ce beau cadre de l’Ecole Mon Afrique, comme l’année dernière aux Sablettes, notre Association peut se féliciter d’avoir accompli cette mission.

C’est l’occasion pour moi d’exprimer, au nom de l’AMF,mes sincères remerciements et ma profonde gratitude à tous ceux et celles parmi vous qui ont répondu à notre appel pour que ce rendez-vous annuel des Francophones en Mauritanie soit aussi réussi que les années précédentes.

Mes remerciements vont particulièrement à la CNECS pour son accompagnement, au Scac de l’Ambassade de France pour son appui à l’Association et à l’Ecole Mon Afrique pour s’être portée volontaire, non seulement pour nous accueillir aujourd’hui, mais également pour avoir proposé un programme dont je vous laisse découvrir la beauté, la pertinence par rapport au thème retenu et surtout la belle et angélique innocence

Je remercie aussi Mme Rachida Mahmoudi, attachée de coopération au SCAC pour l’aide précieuse qu’elle a apportée à la tenue de cette fête, ainsi que Mme la Coordinatrice, Houleye Kane et M. Rodrigue Oucif, qui travaillent sans relâche depuis décembre dernier. Je les félicite vivement tous les deux pour le résultat obtenu.

Mesdames, Messieurs,

L’action de l’AMF a toujours été soutenue par la conviction de son Président, de son Bureau et de ses membres que la diversité culturelle et linguistique de la Mauritanie est un trésor inestimable, qu’elle peut être une chance pour la consolidation de l’unité nationale et que sa valorisation est la voie appropriée pour l’accession de notre pays au progrès et à la modernité.

Notre Association, considère que la Francophonie c’est d’abord la somme des cultures des pays membres de l’OIF et que le Français c’est d’abord le véhicule de la diversité culturelle et civilisationelle de ses locuteurs dans le monde entier.

Forts de cette conviction, nous avons toujours combattu l’esprit tordu selon lequel la question linguistique se pose en termes de concurrence entre les langues et milité pour la complémentarité, la fraternité et le partage de celles-ci. Nous avons toujours réitéré que, pour nous, le Français n’est pas l’adversaire ou le concurrent de l’arabe, langue officielle du pays, ni d’aucune des autres langues nationales, mais bien une langue de plus pour tous les Mauritaniens ; une langue venue d’ailleurs certes et dans les circonstances que nous savons, mais une langue que nous avons adoptée et aimée ; une langue qui nous appartient maintenant et dans laquelle nous exprimons notre identité.

Cette conviction restera indéfiniment la nôtre et ira en se renforçant.

Bonne fête de la Langue Française et de la Francophonie 2023.

Je vous remercie.

La lente agonie du français en Mauritanie

La langue de Molière, le français, n’a pas le vent en poupe en Mauritanie. Dans ce pays qui a donné du fil à retordre aux colons, la langue française est l’objet de toutes les récriminations, aussi bien de la part de l’élite que d’une population savamment montée contre elle.

Ce rejet trouve ses racines dans la lointaine histoire coloniale, avec l’imposition de cette langue dans un pays profondément musulman et peuplé d’habitants d’origines diverses. Du côté de la composante noire-africaine de la population, on s’accommode de la présence de cette langue. En revanche, pour les arabo-berbères, on continue de résister au français, perçue comme une manifestation intolérable de l’impérialisme linguistique.

Pour cette dernière frange de la population, qui soit dit en passant compte beaucoup de francophones, seule la langue arabe devrait être citée, car c’est la langue par excellence du Coran et de l’Islam. Ce positionnement de la population face au français ne lui rend guère service et constitue l’une des manifestations les plus éloquentes de la fracture communautaire dans ce pays.

Cette fracture est l’objet d’une récupération politique permanente, qui a poussé les gouvernements successifs depuis l’indépendance, en 1960, à mener une « guerre sécrète » contre le français, une guerre qui finira par se révéler au grand jour. Ainsi, depuis les premières années de l’indépendance, les dirigeants du pays se sont employés à modifier le système éducatif à la française en y introduisant une dose d’arabe. Cette tendance a conduit à une arabisation progressive, qui s’est traduite par une école à deux systèmes, avec le français pour les Mauritaniens d’origine africaine, et l’arabe pour la composante arabo-berbère.

Les francophones, une espèce en voie de disparition

Cette situation a aussi accentué la fracture communautaire, en créant deux types de citoyens dans un même pays. Malgré la tentative de fédérer les deux systèmes, à la faveur de la dernière réforme du système éducatif lancée en 1999, le fossé est toujours très grand. Cette réforme avait le mérite de revaloriser l’enseignement du français en ce sens, qu’elle avait décrété l’enseignement obligatoire des matières scientifiques en français exclusivement.

Malheureusement, cette initiative ne fit pas mouche. Les résistances au sein du système, noyauté par les arabisants, étaient les plus fortes et la volonté politique laissait également à désirer. Et, au moment où on décréta cette réforme, on continua à former les arabisants en masse. Par contre, les francophones, une espèce en voie de disparition, étaient recrutés au compte-gouttes.

C’est dire que la volonté de sabotage était manifeste. Cette réforme improvisée et inadaptée est toujours en vigueur mais aujourd’hui, l’enseignement du français dans les écoles mauritaniennes est si exécrable qu’on aura du mal à assurer la relève. Et dans les prochaines années, il va falloir se résoudre à importer des francophones.

Face à ce recul inquiétant du français en Mauritanie, ni les instances de la francophonie et encore moins la France ne remédient à cette situation.

Au contraire, la France semble opter pour la restriction de ses frontières, au nez et à la barbe des étudiants mauritaniens qui peinent à trouver un visa pour poursuivre leurs études dans les universités françaises. Avec ce contexte de plus en plus défavorable, on assiste à la descente aux enfers du français, dont les lampions s’éteignent lentement mais sûrement sous nos cieux.

Bakari Guèye

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