Notre région a abrité cette semaine un évènement majeur. Il s’agit du Sommet Arabe, qui s’est déroulé avec la présence des chefs d’État, de gouvernement et de représentants de vingt-deux pays, outre les présidents africains invités, les institutions régionales et mondiales. C’est le premier du genre depuis trois ans.
Il est évident que le »dossier malien » est à la tête des priorités de chaque réunion et sommet, mondiaux, a fortiori intercontinentaux, qui se tiennent à proximité du Mali.
En effet, le dossier malien s’impose de lui-même comme priorité au menu des agendas et Programmes, en dépit des circonstances mondiales: pandémies, menaces de guerre non conventionnelles.
Le Mali attire un intérêt régional et mondial, suite aux profondes mutations que connaît ce pays durant la période récente.
Celles-ci constituent une équation difficile dans la stabilité de la zone et dans la réorientation des équilibres qui devraient être à la base des intérêts généraux des États, aussi bien au Sahel, dans la sous-région et dans le monde.
De là l’importance de la présentation du message du Mali au monde, en ce qu’elle constitue le message-clé de toute solution future qui serve le Mali, les Maliens, leurs voisins et la sécurité mondiale.
Pour ce faire, il y a lieu de savoir :
1. La République du Mali est un État indépendant depuis le 22 septembre 1960, d’une superficie de 1.241.238 km2 et une population de 21 millions d’habitants.
2. Le Mali est 1er producteur de coton en Afrique, le 3e producteur de lithium, nécessaire pour les smartphones, les ordinateurs, les écrans de télévision, essentiel également pour des dizaines de produits électroniques, en plus d’industries indiennes et techniques diverses.
3. Le Mali est un pays très riche en divers minéraux, y compris l’or, dont il est le 3e producteur sur le continent africain, outre le fer, l’argent, le phosphate…
4. Le Mali possède 900.000 km2 qui recèlent des réserves de pétrole, de gaz, de houille et des richesses considérables.
5. En 2012, 3 villes du nord du Mali (Kidal, Tombouctou, Gao) étaient tombées sous le contrôle de groupes terroristes extrémistes, concomitamment avec l’annonce des mouvements de l’Azawad de leur séparation de l’État central, à Bamako.
6. Durant cette même année 2006, les autorités de Bamako avaient demandé l’intervention de la France avec le soutien des Nations Unies, dans le cadre l’opération dite Serval en plus de la MINUSMA, casques bleus.
Les villes, jadis occupées par les extrémistes, furent certes libérées. Mais, après 9 ans de présence française à travers la force Barkhane et les forces onusiennes, 70% du territoire malien sont exposés aux menaces de groupes terroristes armés. Ceux-ci se sont déplacés du nord au centre et au sud du pays.
Parlons chiffres. 30% du territoire malien étaient auparavant menacés par les groupes terroristes et aujourd’hui, seulement 30% échappent au danger de ces groupes.
7. 59 français sont morts depuis l’intervention de la France au Mali et plus de 100 casques bleus des forces onusiennes et plus de 11 mille civils des trois pays (Mali, Niger, Burkina Faso) sont décédés lors d’attaques de groupes armés.
8. Face à une telle situation et un bilan aussi catastrophique, il était nécessaire d’agir pour sauver le Mali et renverser le président Ibrahima Boubakar Keita (Allah yarehmou), le rétablissement de la dignité de l’État, le retour de la paix civile et la stabilité. C’est ce qui a nécessité un deuxième coup d’état en 2021 après celui de 2020.
9. En raison de tout ce qui précède, il était nécessaire de réviser la politique de défense commune avec l’ancien colonisateur, la France et la signature d’une nouvelle convention de défense et de coopération militaire avec la Russie, en plus de la signature d’une convention d’entraînement et de formation avec le groupe controversé Wagner.
10. Par conséquent, il était nécessaire de recourir à un armement en dehors du »marché de ferrailles ». C’est ainsi que le Mali a acquis du matériel et des équipements militaires sophistiqués de fabrication russe. C’est grâce à cela que le pays est parvenu à repousser les groupes terroristes armés et à retarder leur avancée en direction de Bamako.
11. Une évaluation de la force conjointe du G5-Sahel a été réalisée et le Mali a décidé de se retirer du G5-Sahel suite au refus de celui-ci d’accorder au Mali la présidence rotative du groupe.
12. Un embargo économique a été décidé à l’encontre du Mali par la Communauté Économique Des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
D’une durée de 6 mois, cette sanction fut le plus grand cadeau offert par la CEDEAO aux groupes terroristes qui s’évertuent à affaiblir le pouvoir central à Bamako et à détruire l’économie nationale pour intensifier la crise sociale et rendre la vie difficile aux maliens.
Au fait, le rôle du Président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani fut vraiment un rôle très honorable, suite à sa décision historique de refus des sanctions économiques uniques à l’encontre du peuple malien.
La Mauritanie possède plus de 2.237 km de frontières communes avec la République malienne. Quatre régions mauritaniennes importantes sont avoisinantes au Mali: Hodh Echarghi, Hodh Elgharbi, Assaba et Guidimagha.
Ce sont toutes des régions pastorales par excellence, dans la mesure où elles recèlent les richesses animales du pays. Les habitants de ces régions exercent le commerce, l’agriculture et de déplacent dans une zone de développement aussi importante que sensible.
13. Le premier partenaire de l’État malien n’est nul autre que la République Populaire de Chine.
14. La communauté malienne résidant en France compte plus de 100 000 personnes. C’est la deuxième diaspora en France, en nombre, après la communauté algérienne.
• La junte militaire au pouvoir à Bamko est très populaire. Toutes les décisions émises par le Conseil de la Transition rencontrent rencontrent acceptation et satisfaction et un grand soutien populaire. Le citoyen malien soutient la politique du Président Goïta et de ses collègues militaires Camara, Koné, Wagué et Joe. Cela se reflète dans les célébrations et les divers moyens d’expression.
• Le Mali n’est pas hostile à la France et recherche avec tous les pays des relations basées sur le respect mutuel et l’intérêt mutuel.
Le dialogue et la coopération entre le Mali et la France sont impératifs pour l’intérêt des deux pays, des deux peuples, de la région et de la sécurité du monde. Seul un dialogue, qui ne soit pas influencé, sera efficace et pourra aboutira des résultats probants. Tout autre dialogue n’aboutira à rien.
• La République du Mali, avec sa nouvelle direction militaire, se concentre sur la réalisation de ses intérêts à travers les deux pays voisins : l’Algérie, la Mauritanie et, bien sûr, les États-Unis d’Amérique. Ces trois pays sont en mesure de jouer un rôle central important pour soutenir l’État, le peuple et le gouvernement maliens. Un soutien qui apportera des résultats substantiels et durables à la région et au monde.
En bref, tel est le message du Mali au monde. Un message qui n’est ni opaque ni crypté, et qui résulte de la vision et de la stratégie de Bamako à un moment crucial, mais il est impossible de travailler avec des procurations périmées. Cependant, avec la rationalité, la fraternité et l’absence d’intérêts immédiats, tout le monde y gagne, sur la base d’un partenariat gagnant-gagnant au bénéfice du Sahel, de l’Afrique, de la région et du monde.
Moctar Ould Cheine
Chercheur mauritanien spécialiste des affaires du Sahel.
Notes et références :
1- https://www.cia.gov/the-world-factbook/countries/mali/
2- http://wits.worldbank.org/CountryProfile/Country/MLI/Year/2012/Summary
3- https://www.ictj.org/publication/possibilities-and-challenges-transitional-justice-mali.
8- https://afrique.lepoint.fr/economie/coton-le-mali-persiste-et-signe-26-01-2018-2189827_2258.php
9- https://www.irsem.fr/institut/actualites/etude-de-l-irsem-n-97-2022.html
10- « El coronel Assimi Goita, designado nuevo hombre fuerte de Mali tras el golpe »
11- « Recherche sur l’Historique de la Décentralisation au Mali. De la Période Coloniale à la 3ème République »
12- « University of Minnesota, Institute of Advances Study October 11, 2012: Sharon Fischlowitz: The Art and Ambivalence of Afropolitan Patriotism: Making Malian Music in Times of Celebration and Crisis.