Entre les mauritaniens-ou du moins une partie d’entre eux-et le français, ce n’est pas toujours le grand amour. La langue de Molière dont la masse de locuteurs dans le pays se rétrécit comme une peau de chagrin, est menacée de disparition et ses rares utilisateurs sont régulièrement exposés aux assauts inquisiteurs des arabisants de pacotille.
En effet, les ténors de l’arabisation à outrance du système éducatif ont fini de démolir tous les efforts entrepris pour le maintien contre vents et marées de cette belle langue. Malheureusement l’acharnement de politiciens sans scrupules aidés par l’ignorance d’une populace rondement menée en bateau ont fini par avoir raison de l’ancrage de cette langue qui, qu’on le veuille ou non fait partie de notre histoire.
Seulement, nos dirigeants successifs ne l’entendent pas de cette oreille, en dehors de feu Me Moktar Ould Dadah qui avait imposé le français comme langue exclusive de travail en Conseil des ministres -et même d’ailleurs au sein de l’administration-, tous les autres ont préféré joué sur la fibre patriotique en voulant imposer l’arabe coûte que coûte, et comble de l’hypocrisie, ils étaient tous francophones et beaucoup d’entre eux parlaient un arabe au rabais.
Cette fièvre nationaliste avait abouti au début des années 80 à une politique d’arabisation improvisée qui a eu pour conséquence une crétinisation de notre système éducatif et une chasse aux sorcières qui a purgé l’administration mauritanienne de ses éléments les plus valables, des cadres francophones bien formés. Et c’est apparemment au même remake qu’on assiste actuellement.
En effet, la dernière décision du Bureau de l’Assemblée Nationale qui impose l’usage des langues nationales est une exclusion à peine voilée du français de cette auguste chambre.
Autres fait intervenus concomitamment, d’abord la dernière conférence de presse de l’ex président Aziz qui a refusé de parler français, arguant qu’il s’adresse aux mauritaniens.
Il y a eu ensuite ce congrès de l’UPR qui vient de se tenir à Nouakchott et où les congressistes ont hué la journaliste qui était chargée de traduire en français les interventions l’empêchant ainsi d’accomplir cette mission.
Autre fait non moins révélateur, la levée de boucliers suscitée par le nouveau président, Mr Ghazwani, à qui on n’a pas pardonné d’avoir livré ses premières interviews à des médias francophones.
Ainsi donc, les francophones n’ont pas pignon sur rue en Mauritanie et ils sont de plus en plus dans la ligne de mire d’une plèbe téléguidée par des pyromanes, qui véhiculent des idées d’un autre âge, qui attisent les conflits inter communautaires et qui prônent l’intolérance.
Il est donc du devoir du président Ghazwani d’empêcher ces pêcheurs en eau trouble de replonger le pays dans les abysses de l’obscurantisme.
Bakari Guèye
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