La marche du 9 janvier contre « le discours de haine » que dirigera le Président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz sera le deuxième événement inaugural de l’année 2019 en Mauritanie après la sortie effective de prison du militant antiesclavagiste et député Biram Dah Abeid mardi 1er janvier à 00 heures…
L’objet de cette marche tel que libellé par la Primature qui y invite tout le monde sous prétexte de « devoir national » est le suivant : « barrer la route aux auteurs des discours haineux et incitatifs à la discorde, indépendamment de leurs origines, et (…) manifester avec force et détermination une position nationale unifiée contre tout ce qui est de nature à compromettre la cohésion et la solidarité entre les composantes de notre pays… »
Curieux qu’à quelques mois d’une présidentielle censée tourner la page d’un régime lourdement ressenti par une écrasante partie des mauritaniens, le gouvernement, choisisse la rue comme option face à ces choses qu’elle dénonce alors qu’elle dispose de toute une batterie de lois et de moyens soit pour les empêcher d’avoir lieu soit pour en punir les auteurs…Le pouvoir qui en d’autres circonstances a mâté des marcheurs qui ne faisaient que revendiquer plus de justice et d’égalité décide de battre le pavé…
Se souvient-il que les forces de l’ordre ont dispersé le 4 mai 2014 des dizaines d’anciens déportés qui ont fait 300 kilomètres à pied de Boghé à Nouakchott pour réclamer des conditions de réinsertion honorables ? D’où vient alors ce besoin d’occuper la scène alors qu’il y a plusieurs mois on a vu des images montrant des brigades antiémeutes passer à tabac jusqu’à les traîner dans leur sang des manifestants. On peut citer à rebours toutes les actions violentes du pouvoir à l’égard de ses populations et même des pressions auxquelles sont soumises, jusqu’à l’étouffement, des pauvres citoyens…Cela prendrait du temps et de l’énergie tellement il y en a eu…
Que veulent les détenteurs du pouvoir ? Jouer aux héros de conte de fée qui sortent une idée comparable à une de ces pièces magiques qu’un prince doit tirer de sa besace pour surmonter un obstacle en chemin pour reconquérir une bien aimée tenue en otage par les « forces du mal » ? Ici, la bien-aimée à reconquérir c’est ce pouvoir qui est sur le point de glisser des mains de ses détenteurs.
De crainte qu’il ne tombe entre des mains « ennemies », ces détenteurs du pouvoir ont commencé à sortir « les sortilèges.» On peut en énumérer une tonne au moins. Mais contentons-nous de rappeler que les « initiatives pour un 3e mandat » en sont une des expressions les plus récentes. Il y a eu cette fameuse histoire de Samory Ould Bèye qui s’est fait tancer à coups de tweet et de postings facebook par le président du parti UPR et celui de l’Assemblée Nationale pour avoir dit qu’un homme l’a menacé à l’arme blanche en pleine réunion avec le ministre de l’équipement.
Ce « fait » ne fera l’objet d’aucune enquête sérieuse. Il devient sujet à toutes sortes de supputations. Un prétexte contre une certaine idée du « discours de haine, du racisme, de la discorde » que seul le régime a le droit de définir…Et on n’oublie pas les sorties du chef des détenteurs du pouvoir et de certains de ses ministres contre « les extrémistes »au lendemain des élections de septembre…C’est à croire que l’on tend un piège à la Mauritanie…Un imbroglio qui retardera ou empêchera le rendez-vous des urnes de juin 2019.
Kissima