A Nouakchott, les habitants du secteur Est de Dar Naim vivent un véritable calvaire à intervalles réguliers. Lundi après-midi un déluge de gaz carbonique recouvrait toute la partie Sud Est de la zone de l’avenue de la résistance « Charé Aziz » qui va jusqu’à Toujounine, et les résidents étaient contraints d’ingurgiter une fumée âcre d’une haute teneur toxique.
Les nuages de fumée obscurcissaient le ciel dans cette partie de la ville ainsi que dans les zones environnantes. Des cas d’asphyxie sont souvent signalés ça et là… Ce désagrément-qui pose un véritable problème de santé publique-laisse généralement les autorités indifférentes. Comme toujours, les populations sont abandonnées à leur triste sort. En effet, ni le wali, ni le préfet et encore moins les autorités sécuritaires ne daignent lever le petit doigt.
Pour Mohamed Lemine, un habitant qui se dit très éprouvé : « Nous sommes régulièrement soumis à cette fumée toxique qui nous rend malades. Notre quartier devient invivable car on trouve des problèmes pour respirer de l’oxygène. Parfois nous sommes surpris en plein sommeil par ces gaz nocifs. »
Cette fumée provient de l’incinération des dépôts d’ordures situés dans la zone de l’avenue de la résistance, une avenue devenue depuis quelque temps un véritable dépotoir. Auparavant elle avait été l’un des poumons de la capitale, un endroit où des centaines de famille pique-niquaient et profitaient de l’air pur. Malheureusement cela n’a pas duré longtemps, pour des raisons soit disant sécuritaires la zone avait été interdite aux promeneurs, depuis, les belles dunes de sable sont devenus de gigantesques dépotoirs et le lieu de prédilection des chiffonniers. Certains d’entre eux n’hésitent pas à mettre le feu aux ordures pour recueillir certains éléments (fil de fer, etc.) qu’ils partent revendre.
Et ce sont les populations riveraines qui doivent en payer le prix, un prix exorbitant car, non seulement ces populations sont privées d’oxygène, mais elles doivent aussi faire face aux nombreux problèmes médicaux que cela crée, ce qui, bien entendu, a un coût.
Ce problème n’est pas circonscrit à certains quartiers de Nouakchott mais il est général. En effet, la capitale mauritanienne fait face à un sérieux problème d’assainissement et avec le manque cruel d’hygiène, il ne serait pas exagéré de dire que les ordures sont la chose la mieux partagée à Nouakchott.
Ainsi, depuis le départ de la société française Pizzorno en 2014 qui s’occupait de l’hygiène publique, la ville a renoué avec son délabrement d’antan. Et les équipes héritées de la Communauté urbaine de Nouakchott (CUN) déployées çà et là et qui ont pris le relais sont complètement submergées par les ordures. C’est ainsi par exemple que, l’axe Polyclinique/Toujounine, qui passe pour être l’axe sur lequel transite le plus gros du trafic automobile détient un autre record beaucoup moins glorieux celui-là. En effet, l’insalubrité sur cette route est très visible par moments. Cela s’explique par la proximité de plusieurs marchés sans compter une concentration anormalement excessive des charretiers qui font de cet axe leur quartier général. C’est ainsi qu’il est le plus souvent loisible de remarquer, de part et d’autre de cette route des tas d’immondices déversées à même le bitume par des vendeurs indisciplinés. On peut également observer des charrettes au repos avec des ânes trônant au milieu de montagnes d’immondices. Les passants sont ainsi indisposés par l’odeur pestilentielle dégagée par les amas d’ordures.
Le tableau sombre fait penser à une étable grandeur nature dans une brousse reculée du pays. Et pourtant, on est bien à l’intérieur de la ville de Nouakchott, capitale de la République islamique de Mauritanie. Et le plus grave c’est que cet axe est loin d’être une exception.
Et malgré les efforts menés actuellement par les entreprises d’assainissement supervisées par les mairies, le problème des ordures continue en effet à se poser un peu partout à Nouakchott où toutes ces entreprises ont montré leurs limites.
Ce grave problème de pollution provoqué par l’incinération des ordures en pleine ville se pose également avec la même acuité à « Tivirit » dans la lointaine banlieue de Nouakchott. En effet c’est à « Tivirit » un gros village peuplé situé à 25 km de Nouakchott que se trouve le principal site d’enfouissement du pays. Cette décharge grandeur nature rend la vie dure aux habitants de la zone qui ont manifesté bruyamment à la fin de l’année 2020 pour exiger la fermeture du site, une promesse faîte en octobre 2020 par le ministre de l’intérieur.
Pour les parlementaires qui ont récemment visité les lieux cette décharge constitue une menace pour l’environnement et pour la santé des riverains.
Après le ministre de l’intérieur, le porte parole du gouvernement Sidi Ould Salem avait promis le 22 octobre dernier de régler ce problème, une promesse qui demeure toujours lettre morte.
Bakari Guèye