Le discours de vérité en Mauritanie : entre refus de l’ordre établi et urgence d’un vivre-ensemble durable

En Mauritanie, toute tentative d’analyse honnête de notre réalité sociale et politique semble inévitablement heurter l’ordre établi. Le discours de vérité y est perçu comme une provocation, un trouble à l’harmonie de façade soigneusement entretenue. Pourtant, il ne s’agit ni de haine ni de subversion : il s’agit de nommer les injustices, d’interroger les défaillances et de prévenir les dérives.

Un héritage en péril:

Quel legs sommes-nous en train de construire pour les générations futures ? Si nous continuons à détourner le regard, à camoufler les plaies sous des discours de façade, c’est une société sans nation que nous sommes en train de télécharger. Une société fragmentée, où chacun vit dans sa bulle, dans sa douleur, dans son identité blessée, sans projet commun.

De la lucidité à l’action:

Les Mauritaniens ont l’intelligence de nommer leurs problèmes, mais manquent souvent de cadre collectif pour en discuter sereinement et définir ensemble les voies de solution. Or, tant que les antagonistes n’échangent pas dans le respect de leurs différences, le consensus nécessaire à l’avènement d’un véritable État de droit s’éloigne chaque jour davantage.

Pistes d’action concrètes pour un vivre-ensemble renforcé:

  1. Mettre en place une commission vérité et réconciliation pour documenter les injustices passées et proposer des réparations symboliques ou matérielles.
  2. Réformes institutionnelles: Garantir une représentation équitable de toutes les composantes de la société dans les institutions et valoriser les langues nationales dans l’éducation, les médias et l’administration.
  3. Éducation à la citoyenneté : Réformer les curricula scolaires pour y intégrer l’enseignement du vivre-ensemble, de l’histoire plurielle, de la diversité culturelle et des droits humains.
  4. Accès équitable aux ressources : Mettre en œuvre des politiques publiques ciblées pour corriger les inégalités d’accès à la santé, à l’éducation et aux infrastructures, notamment dans les régions marginalisées.
  5. Encouragement du dialogue : Organiser des forums citoyens réguliers et soutenir les médias communautaires pour promouvoir le dialogue interethnique et interculturel.

Vers une renaissance citoyenne

La paix civile ne saurait reposer éternellement sur le silence, le refoulement ou l’imposition d’un récit unique. Elle exige de regarder notre passé en face, de redéfinir les termes de notre vivre-ensemble et d’offrir à chaque citoyen sa place pleine et entière dans une Mauritanie réconciliée avec elle-même.

Bakary Seta Wagué

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