Dans le cadre du projet PROPEL Santé financé par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), un atelier de renforcement des capacités en matière de plaidoyer s’est tenu à Nouakchott du 11 au 12 décembre.
Le projet se concentre sur la planification familiale/santé reproductive (PF/SR), un domaine où, malgré les progrès, beaucoup de choses restent encore à faire.
Le 18 janvier dernier on a assisté au lancement du Plan d’Action National Budgétisé (PANB) de l’espacement des naissances 2024-2028. De ce fait le rôle des jeunes leaders, des OSC et des journalistes est jugé capital pour la réussite de ce plan.
En Mauritanie le taux de fertilité est élevé. Parallèlement on note une faible utilisation des contraceptifs. La mortalité maternelle est très élevée et les jeunes femmes sont particulièrement touchées.
Ainsi les services SR sont peu développés c’est dans ce contexte a souligné la représentante de l’Agence Américaine pour le Développement International(USAID), Madame Lisa Washington-Sowal, qu’intervient ce projet qui vise à équiper les jeunes leaders, les OSC et les journalistes, pour mener des actions efficaces de plaidoyer.
18% du budget seront consacrés dans le plan d’action à l’appui des adolescents et des jeunes. Les efforts consentis auront des répercussions sur les générations futures a assuré la responsable de l’USAID qui a insisté sur la nécessité de mobiliser les ressources et de renforcer les capacités des acteurs.
Même son de cloche de la part de Fatimetou Moulaye directrice du Programme National de la Santé de la Reproduction (PNSR) qui a remercié le PROPEL pour sa contribution dans l’élaboration et la finalisation du PANB.
Elle a souligné que la Mauritanie est parmi les pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre avec des indicateurs alarmants. Le taux de mortalité maternelle s’élève à 424/100.000 naissances vivantes.
Pour la prévalence contraceptive les taux est de14,3% d’où la nécessité préconise-t-elle d’adopter une politique de planification familiale afin d’atteindre les ODD en 2030. L’objectif a-t-elle rappelé est de diminuer drastiquement le taux de mortalité maternelle pour le ramener à 70/100.000 naissances vivantes et porter le taux de prévalence à 25%.
La directrice du PNSR s’est félicitée de l’appui constant de l’USAID qui a financé plusieurs projets dont celui sur la quantification et l’acquisition des GAP de financement en contraceptifs.
Et pour revenir à l’atelier en question son objectif est de doter les participants des compétences et outils nécessaires pour défendre et promouvoir l’espacement des naissances au niveau local, régional et international ; contribuer à la mise en œuvre du PANB ; Renforcer les capacités techniques en plaidoyer et gestion des projets et en leadership.
Présentation de PROPEL Santé
Le projet PROPEL Santé vise à améliorer l’environnement propice à la mise en place de services, de fournitures et de systèmes de prestation de soins de santé équitables et durables.
Le projet accorde une attention particulière à la planification familiale et à la santé reproductive (PF/SR), aux soins de santé primaires et à l’intégration des services.
La stratégie de PROPEL Santé donne la priorité à la localisation du leadership en matière de politique, de plaidoyer, de financement et de gouvernance, ainsi qu’à l’assistance technique et au renforcement des capacités afin d’améliorer la résilience et la viabilité des systèmes de santé. PROPEL Santé collabore avec des partenaires et des acteurs locaux, par le biais de subventions qui visent à favoriser la mise en œuvre locale, à renforcer les capacités locales et à soutenir les innovations dirigées par les communautés locales.
L’approche de PROPEL Santé tend à promouvoir des politiques et des systèmes résilients et équitables ; Faire progresser les soins de santé primaires ; Optimiser et pérenniser le financement ; Garantir une gestion responsable et transparente ; Renforcement des capacités locales pour une couverture sanitaire universelle ; Promouvoir un plaidoyer et des décisions politiques éclairées par les données et Intégrer la planification familiale et des soins de santé primaires.
A noter qu’en Mauritanie la mise en œuvre du PANB a débuté en 2014 et le taux pour les méthodes modernes a atteint 12,8%. Pour le nouveau PANB on table sur un taux de 21,2%.
Au niveau du partenariat de Ouagadougou, la Mauritanie est dernier de la classe et l’objectif visé est de rattraper ce retard.
PROPEL Santé a été lancé le 23 septembre 2022 et sera clôturé le 22 septembre 2027.
Gestion de programmes et leadership
Les participants à l’atelier ont eu droit à plusieurs présentations autour de la gestion des projets et du leadership.
S’agissant de la gestion des projets, elle se caractérise par un environnement complexe, un processus dynamique, des composantes qui varient selon le stade du cycle et des exigences rigoureuses.
La conception, la planification, l’exécution et la clôture sont les 4 étapes du cycle d’un projet.
Quant au leadership il se distingue par les 3 vertus fondatrices à savoir : l’humilité, le courage et l’intégrité.
Le leader est celui qui arrive à sélectionner les talents sans états d’âme, qui procède au coaching de ses coéquipiers et qui sait créer une atmosphère de confiance. Il faut savoir rassurer et servir de modèle.
Un bon leader doit savoir communiquer, éliminer les barrières, partager le pouvoir et insuffler la motivation à son groupe. La rétro-information est une autre qualité que doit avoir un leader. Il doit aussi adopter l’approche appréciative qui consiste à reconnaître les mérites de chacun.
Ne pas confondre Plaidoyer et communication pour le changement de comportement
Tel que défini par Modibo Maiga, directeur régional de PROPEL Santé, le plaidoyer est une série d’actions ciblant les décideurs en vue d’un soutien pour la résolution d’un problème spécifique.
Et la campagne de plaidoyer est un ensemble d’actions ciblées pour soutenir une cause ou un thème.
Tout au long de la formation, les participants ont été invités à faire la différence entre plaidoyer et Communication pour le Changement ; une erreur assez courante a souligné le formateur.
En effet, au niveau du plaidoyer on vise un changement de politique et une allocation des ressources. Et la cible ce sont les décideurs (gouvernement, élus locaux, opérateurs privés, etc).
Quant à la communication pour le Changement elle est plutôt axée sur la sensibilisation.
Les participants se sont également familiarisés avec les différentes techniques de plaidoyer, de mobilisation des ressources et sur les objectifs SMART atteignables dans des délais relativement courts (6 mois à une année).
Les notions usitées au niveau du plaidoyer ont été décortiquées par les formateurs. Il s’agit entre autres des notions d’audience (primaire et secondaire), le message d’une minute, de guide pour l’obtention des gains rapides pour le plaidoyer AFP SMART, le choix du porteur de message.
Les participants ont été mis à l’épreuve à travers des exercices de groupe et des activités SMART.
Cap sur 2030
A travers cet atelier axé sur l’utilisation d’approches de plaidoyer en vue de l’accroissement annuel du budget national dédié à la santé, le projet PROPEL Santé apporte sa contribution à l’atteinte des engagements pris par la Mauritanie dans le cadre de FP 2030 ; le partenariat de Ouagadougou, ainsi que la Loi sur la Santé de la Reproduction ; le soutien pour l’amélioration de l’utilisation des soins de santé primaire, l’utilisation des dépenses de sante et l’accroissement de la protection contre les risque financier.
Rappelons que la Mauritanie s’est engagée à atteindre les ODD 3.1, 3.2, 3.7 et 3.8. Seulement les obstacles existent comme la pauvreté dont le taux atteint 28% .
Et pour la prévalence contraceptive si le taux de 14% représente une évolution, les disparités régionales sont criantes. C’est ainsi que dans la région du Hodh Charghi ce taux n’est que de 3%.
Quant à l’indice synthétique de fécondité il est de 5,2%.
Un rapport publié en 2020/2021 fait état d’une mortalité maternelle de 30% chez les jeunes femmes âgées de moins de 30 ans.
Bien vrai que le renforcement de l’acquisition des produits SR avec notamment l’augmentation de la ligne budgétaire grâce à la contribution de l’USAID a permis de combler le déficit existant, mais, malgré l’existence du Plan d’Action National Budgétisé (PANB), on est encore loin du consensus d’Abuja qui demande aux pays de porter les budgets de la santé à 15% du budget total. En Mauritanie, on en est encore à 7%. Et c’est ce qui explique que la situation de la mortalité maternelle et des besoins non satisfaits demeure alarmante.
Toujours est-il que selon la directrice du PNSR, l’accélération de la mise en œuvre d’une feuille de route ambitieuse et budgétisée en la matière est un motif d’espoir. Il y a également la mise en place en cours d’un nouvel observatoire qui sera lancé le 16 janvier prochain sous la supervision de la première dame et aura pour objectif entre autres l’accélération de la réduction de la mortalité maternelle.
Cet observatoire piloté par le ministère de la santé comprend 5 ministères. Il se réunira une fois par trimestre et devrait plancher sur les dysfonctionnements et les défis en matière de santé SR/PF, sur la mobilisation des ressources, la supervision des plans et devrait veiller sur la redevabilité.
Autre bonne nouvelle, la création de 5 centres régionaux de transfusion sanguine. Jusque-là il y en avait un seul, celui de Nouakchott. Il s’agit là d’un pas important car l’hémorragie est la première cause de mortalité maternelle en Mauritanie.
En perspective de 2030, les professionnels du secteur de la santé tablent sur une augmentation du budget de la santé, ce qui constituerait un excellent catalyseur pour l’atteinte des ODD.
Bakari Gueye