Nous sommes en 2012. Le samedi 13 octobre. C’est le 286e jour de l’année du calendrier grégorien, calendrier solaire conçu à la fin du XVIe siècle pour corriger les dérives séculaires du calendrier julien qui était à cette époque en usage en France.
C’était le début du weekend. Nouakchott, la capitale était calme en cette fin d’après midi. La fraicheur de bise de mer de l’océan atlantique laissait place à la tombée de la nuit. Chacun cherchait un moyen pour rentrer chez lui après avoir vaqué à ses occupations.
Quelques instants après la prière d’El Ichaa, aux environs de 20 heures 50 minutes une information tombe. Elle fait du bouche à oreille à la vitesse du son et anime tous les sujets de conversations. La président Mohamed Ould Abdel Aziz a été blessé par balle.
En moins d’une heure de temps l’’information passe à la une de tous les autres sujets de conversations de cette fin de journée du samedi. Ould Abdel Aziz, le chef de l’Etat est blessé par balle. Par qui ? Quand ? Où ? Dans quelles circonstances ? A toutes ces questions les curieux, les diplomates, les journalistes des presses nationales et internationales et même les membres du gouvernement cherchaient des réponses.
Avant toute déclaration officielle, chacun commentait ce fait divers « affaire d’état » à sa manière. Les rajouts et les ragoûts s’entremêlaient pour répandre une information de dernière minute qui a surpris tous les mauritaniens. On ne connait encore rien de ce qui s’est passé. Seule certitude, des témoins oculaires qui se trouvaient dans l’enceinte de l’hôpital militaire au moment des faits, ont affirmés que le président Ould Abdel Aziz était descendu d’une voiture apparemment blessé à l’abdomen. Aussitôt il a été introduit dans l’aile de la zone des services d’urgence de cette structure de santé médicale militaire de référence.
Quelques instants après son arrivée à l’hôpital, le président aurait, selon des informations, perdu connaissance. Si la situation sanitaire du blessé était grave, la situation politique et sécuritaire l’était aussi. L’enceinte de la structure médicale a été aussitôt évacuée, bouclée par les éléments du BASEP la garde rapprochée du président et l’hôpital déclaré zone militaire de « très haute sécurité ».
Le président qui avait perdu connaissance au moment de sa prise en charge aux urgences devait être opéré sans tarder pour stopper une hémorragie et extraire une balle logée dans son abdomen. La gestion de la crise créée par cet incident, (dont personne, ni des services des renseignements généraux ni des services secrets des Etat-majors ne connait encore les causes réelles), est classée « secret d’état ».
C’est le Général Ould Ghazouani informé de l’incident par le président blessé en personne qui prend les choses en main pour gérer la crise à dimensions sécuritaire et politique. Il semble avoir été sollicité par son ami blessé avant qu’il ne perde connaissance.
Le Général Ould El Ghazouani est chef d’Etat-Major et ami personnel d’Ould Abdel Aziz. Les deux généraux avaient été frappés simultanément par une même décision prise par Sidi Ould Cheikh Abdallahi qui les relevait de leurs fonctions en août 2009.
Ce jour-là, le 6 août, devant l’obstination de Sidi Ould Cheikh de revenir sur sa décision, Mohamed Ould Abdel Aziz avait séquestré le président élu démocratiquement avant de transformer son geste en coup d’état pour se confier unilatéralement les plus hautes responsabilités de l’état mauritanien. Mohamed Ould Abdel Aziz et le général Ould Ghazouani sont amis de longue date. Ils avaient faits tous les deux des études à la prestigieuse académie militaire royale de Meknès. L’un était en première année et le second en deuxième année. Ils avaient passés ensemble une scolarité dans cette école militaire de référence du Maroc, donc suffisamment de temps pour nouer une amitié qui s’est par la suite transformée en complémentarité d’intérêts durant quatre décennies.
Le président Aziz, qui était donc inconscient devait être opéré sans tarder pour survivre à ses blessures. Ould Ghazouani mesurait la gravité de la situation. La mort d’Ould Abdel Aziz sur la table d’opération ou suite à une intervention chirurgicale peut plonger la Mauritanie dans de multiples inconnues. Le pays courait donc de grands risques. Un duo de chirurgiens mauritaniens composé de deux éminents professeurs, Kane Boubacar et Sid’Ahmed Ould Mogueya ont été désignés pour prendre sur eux la lourde responsabilité de sauver la vie à ce blessé « de marque ». Le choix de ces deux compétences a peut être été dicté par la nécessité d’éviter tout risque opératoire ou postopératoire à cet admis aux urgences.
Le Professeur Sid’Ahmed Ould Mogueya est un des plus émérites professeurs de chirurgie de ce 21 ème siècle. Pour ses brillantes études et ses très étendues aptitudes, il est reconnu pour ses compétences aussi bien dans le pays que dans la sous-région africaine et arabe. En 2016 il avait été élu par le 118ème Congrès Français de Chirurgie, au poste de membre d’honneur de cette prestigieuse organisation reconnue mondialement.
Le titre de membre d’honneur attribué à notre confrère est un des vibrants hommages que rend l’Association Française de Chirurgie au cours de ses congrès, à quelques rares membres qui se sont illustrés de façon particulière au cours de l’exercice de leur profession. Le Congrès Français de Chirurgie regroupe plus de 2.000 Professeurs et Chirurgiens parmi les plus éminents de la planète. C’est un prestigieux titre qui a été décerné pour la première fois en 2016 à un spécialiste africain. Cette distinction du professeur Sid’Ahmed Ould Ould Mogueya a placé notre pays au sommet du podium de la chirurgie. Pour la petite histoire, le Professeur Mogueya a été reçu en sa qualité de membre d’honneur, au même titre que deux de ses confrères, l’un de l’Argentine et l’autre du Luxembourg.
L’autre médecin, est le Pr Kane Boubacar, pas très connu dans les milieux populaires et pourtant l’un des plus éminents chirurgiens mauritaniens qui ont fait leurs preuves dans la pratique. Le Pr Kane Boubacar, est considéré par ses confrères l’un des plus compétents chirurgiens du pays. Ils lui reconnaissent la réalisation avec succès de plusieurs interventions chirurgicales complexes et délicates. C’est lui qui a été chargé de superviser l’intervention chirurgicale d’urgence que devait subir le président de la République.
C’était donc une très lourde responsabilité qui pesait sur les épaules de ces deux éminents chirurgiens parce que c’est la première fois en Mauritanie et peut être même en Afrique, que l’opération chirurgicale d’un chef d’état en exercice est effectuée dans une structure médicale de son pays et par des chirurgiens nationaux. Cette première en Mauritanie s’explique peut-être par l’urgence d’effectuer cette opération pour sauver le chef d’état. Donc l’opération devait être effectuée par ces deux chirurgiens à risque zéro. Il va donc du succès de l’opération pour le plateau médical du pays, mais surtout pour la réputation de ces deux professeurs en Mauritanie en Afrique et ailleurs dans le monde.
Pourquoi le choix a été porté sur ce duo ? Sans doute parce que le temps était trop court pour pouvoir évacuer le chef de l’état dans cet état et le risque était grand, mais surtout pour éviter l’ « engagement » d’un pronostic vital. Le choix porté sur ces deux éminents professeurs n’était pas fortuit. Mais était t’il une décision prise par le président lui même avant de sombrer dans le coma ? Une décision prise par la direction des Services de Santé militaire ? Une décision unilatérale de son médecin personnel, ou bien était-elle un consensus collégial des Généraux qui ont été convoqués par le président avant son admission dans la structure sanitaire et avant de perdre connaissance ? On n’a pas de réponses à ces questions.
Si la sécurité et la sureté de l’état étaient entre les mains du Général El Ghazouani un sudiste, homme clé du maintien de l’armée au pouvoir ces 15 dernières années, la lourde responsabilité de l’intervention chirurgicale incombait à ces deux professeurs, l’un arabo-berbère natif du nord et l’autre négro-mauritanien issu du Sud Ouest du pays.
Ces lourdes responsabilités donnaient des sueurs froides aussi bien au général Ghazouani (mis devant un fait accompli), qu’aux chirurgiens dont les bistouris seront responsables des suites de l’opération chirurgicale.
Une crise sanitaire mais aussi une crise sécuritaire.
Qu’est ce qui s’est passé réellement ? Les mauritaniens cherchaient à savoir. Le monde entier aussi. Mais jusqu’à ces moments des faits, personne ne sait vraiment. La seule version qui circulait était au plus chaud de la rumeur, celle qui a été fournie par le président en personne quelques instants après le drame. Selon cette information communiquée par l’intéressé lui-même à un cercle réduit des membres de sa famille et à son ami le très discret chef d’Etat-major des forces armées le Général Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, il « aurait » été visé par un tir d’une patrouille militaire.
Dans la soirée, une version officielle est annoncée au public. La déclaration est faite par le porte parole du gouvernement de l’époque Hamdi Ould Mahjoub apparu à la télévision nationale pour faire du « faux » et de « l’usage de faux » verbal pour colmater les brèches ouvertes par des fausses rumeurs de plus en plus folles qui prenaient le large en Mauritanie et ailleurs dans le monde.
Hamdi Ould Mahjoub, homme très réservé, reconnu par tous pour son honnêteté morale, un intellectuel crédible et intègre va essayer de s’exercer sur le petit écran et publiquement à la déformation de l’information en déclarant : « le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz a été légèrement touché au bras droit par une balle tirée contre lui par un automobiliste qui l’a directement visé alors qu’il se trouvait au volant de sa voiture ».
Cette version, soignée, améliorée et « taillée sur une mesure » n’allait pas coller plus tard avec celle fournie par président lui-même.
Peu avant son évacuation en France, le président Mohamed Ould Abdel Aziz est apparu à la télévision nationale couvert d’un drap « postopératoire » pour assurer les citoyens que son opération a été un succès. Dans cette brève déclaration vidéo d’une durée de 70 secondes, le chef de l’état semblait s’efforcer à parler pour rassurer ses compatriotes sur l’état de sa santé après l’incident commis selon lui -par erreur- par une unité de l’armée dans les environs de la localité de Tweila.
Un peu confus, l’air très affaibli, il se félicitait de la compétence de ses médecins soignants. Dans cette déclaration faite en présence du Pr Kane et du Général El Ghazouani (dont l’expression du visage ne cachait pas une certaine angoisse), le président s’est appesanti surtout sur le succès de l’opération. Puis, sans entrer dans les détails, il avait callé l’incident dans une version « officielle » définitive. « Que l’incident faisait suite à une bavure militaire ».
Mais la version du président au lieu de rassurer les citoyens a au contraire créé une vive polémique sur les causes réelles de l’incident. Le Ministre Ould Mahjoub porte parole du gouvernement avait parlé d’une « légère blessure au bras », alors que l’intéressé lui-même, le président, avait parlé d’une opération « réussie » par un « collectif » de chirurgiens. Ce qui éloignait de la blessure « légère » évoquée par le Ministre. Les informations contradictoires du ministre et celle de son président prouvaient qu’elles cachaient évidemment quelque chose. C’était la certitude de l’opposition qu’on voulait de toute évidence tenir éloignée des faits réels. Pour cette opposition, si Ould Abdel devait partir à Paris pour des « soins complémentaires » après avoir été opéré avec « succès » dans son pays, cela signifiait simplement que si son pronostic vital n’était pas engagé, il n’était pas non plus écarté. L’opposition était donc inquiète. Pas pour l’état de santé du président, mais plutôt pour la « santé » politique du pays à cause des conséquences de cet événement imprévu.
Cette inquiétude a d’ailleurs été justifiée par le contenu du communiqué du ministère français de la défense qui affirmait que « La France a répondu favorablement à la demande du gouvernement mauritanien pour que Ould Abdel Aziz suive un traitement médical adapté dans une structure sanitaire spécialisée en France ». La structure médicale qui allait prendre le relai de l’hôpital militaire de Nouakchott était l’hôpital militaire de Percy-Clamart.
Bavure d’un militaire habillé en tee short à bord d’une Avensis immatriculée en Belgique.
Bavure de l’armée ou tentative d’assassinat ? Jusqu’au moment du départ du président pour la France, évacué, personne n’était fixé les causes réelles de cette blessure par balle. Toutefois, le président avant de s’envoler pour la France en avion médicalisé, avait « balisé » ce qui « serait » donc désormais la version officielle. Cette version c’est à quelques mots près, celle qui sera relatée dans « ses moindres détails » par Justine Spiegel journaliste de l’hebdomadaire Jeune Afrique dans un tissu de mensonges et de contre-vérités qui se base sur la déclaration de l’officier El Hadj Ould H’hmoudy Ould Ahaimed « présenté » comme l’auteur des tirs sur le véhicule du président.
Selon cette version pleine de contradictions en tous cas dans les détails, dans les précisions et même dans les faits, « le président revenait à la capitale dans une voiture banalisée qu’il conduisait lui-même. Cette « voiture banalisée » désignée comme tel par Justine Spiegel était une Toyota V8 bleu ciel aux vitres fumées full options. Toujours selon cette journaliste, (qui apparemment est une spécialiste en balistique), le véhicule conduit par le président n’était pas blindé. Le président était accompagné de son cousin Ahmed Ould Abdelaziz, un homme dont le nom va revenir en écho plus tard dans une autre affaire. Toujours selon notre consœur du journal Jeune Afrique, – apparemment très à cheval sur tous les détails de cette affaire-, le président qui connaît le coin comme sa poche roulait à vive allure. Une escorte de six gardes le suivait dans un véhicule Toyota GX à une distance de 300 m.
Toujours selon cette même version, quand le véhicule du président est arrivé à hauteur de la petite localité d’Akraïdil, à 18 km de Nouakchott et à quelques centaines de mètres de la route bitumée d’Akjoujt, une Toyota Avensis grise immatriculée en Belgique a surgi et a foncé droit sur le véhicule du président. Selon cette journaliste (on dirait présente sur les lieux), à bord de l’Avensis se trouvait un lieutenant du nom d’El Hadj Ould H’hmoudy et un de ses officiers. Le lieutenant El Hadj Ould H’hmoudy Ould Ahaimed (de son vrai nom) est d’après elle, à la tête d’une petite unité de l’armée de l’air et se trouvait à 500 m de sa base (Elle ne précise pas de quelle base il s’agit).
Le président Ould Abdel Aziz fait plusieurs appels de phares afin que l’Avensis lui cède le passage, mais celle-ci au lieu de se dégager, s’arrête et se met en travers de la route. Le président fonce et force le passage. Dès que le président a dépassé le véhicule de la patrouille (l’Avensis immatriculé en Belgique), raconte Justine, le lieutenant Ould Ahmedou s’est retourné et a tiré plusieurs rafales. Treize balles atteignent la voiture présidentielle. L’une des balles traverse le coffre et le siège du conducteur, avant d’atteindre Aziz à l’abdomen, de passer près du rein gauche et de ressortir. Les gardes de corps du président Aziz arrivent en trombe, mais à leur tour ils sont pris pour cible par l’officier de la mmarine. Deux balles atteignent la roue de secours à l’arrière de leur véhicule. Les « gorilles » ne s’arrêtent pas et filent la voiture présidentielle.
Après quelques kilomètres, (toujours selon la journaliste de Jeune Afrique qui cette fois fait office de scanner), le président Aziz dont aucun organe vital n’est touché, saigne abondamment. Il cède le volant à son cousin qui n’a pas une égratignure. Aziz s’empare de son téléphone et appelle son escorte pour les informer qu’on lui a tiré dessus. Il demande à son escorte de ne pas le suivre mais plutôt de retourner neutraliser ceux qui ont ouvert le feu sur sa voiture. Ils sont à bord d’une Avensis grise précise t’il. Son deuxième appel est pour son ami, le chef d’état-major Mohamed Ould Ghazouani. Il l’informe de ce qui s’est passé et dit qu’il croit avoir été victime d’une tentative d’assassinat. Il lui demande de réunir l’ensemble des généraux et son médecin personnel, le docteur Meïda, à l’hôpital militaire.
Peinant à contenir l’hémorragie, (toujours selon le récit de la journaliste de Jeune Afrique), Aziz au bord de l’évanouissement ne cesse de verser de l’eau glacée sur sa plaie. Une trentaine de minutes plus tard, ils arrivent enfin à l’hôpital, où un important dispositif de sécurité a été mis en place. Ses proches sont déjà là. De nombreux nouakchottois informés de la nouvelle se massent à l’entrée de l’hôpital. Aziz franchit le seuil à pied, avant de perdre connaissance. Conduit au bloc, il est opéré par les professeurs Kane et Ould Magaya, les meilleurs chirurgiens de la ville.
Cette version que je viens de vous relater a été racontée par Justine Spiegel dans un article paru dans l’hebdomadaire Jeune Afrique le 29 octobre 2012, seize jours après le drame. Un reportage qui n’est ni plus ni moins qu’une des prouesses de la ligne éditoriale de Jeune Afrique, un journal qui se veut toujours à cheval sur les événements d’actualités africaines qui touchent à la souveraineté, la gouvernance ou les activités des chefs d’états africains. En tous cas cette version « essaie » de bien coller avec la narration des faits faite par le soldat « inconnu », le lieutenant El Hadj Ould H’hmoudy Ould Ahaimed auteur de la bavure, originaire de l’Assaba, donc de la même région que le Chef d’Etat-major Ould El Ghazouani.
Cette version respecte aussi parfaitement les « consignes orientées » du chef de l’état mauritanien sur le « déroulement des faits » quand il s’exprimait à la télévision nationale à sa sortie de l’anesthésie sous laquelle il était mis pour subir l’opération chirurgicale de Nouakchott.
Bavure de l’armée ou tentative d’assassinat ? Tous les mauritaniens se posaient la même question. A-t-on voulu assassiner Mohamed Ould Abdelaziz ? En tous cas, depuis que le président mauritanien a été blessé par balle cette soirée du 13 octobre, les rumeurs n’ont pas cessé de s’emballer à Nouakchott. Elles s’emballaient pour spéculer sur les raisons de cette blessure. En raison de circonstances et d’événements antécédents qui se sont passés depuis qu’Ould Abdel Aziz était arrivé au pouvoir, les rumeurs ont évoqués plusieurs hypothèses :
Attentat perpétré par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ou le Mossad.
Beaucoup pouvait le laisser penser. D’abord à cause de ce qui s’était passé en février 2011. A cette date, un peu moins de deux années après l’arrivée au pouvoir de Ould Abdel Aziz, la Mauritanie était encore dans le collimateur des terroristes affiliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Après l’assassinat des touristes français non loin du poste de sortie de la ville d’Aleg (sous le régime de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, un double attentat qui visait le Ministère de la Défense mauritanien et l’ambassade de France a été déjoué par les forces de sécurité. Le mercredi 1er février 2011, des inconnus à bord d’un véhicule avaient tirés plusieurs coups de feu en direction de la base aérienne de l’armée de l’air à Nouakchott. Dans la nuit du 2 au 3 février 2011, un véhicule bourré de 1.500 kilos de TNT, avait été neutralisé. Il avait été explosé à l’entrée de Nouakchott par le tir d’une roquette de l’armée nationale qui suivait l’infiltration du véhicule depuis Néma. Un autre véhicule bourré d’explosifs appartenant à ce convoi Kamikaze avait été retrouvé abandonné aux environs de R’kiz. Selon les renseignements militaires obtenus, ces deux véhicules étaient en mission pour assassiner le président Mohamed Ould Abdel Aziz. A l’époque, ce n’était pas vraiment le grand amour entre le président mauritanien et les dirigeants d’Aqmi.
Le Président mauritanien était donc agacé par ces incidents à répétition qui se sont ajoutés à l’assassinat d’un américain au Ksar, l’explosion d’une ceinture portée par un kamikaze à proximité de l’Ambassade de France et la mort d’un officier de police dans un échange de tirs avec des terroristes en plein centre de Nouakchott. Il ne supportait pas non plus l’humiliation subie par ses soldats après les attaques de garnisons avancées (plus de 25 pertes en vies humaines). Pour toutes ces raisons il avait fait de la restructuration des forces armées sa priorité. Il avait doté les régions militaires en premières lignes de moyens de défense et de combats conséquents et mis en place des services de renseignements qui ont donné rapidement une définitive suprématie de nos forces armées sur les bandes de terroristes qui proliféraient dans le nord du pays et qui se comportaient comme en terrain conquis.
Les interventions militaires de l’armée mauritanienne suréquipée, sur renseignée et dotée d’une efficace couverture et surveillance aérienne a désorganisé et affaibli complètement les groupes terroristes qui n’avaient plus d’espace en Mauritanie pour leur servir de bases arrières mais surtout qui étaient neutralisés dans leurs mouvements dans l’ancien « no mans land » des tous genres de trafics qui se situe dans la zone de cheggatt.
Mais Malgré tous les préalables des revers infligés aux bandes armées affiliées aux djihadistes par l’armée mauritanienne restructurée et devenue plus opérationnelle, la thèse d’un attentat d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), visant Ould Abdel Aziz a été vite écartée.
Certains ont spéculé sur la possibilité que l’attentat ait été orchestré par les services secrets israéliens. En effet, les relations nouées sous pressions très fortes des puissances occidentales entre la Mauritanie et Israël par Maouiya Ould Sid’Ahmed Ould Taya en 1999, ont connues beaucoup de difficultés. Ces relations avaient suscités bon nombre de controverses dans notre pays.
Malgré tout cela, le régime de la transition et celui de Sidi Ould Cheikh Abdallahi qui se sont succédés avaient maintenus ces relations. En janvier 2009, l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz avait décidé au cours d’une réunion à Doha d’opter pour leur « gel ».
Le samedi 20 mars 2009, contre toute attente, au cours d’un meeting des partis de la majorité, Mme Naha Mint Mouknass, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, est intervenue pour annoncer : « La rupture complète des relations de la Mauritanie avec Israël ». Les diplomates israéliens avaient été mis en demeure de quitter la Mauritanie sans forme de procès. Certains ont pensé donc que le renvoi humiliant de la diplomatie israélienne du pays pouvait avoir poussé Israël à chercher à se débarrasser d’Ould Abdel Aziz. C’est pourquoi, certains ont pensé un moment que le Mossad était derrière la tentative d’assassinat du président mauritanien. Le bruit avait circulé un moment puis la rumeur s’est estompée d‘elle même. La « balle de Tweila » ne provenait donc pas du « calibre » d’une arme des services secrets israéliens. Conclusion, cette soit disant « bavure militaire» ne portait pas la signature de l’Etat hébreu.
Alors qu’est ce qui s’est réellement passé ? Et qui est derrière « cette bavure » ? Une chose est sure. La gestion de cette crise, le montage maladroit des versions « dites officielles », les rumeurs, tous ces ingrédients prouvaient que quelque chose se cachait derrière cet « incident ».
Aziz est évacué, l’auteur de la « bavure » commet une autre bavure. Donc, le dimanche 14 octobre 2012, le président est évacué en France pour des « soins complémentaires ». A son arrivée à la périphérie de paris, il a été admis en réanimation 48 heures dans la structure médicale vers laquelle il avait été évacué. Ce que le Ministre Ould Mahjoub porte- parole du gouvernement avait qualifié d’une « légère blessure au bras », avait requis un « complément » de soins intenses et deux opérations chirurgicales dans une structure médicale spécialisée à l’hôpital Percy-Clamart près de Paris.
La version « diversion » du porte-parole du Gouvernement de l’époque corrigée par la déclaration du président lui-même à sa sortie du coma, ajoutée à la déclaration pleine de contradictions à la télévision nationale de l’officier de l’armée de l’air qui a fait son mea-culpa en déclarant avoir ouvert le feu sur le véhicule du président vont ouvrir la voie à des spéculations incroyables et inimaginables.
Que cachait donc cette histoire de la balle de Tweila qui a fait évacuer de toute urgence le président Ould Abdel Aziz dans un avion médicalisé pour des soins complémentaires adaptés ?
Pourquoi dans son communiqué, le gouvernement français avait mentionné : la France a répondu favorablement à la demande du gouvernement mauritanien pour que Ould Abdel Aziz suive un traitement médical adapté en France ? Que signifiait diplomatiquement cette expression « favorablement » ?
Pourquoi le ministre porte parole du gouvernement, avait parlé d’une « légère blessure au bras » pour expliquer ce qui par la suite allait nécessiter l’admission de Ould Abdel Aziz en salle de réanimation 48 heures dans une structure médicale de référence avant de subir deux autres interventions chirurgicales ?
Il est difficile de répondre à toutes ces questions, même si, jusqu’au moment où parait cet article, des zones d’ombre enveloppent une affaire de « balle » qui relève d’un passé simple très compliqué.
(A suivre).
Mohamed Chighali