Une semaine à peine après la mort du jeune charretier Abbas Diallo, tué par balle à « bout portant » par un soldat en faction sur le bord du fleuve le 28 mai dans des conditions qui suscitent encore beaucoup d’interrogations, le président de la République par décrets successifs a chambardé complètement la configuration de l’organigramme des responsabilités au niveau des Etats-Majors. Le tableau d’avancement et de recul décidé hier se présente un peu comme suit :
Ould Meguett le sage originaire de la localité du « passage caillouteux », précédemment Directeur Général de la Sureté Nationale monte d’un cran pour prendre la direction des Etats Majors des armées. Il libère sa place à un autre général Misgharou Ould Sidi « sudiste de pure souche » qui n’aura à faire que cent cinquante mètres de marche pour occuper son nouveau poste taillé sur la confiance que place en lui le général à la retraite aujourd’hui à la tête de l’Etat. Misgharou libère la place très convoitée de l’état-major spécial qui ouvre ses portes sur la résidence du Chef de l’Etat. Une chance ou un élargissement de la confiance qu’un président peut avoir pour un officier ont fait amarrer le navire du contre amiral Isselkou Ould Cheikh El Welly sur le quai de la Présidence de la République. Ce petit rémuménage dans la grande muette annonce t’il le départ en guerre très prochain des officiers sur un nouveau champ de bataille ?
Le jeu d’échec auquel se sont adonnés en tête à tête les deux généraux Ghazouani et Hanneni Ould Sidi les deux intellectuels officiers de l’armée nationale a fait pousser les pions. Cela veut dire en terme militaire que tous les officiers du commandement en charge des opérations ont été mis en place. Ce dispositif sera opérationnel dans les jours qui suivent. Mais opérationnel Pourquoi ? Là est toute la question.
Le général Ould Abdel Aziz à t’il encore des poches de résistance sur le champ de bataille « politique » dont les arrières sont sécurisés par des petites cellules « militaires » dormantes ? C’est possible. Parce qu’un militaire est avant tout et en principe un homme dévoué à la cause nationale. Mais malheureusement cette cause a été elle aussi, pour les besoins de la gabegie, transformée durant dix années en cause « azizéenne », par certains officiers qui n’ont pas de crédibilité morale et qui étaient corrompus par des avantages matériels offerts par l’ancien homme fort du régime. Ce qui, selon un officier n’est pas le cas des généraux, Ould El Ghazouani et Hanneni Ould Sidi qui, -malgré tout ce qu’on peut dire d’eux, ont toujours évité de se laisser verser dans des manœuvres tendant à effriter leurs intégrités morales, religieuses et sociales.
Maintenant ces changements intervenus au sein des Etats-Majors expriment-ils une décision finale prise pour couper le cordon ombilical qui rattachait ce corps d’un « autre corps » ? Ce n’est pas exclu.
Le général de division Mohamed Ould Cheikh Mohamed Lemine « grand comme trois pommes » qui chute du sommet de l’Etat-major des Etats-Majors, sur le pavé en pierre de l’Etat-Major de la Garde Nationale risque de se faire mal. Surtout que certains –comme moi- pensent qu’il a été déséquilibré par la balle qui a « ricoché » sur sa fonction après avoir traversé l’abdomen du charretier de Winding Abass Diallo.
Peut-être aussi. Encore que la famille du défunt s’est déclarée très choquée par la gestion de l’affaire par l’armée au lendemain du drame. Cette raison n’est pas à exclure si on sait que le Président Ould El Ghazouani très conciliant a toujours depuis qu’il a pris le pouvoir, donné une chance même à ceux qui ne le méritent pas, pour se racheter ou se réhabiliter.
Si li y’a quelqu’un qui doit se poser en ce moment des centaines de questions pour essayer de comprendre pourquoi cette secousse sismique au sein des états-majors maintenant c’est bien Aziz. Il butera longtemps sur la question de savoir pourquoi pour la prière fois un amiral prend la relève de la sentinelle aux portes du palais, et surtout pourquoi le président Ghazouani a fait du « petit bout d’homme de général de division » le commandement en chef des gardiens des prisons à quelques mois seulement des probables premières poursuites judiciaires à l’encontre de certains responsables de sa mouvance disloquée?
En tous cas ce changement inattendu suscite beaucoup de curiosités pour les politiciens « civils » comme pour les « politiciens » militaires. Divisés depuis 78 en deux tendances. Celle de ceux qui considèrent que la place des militaires est la caserne et ceux qui le disent sans le cacher qu’il vaut bien mieux pour ce pays un régime militaire « déguisé » qu’un régime civil démocratique issu de l’opposition.
Toute guerre, quelle qu’elle soit cause toujours des dégâts collatéraux. Si ce chambardement au sein des forces armées et une déclaration de guerre, cela veut dire que bientôt nous allons commencer à compter les victimes civiles qui seront atteints par des tirs de l’artillerie militaire qui cherche à repousser la progression de la gabegie qui gagne beaucoup de terrain depuis 2009.
Mohamed Chighali