Sortie ratée de l’ex président Aziz devant la presse

La conférence de presse de l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz qui a suscité un grand tapage médiatique est loin d’avoir tenu toutes ses promesses. Les mauritaniens sont donc restés sur leur faim, eux qui espéraient être enfin édifiés sur des questions importantes ayant trait à la gestion chaotique du pays durant la dernière décennie.

Ce fiasco s’explique en partie par l’amateurisme des journalistes conviés à ce show médiatique, des journalistes qui se sont donnés en spectacles, avec  leurs applaudissements nourris en guise d’acquiescement des propos de Mr Aziz. C’est à croire qu’on avait plutôt affaire à de fidèles disciples ; un comportement qui en dit long sur la clochardisation de la presse mauritanienne.

Heureusement que des confrères de la presse étrangère ont pu sauver la face. Et même là, il a fallu compter avec l’attitude peu coopérative de Mr Aziz qui a refusé de parler français, une manière sans doute de jouer sur la fibre patriotique en espérant reconquérir la sympathie de certaines franges de la population.

C’est ainsi que côté questions, nos confrères, à de rares exceptions près,  ont comme par enchantement éviter toutes les questions qui fâchent, se contentant de quelques interrogations superficielles agrémentées de réponses évasives d’un Aziz qui s’efforce de faire bonne figure mais qui est trahi par son expression hésitante et son raisonnement débridé.

Ainsi, tout au long de cette conférence de presse, Mr Aziz  s’est focalisé sur la crise de l’UPR dénonçant avec la dernière énergie la mainmise du président actuel et sa mise à la touche. Il a également cloué au pilori la violation du règlement intérieur du parti et de la constitution, dénonçant au passage l’accaparement jugé illégal et immoral du parti par le président et son équipe.

Et à l’occasion Mr Aziz s’est subitement transformé en démocrate patenté, allant même jusqu’à donner un cours de démocratie à ses invités. C’est ainsi qu’il s’est élevé contre ce qu’il a appelé la personnalisation des choses et le culte de la personnalité.

Son retour précipité sur la scène politique, il l’explique par son souci de défendre et d’ancrer les acquis démocratiques et la stabilité du pays qu’il juge menacé. Et il n’a pas non plus été tendre avec le gouvernement qu’il a qualifié de paralysé et partant inefficace.

D’ailleurs Mr Aziz n’a pas été tendres avec certains membres du gouvernement dont le ministre de l’énergie qu’il a accusé d’avoir été téléguidé pour convoquer la réunion qui a décidé de fixer la date du congrès du parti.

Mais aussi, le premier ministre Mr Ismael était dans son viseur. A ce dernier Mr Aziz est allé jusqu’à douter de son appartenance à l’UPR, une attitude bizarre quand on sait que l’actuel premier ministre fut membre en 2009 du premier Bureau Exécutif de l’UPR et président de la Commission d’organisation du premier congrès, le seul jusque-là d’ailleurs.

Il fut également le directeur de campagne du candidat du parti à l’élection présidentielle, en 2009, au niveau de Nouakchott.

Des bourdes de ce genre, on en compte beaucoup au cours de cette conférence de presse. C’est ainsi que l’ex-président a affirmé sans gêne que certains ministres ont bel et bien bénéficié de licences de pêche ; une chose tout à fait normal affirme-t-il, non sans ostentation.

Il a également reconnu qu’il est riche, balayant d’un revers de la main les accusations d’enrichissement illicite qui dit-il ne sont pas fondées.

S’agissant de l’octroi des marchés publics Mr Aziz a dit qu’en dehors de quelques rares marchés passés sous la forme du gré à gré (Construction de l’aéroport, du nouveau Palais des Congrès et l’achat des avions de la MAI), la transparence était toujours de mise.

Il est pour un audit général et pour la mise sur pied d’une commission d’enquête parlementaire, mais précise-t-il, les membres de cette commission en seront les premières victimes. Pour Mr Aziz, les dirigeants des partis qui s’activent pour lui demander des comptes sont tous mouillés et chacun d’eux dit-il à un dossier compromettant.

L’ex président dit avoir laissé les comptes du pays au vert avec la bagatelle de 21 milliards d’ouguiyas dans les caisses de l’Etat et cela dit-il sans compter les 15 millions de dollars qui devaient être versés dans les caisses du trésor public, dans les jours qui suivent le 1er août.

Et, au niveau de la BCM, le solde en devise se chiffrait à un milliard trente six millions de dollars.

Donc à l’en croire, il n’avait rien à craindre. Mais le hic c’est que à une question sur les rapports de la cour des comptes publiés récemment, il a répondu avec désinvolture et d’une manière plutôt évasive.

Par ailleurs, les grandes questions économiques n’ont pas été abordées, notamment la pêche et les mines, avec le sort réservé aux centaines de milliards issus de la vente du fer dont les cours avaient connus une hausse historique entre 2012 et 2014.

Aucun mot non plus sur l’utilisation des 200 millions de dollars versés par les libyens en contrepartie de l’extradition de Sénoussi.

Voilà des dossiers qui pourraient être mis sur la table par la commission d’enquête parlementaire si jamais elle voit le jour ou à défaut par un éventuel tribunal destiné à juger les crimes économiques de l’ancien régime.

Bakari Guèye

gueyebakary22@yahoo.com

 

 

 

 

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