Tribune: Le succès du dialogue tient à la légitimité des parties prenantes

Une scène politique minée par l’héritage conservateur

La scène nationale mauritanienne reste dominée par des forces conservatrices, héritières de logiques pré étatiques ancrées dans le tribalisme, le fractionnement social et une culture de prédation maquillée sous des formes de solidarité clanique et de réseaux d’influence.

Espérances citoyennes et besoin de refondation

Dans ce contexte de blocage systémique, une large frange de la population nourrit un véritable espoir : celui de voir naître un dialogue national sérieux, inclusif et porteur de sens. Ce dialogue, s’il est conduit avec sincérité, pourrait devenir un tournant majeur. Il ouvrirait la voie à des solutions structurelles et politiques fondées sur la raison, la justice et l’ambition collective. L’objectif est clair : traiter les causes profondes de la crise nationale et jeter les bases d’un nouveau contrat social.

La question centrale : qui doit dialoguer ?

L’appel au dialogue, loin des postures de confrontation, doit incarner une démarche de responsabilité politique. Pour être crédible et utile, il doit reposer sur une dynamique inclusive et authentique. Mais une vérité fondamentale s’impose : le succès du dialogue dépend de la légitimité de ses participants.

Un dialogue constructif ne saurait accueillir des figures discréditées, ni être le théâtre de calculs partisans ou d’accords clientélistes. Il doit être porté par des acteurs intègres, enracinés dans la société, dotés de légitimité populaire et animés par une vision éthique.

L’impératif d’une vision commune

Un dialogue véritablement transformateur ne peut se réduire à un outil de communication ou à une plateforme de recyclage politique. Il doit s’ancrer dans l’intérêt supérieur de la nation, et être guidé par des principes de justice, de transparence et de responsabilité. Toute tentative de réforme qui ignore cet impératif est vouée à l’échec.


Pourquoi l’échec persiste-t-il ?

Malgré les multiples appels à la réforme, la Mauritanie peine toujours à remplir les conditions fondamentales d’un État moderne : institutions démocratiques, gouvernance vertueuse, administration compétente, développement durable. Les racines de cet échec résident dans la persistance des logiques archaïques de gestion du pouvoir.

Tant que ces logiques structureront l’accès et l’exercice du pouvoir, toute réforme restera cosmétique.

Le recyclage des élites : une spirale d’échec

L’un des signes les plus alarmants de cette inertie est le recyclage systématique d’acteurs politiques ayant échoué, voire nui au pays. Trois profils émergent :

  1. Les pionniers retraités : vétérans du système, leur retour fige le débat et réactive des dynamiques dépassées.
  2. Les repliés : jadis prometteurs, leur proximité avec le pouvoir a érodé leur crédibilité.
  3. Les opportunistes : experts du caméléonisme politique, ils ont bâti leur carrière sur l’enrichissement personnel et l’inconstance idéologique.

Leur participation au dialogue serait un aveu d’échec, renforçant l’idée que le système est incapable de se renouveler.

Retrouver le sens de l’engagement public

Ce que les citoyens attendent, ce n’est ni un simulacre de réforme, ni des négociations opaques entre élites discréditées. Ils exigent un débat sincère, un exercice de vérité, une refondation du contrat social portée par des valeurs claires : compétence, probité, justice sociale.

S’il doit y avoir dialogue — et il le faut —, il doit être porteur de rupture, enraciné dans la réalité, porté par des femmes et des hommes de terrain. Faute de quoi, ce serait une mise en scène politique de plus, vouée à reproduire les échecs du passé.

Un dialogue sans légitimité, sans vision, sans courage politique, n’est qu’un théâtre de faux-semblants. Seule l’émergence d’une nouvelle élite, sincère et responsable, pourra impulser une dynamique de transformation réelle. La Mauritanie mérite mieux qu’un recyclage permanent : elle mérite un sursaut de vérité et d’intégrité.

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