L’Union des Forces de Progrès (UFP) a organisé mercredi soir à Nouakchott une rencontre débat avec des journalistes de la presse nationale et internationale.
Cette rencontre qui se voulait franche et ouverte pour le traitement des questions nationales sensibles a permis aux responsables du parti poussés jusque dans leurs derniers retranchements de donner le point de vue et la vision réels de cette formation politique dont le rapprochement avec le pouvoir entamé au lendemain des élections contestées du mois de mai dernier soulève beaucoup d’interrogations.
Entouré de ses principaux collaborateurs, le Président du parti Mohamed Ould Mouloud a dans son mot de bienvenue dénoncé la situation en Palestine et la complicité des gouvernements occidentaux et notamment les Etats Unis d’Amérique.
Il a salué au passage l’initiative Sud-Africaine ayant consisté à déposé une plainte contre Israël devant la Cour internationale de justice (CIJ), l’accusant de crimes de génocide contre les Palestiniens à Gaza après près de trois mois de bombardements israéliens et la mort de plus de 21 500 personnes.
Ould Mouloud a lancé un appel pour soutenir cette initiative et invité les mauritaniens à manifester leur soutien devant l’ambassade d’Afrique du Sud.
A la question insinuant l’abdication du parti face au pouvoir et face à la défense des préoccupations des citoyens les dirigeants de l’UFP ont balayé toutes les accusations. Pour le président Mouloud le parti a accepté la perche tendue dans l’intérêt du pays et cela en mettant à contribution le climat d’apaisement et d’ouverture qui a marqué le mandat du président Ghazouani.
Concernant le « Pacte Républicain » il s’inscrit dans la volonté affichée de part et d’autre pour régler les questions qui préoccupent les mauritaniens.
L’ensemble des acteurs politiques ont été mis au parfum de l’initiative dès le départ et s’étaient engagés à évaluer sa qualité le moment venu.
Et il s’avère selon la thèse défendue par l’UFP que l’ensemble des problèmes du pays sont pris en compte par le pacte dont la mise en œuvre a été retardé dans le but d’assurer le plus large consensus possible autour de lui.
Des questions jugées fondamentales comme l’officialisation des langues nationales figurent sur le document, une première depuis l’indépendance du pays en 1960, se félicite-t-il.
Selon Me Lô Gourmo, 1er Vice-président du Parti le Pacte a été signé au grand jour. Son premier point concerne la révision du système électoral et le second concerne la question de l’unité nationale qui dit-il nécessite des solutions urgentes. Et le professeur Lô de souligner que les points inscrits dans le pacte sont divisibles dans le temps, certains nécessitant des solutions urgentes et d’autres pouvant être réglés sur une échelle de temps plus ou moins longue.
Sur la question de la passivité du parti face aux problèmes des citoyens, Ould Mouloud a assuré que le parti conserve ses capacités de mobilisation, ajoutant que le fait qu’il ne dispose pas d’élus ne diminue en rien son efficacité et sa force d’action et de proposition.
L’UFP a-t-il souligné a toujours été aux avants postes comme ce fut le cas lorrsque le parti avait engagé un dialogue avec l’ex président Moawiya Ould Sid’Ahmed Taya, en 2008 au sein du FNDD pour résister au putsch, en 2013 avec le boycott des élections par la COD et en 2017 pour le boycott du référendum constitutionnel.
Tir groupé contre l’opposition
Dans ce qui ressemble à un véritable déballage, Me Lô Gourmo n’a pas ménagé ses amis de l’opposition dont certains ont été assimilés à des traitres.
D’abord au sujet de l’institution de l’opposition qui selon lui n’a jamais eu d’existence réelle, l’UFP à qui devait revenir à l’époque le Secrétariat Général et le RFD ayant été persona non grata.
Selon le professeur Lô les dirigeants de cette institution avaient détourné les deniers publics. Et il a invité l’Inspection Générale de l’Etat d’ouvrir un audit à ce sujet et une plainte est déjà déposé au Conseil Constitutionnel.
A propos du dialogue politique prévu en début de mandat et ayant capoté à la dernière minute, Me Lô accuse sans ambages Tawassoul et Birame Dah Abeid de l’avoir fait échuer.
A la veille de l’ouverture c’est Birame note Me Lô « qui a fait un scandale » en exigeants d’être représenté 2 fois, lui en tant qu’ancien candidat à la présidentielle et le parti Sawab. Et dans la foulée, suite à l’interdiction du congrès du parti RAG à Atar il a claqué la porte.
Pour sa part poursuit Me Lô, le parti Tawassoul a à la veille de l’ouverture du dialogue notifié une déclaration demandant le report. Ainsi dans la même soirée Ould Waghf a fait une déclaration télévisée actant le report du dialogue.
Un autre cheveu dans la soupe du côté de l’APP qui exigeait pour sa part la participation des ONG.
C’est dire que pour l’UFP c’est bien ses amis de l’opposition qui portent la responsabilité d’avoir sabordé le dialogue pouvoir/Opposition.
Cette situation a découragé des partis comme l’AJD qui ont juré de ne plus prendre part à aucun dialogue.
Autre révélation importante concernant le fait que c’est l’UFP qui a œuvré pour la participation au dit dialogue du RAG et des FPC, des partis non reconnus.
Mouloud candidat par défaut à la présidentielle
A la question de savoir s’il allait se présenter à l’élection présidentielle du 22 juin prochain, le président de l’UFP a affirmé qu’il s’était toujours présenté contre son gré.
En 2007 explique-t-il, la décision de se présenter avait été prise à un mois de l’élection et le parti était sur le carreau sur le plan financier. Idem en 2019 où sa candidature avait été présentée à la dernière minute suite au fiasco de la candidature unique de l’opposition.
L’objectif derrière ces candidatures c’était que le parti soit présent sur le champ politique.
Pour 2024 le bureau politique devrait se réunir incessamment pour définir une décision à ce sujet.
L’unité nationale, une priorité pour le parti
En réponse à une question accusant certains membres du parti de se dresser contre le règlement du passif humanitaire, Dr Khalilou Ould Dedde, ex député et membre du directoire a rappelé les positions et les actions du parti sur cette question.
Pour le Dr Ould Dedde la question de l’unité nationale est une priorité pour le parti et pour le pays. Il a rappelé qu’aux heures sombres des événements de 1989, le parti s’était dressé contre toutes les exactions contre les noirs.
Des groupes étaient formés et faisaient du porte à porte pour protéger les citoyens menacés d’expulsion et de sévices et ce à leurs risques et périls.
Il a également rappelé la contribution de l’UFP au mouvement FRUIDEM qui luttait contre le racisme d’Etat.
Les journalistes cloués au pilori
A l’occasion de cette soirée débat, les journalistes aussi à l’instar de certains acteurs politiques ont eu droit à leur dose de critiques.
Me Lô Gourmo très remonté contre ce qu’il qualifie de politisation de la presse et notamment de certaines questions comme celles des langues et du passif humanitaire.
Le niveau, la déontologie et la politisation des journalistes a été mise en cause par le professeur Lô qui a dénoncé les préjugés de certains medias contre l’UFP et la peur que leur inspire des acteurs politiques qu’ils n’oseraient pas attaquer.
Il a pointé du doigt la banalisation du métier invitant les journalistes à respecter la déontologie et à rechercher la vérité dans les faits. Et Me Lô de conclure en disant que : « Le temps de la politique n’est pas le temps journalistique ».
Bakari Gueye
Excellent compte rendu. Très professionnel