Atika, une jeune fille de 13 ans, se voit contrainte d’épouser un homme de l’âge de son père. Elle sera intégrée dans un foyer polygame. Malgré son brillant parcours scolaire et ses espoirs de réussir son examen, son rêve vire soudainement au cauchemar.
Atika devient ainsi le symbole des nombreux calvaires vécus par des adolescentes, en particulier dans les milieux ruraux, confrontées aux mariages précoces. Certaines, incapables de supporter ce fardeau, choisissent la fuite, tandis que d’autres se voient contraintes à des actes désespérés, allant parfois jusqu’au suicide.
Les conséquences dévastatrices du mariage précoce, tel que vécu par Atika, s’étendent bien au-delà de sa vie personnelle. Les jeunes filles mariées de force se retrouvent souvent confrontées à des problèmes de santé graves liés à la grossesse précoce, mettant en péril leur bien-être physique et psychologique. Leur éducation est interrompue, compromettant ainsi leurs chances d’acquérir les compétences nécessaires pour s’épanouir professionnellement.
Sur le plan social, ces mariages forcés contribuent à perpétuer le cycle de la pauvreté et de la dépendance économique. Les filles mariées précocement sont souvent privées de la possibilité de prendre des décisions autonomes, les maintenant dans des situations de vulnérabilité accrue.
En décembre 2022, le lancement officiel du projet « Deenka – Prévention et protection des adolescentes contre les mariages d’enfants en Mauritanie » a eu lieu à Nouakchott. Ce projet vise à contribuer à l’abandon des mariages d’enfants dans les régions du Guidimakha et du Hodh Chargui, particulièrement touchées par ce phénomène. La participation du Ministère des affaires sociales, de l’enfance et de la famille démontre la volonté réelle du gouvernement de lutter contre ce fléau.
En effet, bien que le taux de mariages d’enfants de moins de 15 ans soit passé de 15% en 2000 à 5% en 2021, il est crucial de noter que les progrès sont inégaux et que le recul du mariage d’enfant demeure trop lent. Le taux de diminution est faible, laissant craindre une augmentation du nombre total de mariages d’enfants d’ici 2030.
Pour contrer ces réalités préjudiciables, des projets comme « Deenka » doivent s’accompagner d’efforts visant à sensibiliser les communautés locales aux dangers et aux conséquences néfastes des mariages d’enfants. L’éducation, en particulier celle axée sur l’autonomisation des filles, devrait être au cœur de ces initiatives.
L’adoption de cadres juridiques progressistes représente un élément essentiel dans la lutte contre le mariage des enfants, comme le souligne la théorie du changement « Des Filles, Pas Épouses ». Les modifications législatives liées au mariage des enfants doivent s’accompagner de lois, de politiques et de programmes globaux axés sur l’autonomie et les droits des filles et des enfants.
Le renforcement des cadres juridiques progressistes doit être suivi d’une mise en œuvre efficace, avec des sanctions dissuasives pour ceux qui enfreignent ces lois. Les programmes gouvernementaux et non gouvernementaux devraient également s’attacher à fournir un soutien aux victimes de mariages d’enfants, les aidant à reconstruire leur vie et à accéder à des opportunités éducatives et professionnelles.
En somme, la lutte contre le mariage des enfants en Mauritanie nécessite une approche holistique, combinant sensibilisation, réformes juridiques, programmes éducatifs et assistance sociale. Ce n’est qu’en abordant ces aspects interconnectés que l’on pourra espérer briser le cycle du mariage précoce et donner aux filles la chance de réaliser leur plein potentiel.
Ousmane Hamed Doukouré