Le réquisitoire du Parquet présenté hier devant la Cour où est jugé l’ex président mauritanien Mohamed Ould Abdel Azizet un pré-carré de proches collaborateurs a requis de lourdes peines et la saisie de tous les biens prétendument détournés. 20 ans de prison et une amende de 100 millions MRO ont été requis contre l’ex homme fort du pays.
De lourdes peines allant de 10 à 5 ans et de fortes amendes ont été également requises contre ses co-accusés.
Reste à savoir si ces peines seront confirmées par le verdict final. Quoiqu’il en soi ce procès que d’aucuns présentent comme un procès politique n’a pas suscité l’enthousiasme des mauritaniens surtout après le blanchiment des centaines d’accusés indexés par le fameux rapport de la Commission d’enquête parlementaire.
Ledit rapport a été considéré dès le départ par le principal accusé comme une machination visant à l’écarter de la scène politique.
Cette accusation a toujours été rejetée par le pool des avocats de l’Etat. Mais coup de théâtre hier après le témoignage devant le tribunal de Haimoud Ramdane ex ministre de la justice qui était chargé du dossier dès le début. Ce dernier a fait des déclarations rocambolesques qui risquent de mettre à mal la sérénité des juges.
C’est ainsi qu’il a déclaré que dès la réception du dossier lui et son staff ont planché trois jours durant pour son étude et ils étaient arrivés à la conclusion suivante : le rapport était rédigé de façon accusatrice par une seule partie et selon un seul point de vue et sans aucune description claire des accusations.
Le staff du ministère était également étonné du fait que le dossier atterrisse chez eux alors que le Parlement était habilité à traiter certains crimes. Cela était vu comme une ingérence du législatif dans le pouvoir judiciaire et donc une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs.
Autre déclaration de l’ex garde des Sceaux : l’immunité du Président est absolue. C’est donc dire que Aziz avait raison sur ce point qui a suscité un débat qui a fait couler beaucoup d’ancre.
Et cela est d’autant plus important que l’ex président avait bâti toute sa ligne de défense sur ce point là.
Ces révélations portent un coup d’ombre sur ce procès et risquent de peser sur le verdict.
Les déclarations de l’ex ministre mettent en évidence la domestication de l’appareil judiciaire qui depuis toujours a du mal à se départir de la tutelle de l’Exécutif, une situation dont l’ex président avait largement profité et qui se retourne aujourd’hui contre lui.
Quoiqu’il en soi ce dossier qui continue à plomber la scène politique nationale devrait être soldé au cours de ce mandat finissant du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. Et même en cas de condamnation de l’ex président Aziz il ne serait pas étonnant qu’il bénéficie le plus rapidement possible d’une grâce présidentielle.
Bakari Gueye