Le président de la section de Néma de la fédération nationale des éleveurs

Considéré à juste titre comme la principale région d’élevage en Mauritanie, le Hodh Charghi regorge de potentialités dans ce domaine. Il s’agit en fait d’un véritable capital sachant que la ressource animale est une marchandise stratégique.

Les 8 Moughataas et 3 arrondissements de la Wilaya sont couverts par les services de l’élevage. Mais cela s’avère insuffisant car il faut compter avec les 500 localités que compte la région.

En 2022, la couverture vaccinale est estimée à 60% pour les bovins, soit près de 600.000 vaches vaccinées ainsi que 1.200.000 petits ruminants.

Quant au nombre  de bovins abattus la même année il est de 16.955. Pour les petits ruminants il s’élève à 23.470  et pour les chameaux l’abattage a porté sur 1827 bêtes.

S’agissant des exportations vers les villes de Nouakchott, Nouadhibou, Zouérate, les chiffres se présentent comme suit : 19.430 têtes de bovins, 332.838 petits ruminants et 20.560 chameaux.

Au niveau local, le secteur fait face à des problèmes structurels et la ville de Néma peine toujours à avoir un marché de bétail digne de ce nom d’où un manque notable d’organisation des vendeurs de bétail.

Pour en savoir plus sur les problèmes rencontrés par les professionnels du secteur au niveau de la région, nous avons rencontré Cheikh Betar Sidi Ould Behah, président de la section de Néma de la fédération nationale des éleveurs.

Quels sont selon vous les problèmes les plus aigus auxquels vous faîtes face en tant qu’éleveurs ?

Nous sommes dans une région où l’économie est exclusivement basée sur l’élevage. Le bétail existe en abondance mais nous faisons face à un manque d’aliments pour le nourrir. Il y a une grande pression sur l’environnement. Aujourd’hui avec les problèmes sécuritaires au Mali, nous avons du mal à trouver du fourrage pour faire vivre notre bétail. La solution de mon point de vue c’est l’orientation vers les cultures fourragères. C’est une urgence car actuellement même les aliments pour bétail qui venaient du Mali se font rares depuis l’année dernière.

Qu’est-ce que l’Etat doit faire pour régler ce problème ?

Nous voulons que l’Etat investisse dans l’élevage pour le moderniser. Nous avons besoin de moyens. Il faut qu’on trouve des prêts. Cela va nous permettre de monter des fermes modernes et d’introduire des techniques comme celles qui permettent l’amélioration des races.

Que pensez-vous des projets en cours menés par le ministère de l’élevage ?

Nous saluons la volonté du président de la République Son Excellence Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani mais nous attendons toujours la concrétisation des engagements pris à Timbédra. Nous n’avons toujours pas reçu les 8 milliards promis. Nous avons pourtant constitué et déposé nos dossiers même si on nous a imposé des critères parfois impossibles à remplir comme par exemple le fait de nous exiger des titres fonciers.

Je veux seulement rappeler que l’élevage dans la région ne va pas se développer tant qu’il n’y a pas eu des investissements. Pourquoi on donne des milliards à l’agence Taazour et pas au secteur de l’élevage ?

Nous avons par exemple l’usine de lait. Celle-ci ne va jamais se développer tant que les éleveurs n’ont pas reçu l’aide qu’il faut. Il y a une complémentarité qui est nécessaire. Les éleveurs ne pourront pas évoluer sans avoir des prêts.

Justement qu’en est-il exactement de l’usine de lait. Quel avait été son problème ?

J’ai suivi cette usine au cours de toutes ses étapes. A son lancement elle avait bien marché avec son directeur Cheikh Bouye. A l’arrivée de son second directeur le personnel a atteint 45personnes et les dettes 120millions. Avec son 3ème directeur, les employés étaient 240 et ce fut la faillite.

Mais ce projet a contribué à changé les mentalités. La vente de lait a beaucoup aidé les familles mais ce n’était pas suffisant, il fallait qu’elle soit accompagné de l’octroi de crédits aux éleveurs.

Vous avez souligné l’importance des cultures fourragères, les éleveurs sont-ils prêts à s’autofinancer pour lancer des projets dans ce sens ?

Oui. Certains parmi nous ont déjà commencé. Il y a Mohamed Didi qui a monté sa ferme. Moi aussi je suis dans la course. Mais cela demande une étude et de gros moyens.

Quels sont les problèmes que vous rencontrez au niveau de l’exportation du bétail ?

Nous pensons que ce n’est pas une bonne idée d’exporter nous-mêmes le bétail. Ceux qui en ont besoin doivent venir le chercher ici. Nous devons ériger des marchés frontaliers.

L’année dernière au Sénégal, nous avons subi de grandes pertes à cause des vols et autres. En amenant le bétail là-bas c’est plutôt le Sénégal qui engrange les bénéfices.

L’éleveur se présente plutôt comme la victime. Même au niveau local c’est le boucher qui est le principal bénéficiaire. Par exemple ce dernier paie un chameau à 300 ou 400.000, l’égorge et le revend par kilo et il arrive qu’il bénéficie du double. Alors que l’éleveur ne gagne rien du fait du coût élevé de l’entretien de l’animal ((alimentation très chère, etc).

Nous demandons au gouvernement de créer des unités modernes pour l’exportation de la viande et de nous impliquer davantage dans toute la chaîne.

Propos recueillis à Néma Par Bakari Gueye

Source : Mensuel HORIZONS N°033/Avril 2023

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