De l’activité physique à la question du sport en Mauritanie

Par Boubou SYLLA

Il est admis par tous (communauté scientifique internationale, Organisation Mondiale de la Santé, Ministère mauritanien de la Santé…) que l’activité physique participe activement à la réduction du risque de maladies cardiovasculaires et du diabète, à un meilleur contrôle du poids, à l’amélioration de la santé mentale et de l’estime de soi, au renforcement des capacités d’apprentissage… La liste est longue ! C’est parce qu’ils l’ont compris que beaucoup (mais pas encore assez) de nos compatriotes s’adonnent individuellement à cette pratique par la marche à l’intérieur du stade olympique de Nouakchott, aux abords des routes principales ou à la sortie de la ville. Mais qu’en est-il de la place du sport dans notre pays ?

Au-delà de ses vertus en matière de santé, de bien-être et de développement cognitif, le sport est devenu depuis plusieurs décennies un enjeu stratégique de développement économique et social mais aussi de diplomatie internationale, pour beaucoup de pays.

Des jeux olympiques aux coupes du monde (de football, de rugby, de cricket), l’UEFA, le Super Bowl, en passant par la formule 1, le tennis et ses tournois internationaux, l’athlétisme, le cyclisme, la natation …pour ne citer que ceux-là, représentent pour bon nombre de pays une stratégie de développement socio-économique – le sport draine des milliards de dollars et crée des millions d’emplois tout au long de la chaîne de valeurs. Par ailleurs, le Sport devient de plus en plus un enjeu diplomatique : rayonnement des pays à l’international et aussi levier diplomatique pour le respect des droits humains notamment.

Combien de pays comptent autant sur le sport, que sur leurs richesses naturelles, pour se faire connaitre dans le monde ? Qui ne connait pas le Brésil grâce au football ? A travers le cyclisme, la France, le Burkina Faso et tout récemment le Rwanda, sont connus dans le monde entier. Les athlètes Kenyans, Somaliens et Ethiopiens règnent sur l’athlétisme mondial et par la même occasion font briller leur nation et leur peuple et au-delà, toute l’Afrique. Qui n’a pas salué l’endurance, la bravoure de ces marathoniens africains qui s’entraînent sous de fortes chaleurs et parfois sans chaussure ?

Regardez la liesse dans les rues de Nouakchott le soir de la victoire du Sénégal à la CAN. Nous, Mauritaniens, étions tellement fiers de nos frères Sénégalais.

Dans les pays d’Amérique, notamment aux Etats Unis et au Canada, combien d’enfants pauvres arrivent à accéder aux universités les plus prestigieuses grâce au sport ?

Dans les pays du Golf, le Koweït, grâce à Sheikh Fahad Al-Ahmad Al-Sabah, a fait du sport dès les années 70, un outil diplomatique. L’Arabie Saoudite n’a-t-elle pas organisé à trois reprises la coupe des fédérations de la FIFA ? Quid de la Formule 1 au Bahreïn et à Abou Dhabi ?

Combien de compétitions sportives internationales sont organisées au Qatar : le tennis (1993), l’athlétisme (1997), le golf (1998), le tennis de table et le cyclisme (2002) ou encore la moto (2004), et pour couronner le tout, l’organisation de la Coupe du monde de football de la FIFA en 2022.

Et la Mauritanie dans tout ça ?

Jusque dans les années 2000, chaque collège et lycée avait au moins un professeur d’Education Physique et Sportive, chaque jeune collégien et lycéen en bénéficiait. Que l’on soit enfant de parents pauvres, riches on se retrouvait tous, toutes ethnies confondues, garçons et filles, au stade ou dans la cour pour connaître nos limites, les dépasser parfois mais aussi apprendre les valeurs liées à l’effort, la coopération et l’esprit d’équipe et respecter des règles.

(Re)donner ses lettres de noblesse au Sport en Mauritanie, serait une véritable opportunité pour créer des emplois, rassembler tous les Mauritaniens autour de leurs athlètes et équipes nationales, détecter des talents dès le plus jeune âge, canaliser et valoriser nos jeunes et permettre à la Mauritanie de rayonner lors des rencontres internationales.

Une lueur d’espoir tout de même est née, avec l’élection du Président de la Fédération de Football de la Mauritanie depuis le 28 juillet 2011 M. Ahmed YAHYA, avec les quinze autres membres du comité exécutif. Ils ont réussi à hisser le drapeau de la Mauritanie parmi les grandes nations africaines de la discipline.

De même, depuis leur arrivée à la tête du Comité National Olympique et Sportif Mauritanien le 27 avril 2019, M. Abderrahmane ETHMANE et son équipe, ne ménagent aucun effort pour organiser les fédérations et les clubs, les accompagner afin qu’ils obtiennent le soutien des pouvoirs publics et puissent promouvoir l’ensemble des disciplines auprès du grand public.

 

Le secteur privé doit s’y mettre

Si cela incombe à l’Etat de mettre en place des politiques publiques de promotion du sport, d’impulser des dispositifs et d’encourager les différents acteurs, le secteur privé peut et doit soutenir, investir pour l’avenir et miser sur la jeunesse de notre pays.

A titre d’exemple, SOUMARE Aboubacar Gaye dit AKA, avant d’être Maire de la commune de Sebkha, homme d’affaires soucieux du bien-être de ses compatriotes et notamment des jeunes de Sebkha. Il a inauguré en janvier 2016 un complexe sportif comprenant un stade de foot, une salle de musculation, une salle pour les arts martiaux et un restaurant. Ce lieu unique à Nouakchott est à la disposition des jeunes des quartiers pauvres qui sont privés d’espace pour jouer, se dépenser physiquement et ainsi canaliser leur énergie dans le cadre d’une pratique saine pour le corps et l’esprit.

Certains établissements scolaires privés inscrivent dans leurs enseignements obligatoires l’éducation physique et sportive.

La promotion du sport ne peut être seulement l’affaire de l’Etat, mais il doit proposer le cadre pour inciter les entreprises à devenir mécènes ou sponsors officiels et ainsi remplir leurs obligations en matière de Responsabilité Sociale et Environnementale.

Patience… les opérateurs privés finiront par en récolter les fruits en terme de notoriété, par l’amélioration des compétences relationnelles chez les jeunes (rigueur, esprit d’équipe…) et peut-être même par des opportunités d’affaires.

Et en attendant, rappelons-nous que la grandeur d’un homme ou d’une femme ne se mesure pas seulement au nombre de milliards engrangés, mais aussi par les services qu’il ou elle peut rendre à ses concitoyens et notamment à la jeunesse de son pays !

 

Boubou SYLLA

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