Native de Nouakchott, Malika Diagana revendique son héritage multiculturel. De mère capverdienne et de père soninké de Mauritanie, elle est la nièce de Julien Lopez, un des tous premiers photographes de Saint-Louis. Après son baccalauréat, Malika continue à Dakar son cursus. Elle fait des études de graphisme et s’initie à la vidéo. Elle acquiert de solides compétences en régie lumière. Au cours de ses études de vidéo, elle a la chance de suivre un enseignement de photographie. Le contacte avec l’image lui donna une envie de continuer sur cette voie. Sensible et certainement marqué très tôt par la qualité des travaux de son oncle Julien, elle opte délibérément pour la photo en noire et blanc et s’intéresse plus particulièrement aux portraits. Son style reflète son apprentissage multiple.
« Photographier c’est écrire en lumière, c’est un moyen de donner son point de vue, de raconter une multitude d’histoires, de partager avec l’autre ainsi qu’un devoir archivage pour que les générations futures puissent témoigner du temps passé.» Confie cette jeune femme, curieuse et ouverte à l’échange. La métisse accorde une grande importance aux mélanges en création. Fréquentant artistes plasticiens, réalisateurs de cinéma ou de vidéo, comédiens et autres artistes, Malika à également fait de la chanson à Nouakchott en 2009 en collaboration avec l’artiste chanteur Ceepee.
Entretien
Initiatives news : Comment êtes vous arrivée à la photographie ?
Malika Diagana : J’étais au Sénégal pour des études en vidéo-animation et j’ai terminée mon cursus en infographie. Il y avait des cours en photographie qui nous permettaient d’avoir une meilleure vision par rapport aux cadrages et de déguiser notre regard. Je suis entrée en contacte avec notre professeur de photographie qui m’a beaucoup aidée. On était que deux femmes dans sa classe. Petit à petit je me suis initiée à la photographie.
Initiatives news : Quel photographe professionnel de renommée vous inspire?
Malika Diagana : Parmi les photographes internationaux je ne pense pas à quelqu’un de très particulier mais j’aime tous ce qui est photoreportages. J’admire beaucoup les photographes qui font ce qu’on appelle la photojournalisme. C’est un travail de terrain qui demande beaucoup temps et d’investissement personnel. Ces photojournalistes font de l’investigation qui permet de voir ce qui se passe dans le monde. Ils mettent leur vie en danger. C’est une partie de leurs photos qui sort de l’ordinaire. Comme les photos de modes entre autres. Leurs produits visent à sensibiliser et informer via l’image.
J’aime le travail de mon oncle Julien qui est photographe. Il n’est pas renommé mais il était l’un des pionniers de sa génération à saint luis dans les années 60-69 .C’est quand je commençais à m’intéresser à la photographie que je me suis mise à revoir ses œuvres qui finiront par me pousser à m’initier aux styles de photos noires et blancs.
Le noir et blanc pour moi ça nous ramène aux temps anciens. Ce qui montre que la photographie est intemporelle. Même mes photos dans quelques années ce sont mes enfants qui vont les utiliser ou en faire autre. Chose. Qui sait !
« Il est difficile pour quelqu’un qui ne compte que sur sa photo pour subvenir à ses besoins et celui de sa famille »
Initiatives news : Avez-vous des difficultés lors de vos séances de photographie ?
Malika Diagana : Je pense que de manière générale dans le travail on rencontre toujours des difficultés. C’est vrai qu’en Afrique et même qu’ici en Mauritanie la photographie n’est pas encore considérée comme un métier. Il est difficile pour quelqu’un qui ne compte que sur sa photo pour subvenir à ses besoins et celui de sa famille. C’est difficile pour tous les photographes qui en ont fait un métier. J’arrive cependant à gagner ma vie avec la photographie. En plus, j’ai une famille très tolérante qui me comprend qui me pousse dans tout ce que j’aime faire. Dans d’autres pays c’est un métier la photographie. Les photographes gagnent leur vie avec, ils payent leur factures avec et subviennent aux besoins de leur famille comme tous les autres.
L’autre difficulté est qu’il n’y a pas beaucoup de femmes dans ce milieu de la photographie. Pour être au milieu de tous ces hommes il faut vraiment avoir du courage pour s’en sortir et pouvoir s’imposer et de façon très diplomatique bien sûr.
Initiatives news : Avez-vous des projets dans un avenir proche ?
Malika Diaguana: Des projets il y en a beaucoup. Le premier projet qui se positionne actuellement c’est une formation en photo journalisme en partenariat avec l’IFM et avec des photographes professionnels tels que Béchir Maaloum et Daouda Corréra pour une petite session d’atelier, une croisière entre les photographes et les journalistes pour mieux parler de l’image, de son impacte dans la société. Ce projet est imminent c’est vers la fin de l’année 2018. Un autre projet d’exposition toujours en partenariat avec l’IFM et avec l’institut français de saint est prévu vers le 10 novembre jusqu’au 30 et 31 novembre 2018. Il ya aussi la rencontre des photographique à Lagos. D’ailleurs c’est où je vais pour traiter des problèmes liés à l’image et aussi parler de comment mieux organiser son travail en tant que photographe puis rencontrer d’autres photographes. Lagos contient une plateforme très importante au niveau de la photographie dans le monde mais aussi au point de vue artistique.
Compte tenu de l’émergence de la photographie africaine contemporaine qui est encore très récente, il est important d’y aller, je représente et le Sénégal et la Mauritanie et je suis contente qu’on m’ait choisie pour représenter ces deux pays et être parmi ceux qui vont exposer leur travaux et montrer leur vision. Dans un avenir proche, je songe à faire des photographies qui inspirent sur des thèmes de société ayant un lien avec le photojournalisme, faire un travail d’investigation et voir les problèmes de société ; de l’économie entre autres.
« Ce qui est important pour moi c’est de dire aux jeunes qui ont envie de faire de la photographie de le faire de manière très professionnelle »
Initiatives news : Quel conseil donner vous aux jeunes qui veulent évoluer dans le milieu de la photographie ?
Malika Diaguana: comme la Mauritanie est encore un terrain vierge en matière de photographie, je pense qu’il ya encore pleins de choses à accomplir. Ce qui est important pour moi c’est de dire aux jeunes qui ont envie de faire de la photographie de le faire de manière très professionnelle, de ne pas le prendre comme quelques chose qui est à la mode, comme de nouvelles chaussures. Ils ne doivent pas utiliser l’image n’importe comment. Il faut respecter la déontologie et le droit à l’image. Aujourd’hui on est au temps de l’image numérique. Il faut très souvent revoir l’image aux temps de la photographie argentique pour que tout ce travail que les anciens photographes ont fait ne reste pas vain. On doit vraiment revoir ces œuvres très anciennes et essayer de l’actualiser.
Initiatives news : Vous avez été également chanteuse choriste. Parlez nous un peu de cette expérience.
Malika Diagana : Vous savez, moi je suis quelqu’un qui aime beaucoup la musique. J’écoute toute sorte de musique ; surtout quand je travaille pour traiter des photos. Pour moi il est impératif d’avoir de la musique à coté ça me motive et ça m’inspire. Les chœurs dans une musique c’est très important ça donne une autre atmosphère. Ma mère a été chanteuse dans les années 68-69, cela m’a un peu influencée. Et c’est juste par plaisir que je chantais mais pas pour en faire une carrière.
Entretien réalisé par Amy Fofana