Mauritanie : Recomposition du paysage politique

Bakary Guèye, journaliste
blogueur

Les élections générales du 1er septembre dont les résultats se font toujours attendre préfigurent un véritable chambardement du paysage politique.

En effet, le parti au pouvoir malgré tous les atouts dont il dispose (complicité des services du gouvernement, moyens de l’Etat, soutien du président de la République…) n’a pas pu réaliser l’OPA annoncée en grande pompe par le président Aziz. Au contraire, ce parti a été acculé jusque dans ses derniers retranchements et son million de supposés adhérents, que lui envierait le PC chinois, se sont volatilisés le jour du vote laissant ainsi la place à ceux de l’opposition qui se sont révélés plus concrets et qui se sont mobilisés massivement réalisant du coup des scores importants.

C’est ainsi qu’un peu partout et notamment dans les grandes agglomérations urbaines, l’opposition a pu damer le pion au parti au pouvoir dont la prestation était très en deçà du taux espéré.

Cette dégringolade a permis aux candidats de l’opposition de combler le vide avec notamment une montée en flèche du parti islamiste Tawassoul, bête noire du régime mauritanien.

Birame Dah Abeid à l’assemblée, un coup dur pour le pouvoir 

Autre coup dur pour le pouvoir, l’accès à l’assemblée de Birame Dah Abeid, président du  mouvement anti-esclavagiste IRA, qui a démontré qu’il va falloir désormais compter avec lui avec un réservoir électoral non négligeable qui a bénéficié au parti nationaliste arabe Sawab, qui est devenu du coup un acteur politique de poids.

A noter qu’en dehors de Birame, d’autres cadres de son mouvement feront également leur entrée au parlement. Il y aura aussi d’autres défenseurs des droits de l’homme et membres éminents de la société civile comme Samory Ould Bèye dont le parti Al Moustaghbal fait également une entrée remarquée à l’Assemblée.

Autre nouveau venu dans le paysage politique, il s’agit de l’Alliance nationale pour la démocratie (AND) que dirige le tonitruant Mohamed Ould Moine dont le passage à l’assemblée dans une précédente législature sous les couleurs du RFD avait marqué tous les esprits.

A l’occasion de ces élections, l’AND qui a présenté des candidats un peu partout dans le pays a fait beaucoup mieux que la plupart des partis traditionnels qui avaient une présence plus ou moins remarquable. L’AND se positionne ainsi comme un partenaire avec lequel il va falloir désormais compter sur la scène politique.

L’opposition en force  

Ces élections ont également été marquées par des coalitions intéressantes au sein des partis de l’opposition comme celles entre les islamistes de Tawassoul et beaucoup de partis, sans compter la grande coalition du FNDU et celle entre les FPC et l’AJDMR. Face à ce rouleau compresseur dont les islamistes ont été le véritable catalyseur, les défenses du parti au pouvoir n’ont pas pu résister, ce qui explique l’ampleur des dégâts au sein de l’UPR, le parti Etat dont l’implosion à la veille des élections avec la désignation des candidatures a permis l’émergence de certains partis cartables qui ont su tirer leur épingle du jeu au finish avec plusieurs élus(des mécontents de l’UPR).

D’un autre côté, ces élections ont permis à certains grands ténors de la scène politique qui sont dans les rangs de l’opposition de faire leur baptême de feu à l’Assemblée nationale. Tel est le cas du président de l’UFP, Mohamed Ould Mowloud et de la tête pensante de l’APP, le doyen Ladji Traoré, pour ne citer que ceux-là. Ainsi avec des hommes de cet acabit qui ont la compétence et l’expérience requise, on pourra dorénavant rêver d’une assemblée nationale respectable qui ne sera plus qu’une simple chambre d’enregistrement.

Bakari Guèye

 

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