Rapport alternatif au CRC : Child Soldiers International recommande que la Mauritanie identifie et protège les enfants recrutés par les groupes armés

Dans un rapport alternatif de 10 pages publié en anglais  le 31 octobre 2017 et adressé au Comité des droits de l’enfant sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant, Child Soldiers International a recommandé que l’État Mauritanien collabore avec le HCR, l’UNICEF et d’autres ONG pour identifier tous les individus recrutés comme enfants par des groupes armés.

Cette recommandation comprend le développement de programmes de réadaptation physique et psychologique des personnes identifiées comme tels pour leur garantir une  réintégration dans un environnement favorisant  la santé, le respect de soi et la dignité.

Le rapport alternatif de Child Soldiers International porte sur la mise en œuvre de la convention sur les droits de l’enfant. En le soumettant en prélude de l’examen par le Comité des Droits de l’Enfant (CRC) des troisième, quatrième et cinquième rapports combinés de la Mauritanie, Child Soldiers International met l’accent sur les efforts déployés par l’Etat Mauritanien pour améliorer le taux d’enregistrement des naissances, le traitement des enfants réfugiés et le risque d’enrôlement d’enfants aux frontières de la Mauritanie et du Mali par des groupes armés.

 

 Augmenter le taux d’enregistrement des naissances

Selon ce rapport établi sur une recherche documentaire, le CRC a observé en 2009 un très faible taux (55%) d’enregistrement des naissances en Mauritanie qui n’avait pas évolué depuis 2001.

« L’enregistrement des naissances est particulièrement important dans le contexte de la prévention du recrutement et de l’utilisation des enfants dans les conflits armés. » Souligne le rapport qui  poursuit que l’enregistrement des naissances étant le moyen le plus fiable de prouver l’âge d’un individu, « si les enfants n’ont pas de documents d’enregistrement de naissance et sans autre moyen fiable de prouver leur âge, il y a un risque potentiel de recrutement et d’utilisation de mineurs dans les hostilités. »


Child Soldiers International a constaté par ailleurs que dans ses troisièmes, quatrièmes et cinquièmes rapports combinés en vertu de la CRC de juin 2016, la Mauritanie avait déclaré avoir mis en œuvre la recommandation du Comité (CRC) en introduisant  en 2011 le système d’identification biométrique à travers  l’Agence Nationale du Registre des Populations et des Titres Sécurisés. « L’État partie avait omis de mentionner toute  mise à jour ou statistique sur l’impact de son nouveau système sur le taux réel d’enregistrement des naissances en Mauritanie. » Poursuit le rapport alternatif qui rappelle cependant que selon les données de l’UNICEF, le taux d’enregistrement des naissances en Mauritanie a augmenté d’environ 10% entre 2009 et 2015 à 65,6%.

Child Soldiers International a recommandé en outre de poursuivre cette tendance positive  afin d’enregistrer tous les enfants nés sur le territoire national mauritanien.  Il est suggéré notamment de créer des structures institutionnelles accessibles et gratuites y compris  des unités mobiles dans les zones rurales et reculées ; au profit des personnes déplacées et dans les camps de réfugiés.

Autre recommandation : augmenter les opportunités d’éducation, de formation ou d’autres activités productives pour les réfugiés en âge scolaire et pour les demandeurs d’asile dans l’exercice de leurs droits en vertu de la Convention relative aux droits de l’homme.

 

Conformer la loi anti-terroriste aux normes internationales

Child Soldiers International s’est dit préoccupé car « les enfants recrutés par des groupes armés au Mali mais vivant en Mauritanie pourraient être poursuivis en vertu de la loi antiterroriste (Loi n ° 2010-035) uniquement pour leur association ou leur appartenance à ces groupes. »

Le Comité CRC a précédemment exprimé ses préoccupations concernant le manque d’installations adéquates pour la détention des mineurs et le fait que des enfants soient détenus avec des adultes. Rappelle Child Soldiers International qui rajoute qu’Amnesty International avait mis en lumière des cas de mauvais traitements infligés aux suspects arrêtés en vertu de la loi antiterroriste et des cas de recours à la torture et à d’autres mauvais traitements pendant la détention des détenus.

« Cela soulève de graves préoccupations quant au traitement potentiel des individus recrutés par des groupes armés en tant qu’enfants. » Estime le rapport de Child Soldiers International qui  insiste en outre sur  l’application de la loi antiterroriste aux enfants associés aux groupes armés ainsi que sur la fixation de l’âge de recrutement par les forces armées de l’Etat.

Il est recommandé ainsi de réviser la loi antiterroriste (Loi n ° 2010-035) pour la rendre  conforme aux normes internationales et « s’assurer en particulier que les enfants associés à des forces armées ou à des groupes armés ne sont pas poursuivis, punis ou menacés de poursuites ou que les enfants accusés de crimes de droit international après avoir été recrutés illégalement par des forces armées ou des groupes armés sont considérés principalement comme des victimes de violations du droit international et pas seulement comme des auteurs présumés. »

 

Relever l’âge de responsabilité pénale et de  recrutement dans l’armée

Toujours selon le rapport de Child Soldiers International qui recommande de porter l’âge de la responsabilité pénale à 12 ans au moins, le CRC a constaté en  2009 qu’en Mauritanie cet âge de responsabilité pénale en Mauritanie fixé à 7 ans était très bas et inacceptable sur le plan international.

Le rapport indique que selon le Code pénal et l’ordonnance n ° 2005-015 de 2005 de l’État partie,  les enfants âgés de 7 à 15 ans peuvent être pénalement responsables mais ne peuvent être soumis qu’à des «mesures de protection».

« Entre 15 et 18 ans, un enfant peut être tenu pénalement responsable et peut être placé en garde à vue ou en détention provisoire. La plupart des sanctions, y compris la prison, peuvent être appliquées, mais la peine ne doit pas dépasser la moitié de celle à laquelle il serait condamné s’il était un adulte. Les enfants ne devraient pas être emprisonnés pendant plus de 12 ans et la peine de mort est interdite aux enfants de moins de 18 ans. » Mentionne le code pénal cité par le rapport qui recommande de veiller à ce que les enfants détenus ne soient pas soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et à ce que les normes relatives à la justice pour mineurs soient pleinement appliquées.

Concernant le recrutement dans les forces armées, il est recommandé à la Mauritanie de réviser la loi n ° 62132 du 29 juin 1962. Cette révision devrait avoir pour objectif de « relever l’âge minimum du recrutement militaire à 18 ans en toutes circonstances, conformément à la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant ». Indique le rapport alternatif qui rappelle également que la mise en œuvre effective de la législation sur l’âge minimum de recrutement dans les forces armées de l’État suppose que l’État soit en mesure d’établir l’âge de toutes les recrues potentielles.

D’autres recommandations ont concerné la ratification et la mise en œuvre du  Protocole facultatif sur l’implication d’enfants dans les conflits armés, du Statut de Rome de la Cour pénale internationale ainsi que l’approbation et la mise en œuvre de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.

Le Comité sur les droits de l’enfant (CRC) et Child Soldiers International

Le Comité sur les droits de l’enfant (CRC) est une des sept organisations traitant des droits de l’homme liés à l’ONU. Il est constitué par le corps d’experts indépendants veillant sur l’application de la Convention internationale des droits de l’enfant des Nations unies par les gouvernements qui ont ratifié cette Convention.  Le Comité contrôle aussi l’application du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Child Soldiers International est une organisation internationale de défense des droits humains.  Précédemment connu sous l’appellation  de Coalition pour mettre fin à l’utilisation des enfants soldats, Child Soldiers International a été créée en 1998 par un groupe d’organisations de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, Human Rights Watch et Save the Children. Son objectif initial était de faire campagne pour un traité sur les droits de l’homme afin d’empêcher le recrutement militaire d’enfants et leur utilisation dans des conflits violents. A son actif le Protocole facultatif à la Convention entré en vigueur en 2002 et portant sur l’implication d’enfants dans les conflits armés (OPAC). Basée en Grande Bretagne, Child Soldiers International est devenue un organisme de bienfaisance indépendant connecté à un réseau de droits communautaires et nationaux d’enfants et d’organisations de protection de l’enfance à travers le monde.

 

Synthèse par K-Tocka

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